Devoir de Philosophie

La prospérité et ses limites dans les années 1920

Publié le 12/02/2011

Extrait du document

Pendant les années 20, Angus Madison parle « d’illusion de prospérité ». Ces années connues pour être définies comme les années folles marquent le retour des sociétés dans une économie dite de « paix ». La guerre terminée, les gens consomment de nouveau donnant une impression de prospérité, mais cette prospérité de façade cache de profondes séquelles liées à la guerre. Notamment dans le domaine industriel, on constate un approfondissement du 2nd âge industriel, ces entreprises profitent pleinement de cette prospérité, mais on peut opposer à cela, les secteurs oubliés qui luttent pour ne pas sombrer. Les années 20 sont donc les années de tous les dangers où du jour au lendemain la prospérité qui était au coin de la rue peut disparaître.

Cette prospérité, installée dès le début des années 1920 est-elle une réalité ?

Après la crise de reconversion de 1921, les différents Etats essaient de retrouver leur niveau d’antan. (I) Mais, ils constatent que la prospérité espérée n‘est pas complète (II) et la crise de 1929 est déterminée comme étant la matérialisation concrète des limites de la prospérité des années 20.(III)

 

 

 

A la sortie de la 1ère Guerre mondiale, les Etats en pleine économie de guerre, avec un complexe militaro industriel doivent retourner à une économie dite de paix. Ils veulent un véritable retour à la normale. Malgré leurs efforts, les perdants comme les vainqueurs de la guerre se heurtent à des difficultés liées à une crise de reconversion, ainsi que des problèmes monétaires et industriels. Et la croissance des pays des années 20 est très irrégulière.

En 1921, les Etats essaient de rattraper leur retard dans certains domaines. En France, pendant la guerre il n’y avait pas de sucre, à partir de 1919 on commence à produire tellement de sucre qu’on a une surproduction qui entraîne la formation de stock. Mais au milieu de l’année 1921, l’offre devient supérieur à la demande et les cours mondiaux s’effondrent. Les prix baissent car la consommation a elle-même baissé et le chômage augmente. Les Etats doivent faire face à une crise de reconversion. Les Etats-Unis souhaitent à tout prix un retour à la normale, ils ralentissent donc les crédits ce qui affecte grandement l’Europe. Celle-ci ne peut plus commercer avec les pays « neufs » comme ceux d’Amérique Latine, le Canada, l’Inde. C’est une crise, certes passagère, mais qui a affaiblit l’Europe.

Après la crise de reconversion, entre 1922 et 1929, le taux de croissance annuel moyen augmentent pour tous les Etats . 5.7% pour l’Allemagne par exemple, mais seulement 2.7 % pour la Grande Bretagne qui est pénalisé par sa volonté de retour à la normale le plus vite possible. En effet, la £ vaut 4.86 $, elle est trop forte pour le peuple et cela provoque des agitations sociales pendant les années 1925 et 1926. Le Japon a le taux le plus fort, 6.5%, mais aucun combat ne s’est déroulé sur son territoire, il a donc été épargné et le pays a pu, pendant la guerre, faire la conquête de certains territoires. Ce taux a beau être extrêmement favorable à un retour à la normale et à une remise en place économique. Il n’est pas régulier. Ainsi l’année 1927 est une année médiocre pour tous les Etats.

Bien que le taux de croissance soit reparti à la hausse, les différentes industries ne réagissent pas pareilles face à un retour à la normale exigée. On assiste à un véritable épanouissement des secteurs de la 2ème révolution industrielle. Dans les années 20, il y a une mutation énergétique évidente. La production d’électricité a été multipliée par 10 entre 1913 et 1929. Le pétrole est lui aussi beaucoup plus utilisé notamment grâce à l’essor de l’automobile partout dans le monde. La production automobile aux EUA a augmenté de plus de 30%. On développe aussi la pétrochimie. On crée des travaux publics notamment en utilisant du béton et en construisant des buildings (surtout aux EUA). Les entreprises se concentrent. En Allemagne, les 5 entreprises de sidérurgie (Thyssen, Krupp, Stinnes…) se sont regroupées et produisent les ¾ de la production. En France, la concentration de Saint Gobain, Pechiney et Kulhman, des entreprises de chimie produisent 80% des colorants français. Mais la plus grande concentration est celle engendré par l’accord d’Achnacarry qui fonde les 7 Sisters qui produit la totalité de la production mondiale de pétrole. Mais, face à cet essor de certains domaines industriels, d’autres n’arrivent pas à retrouver leur niveau d’avant guerre. Ainsi, les anciennes branches de l’industrie comme le textile sont touchées. Le prix du coton baisse. Le charbon est en déclin. Les nouvelles énergies étant beaucoup plus utilisées. Et l’acier est beaucoup moins utilisé qu’en 1913.

Pour un retour à la normale, il fallait augmenter la production. Les Etats ont donc décidé d’augmenter la productivité. On généralise l’organisation scientifique du travail. Ford essaie de développer son 5$/day. En 1913, on travaillait 9h par jour et on touchait 2.5$, en 1920 on ne travaillerait que 8h par jour pour 5$. On instaure la standardisation. On crée des voitures bas de gamme accessible aux gens ayant moins d’argent. On constate une hausse de la production mondiale. La production manufacturée a augmenté de 25% à 40% selon les domaines. J. Marseille parle d’un « envol spectaculaire ». Les ouvriers augmentent leur productivité. La productivité globale entre 1920 et 1925 a augmenté de 30% ce qui a engendré une véritable progression de la production.

Mais la production augmente plus vite que les capacités de consommation de la population. On a donc une formation de stock. De plus, la guerre mondiale a modifié les échanges internationaux. Le protectionnisme a augmenté. Les EUA mettent en place le tarif Mc Cumber en 1922 pour protéger leur marché intérieur. La mondialisation est donc en retrait. Le commerce internationale se rétracte entre 1920 et 1929. En 1928, les échanges internationaux ne représente plus que 10% de la production mondiale. De plus, la production augmente ce qui crée au Brésil, par exemple, des stocks très conséquents et les produits comme le café servent à faire fonctionner les locomotives. De plus, il y a une crise des ciseaux dans les années 20. Le prix des matières premières baissent alors que le prix des produits manufacturés augmentent.

 

Les problèmes monétaires sont aussi un sujet délicat pour les Etats. Le retour à la normale voulu doit passer par un rétablissement d’un ordre monétaire. Après la guerre, le gold standard a été détruit, les monnaies se sont dépréciées. L’inflation fiduciaire a augmenté, notamment en Allemagne où 1$ était égale à 840 milliards de marks en 1923. De plus, dès 1919, le problèmes des réparations a été abordé. La responsabilité de l’Allemagne ayant été décrété, elle doit payer des réparations. La conférence de Londres en 1921 fixe le montant, 135 milliards de marks or. Or l’Allemagne a à peine 1 milliards de marks or dans ses caisses.

En 1922, la conférence de Gènes veut remettre en marche le système monétaire. On est dans une situation où l’inflation règne, où le change et la parité or a disparu. On instaure le Gold Bullion standard, les billet ne sont plus convertible en or pièces mais en ligots et le Gold Exchange standard, les billets sont couverts en or mais aussi par des monnaies elles-mêmes convertibles en or. Mais le Gold exchange standard repose principalement sur la suprématie des EUA et du $. Les EUA ont le plus gros stock d’or, le double de capitaux du Royaume-Uni. Le système international monétaire est suspendu au bon vouloir des EUA.

Mais les EUA n’assument pas les devoirs d’une 1ère puissance. Ils obligent les alliés à payer le dettes, ils augmentent leurs droits de douane. Ils ne jouent pas le rôle moteur, Wall Street et le Nyse ne sont pas très puissants, le système bancaire est éparpillé notamment avec la loi Mc Fadden de 1927, limitant la présence d’une banque dans un seul état. Ils sont isolationnistes. De plus, la situation en Europe n’est pas prospère. Ils essaient de rétablir l’ordre monétaire. Le Royaume-Uni essaie de casser l’inflation en utilisant une politique déflationniste. Il rétablit le pouvoir d’achat de la £. En mai 1925, 1£ est égale à 4.86$, les capitaux affluent, cela devient ingérable pour la population. Les exportations baissent et les salaires diminuent de 10%. En Allemagne, la situation est catastrophique. Elle ne peut pas payer les réparations exigées. Elle est dans une situation d’hyper inflation. Les salaires changent tout le temps. On est obligé de changer de monnaie. En 1924, le reichsmark est la nouvelle monnaie. 1924 est aussi l’année où les EUA décident d’aider l’Allemagne en injectant des capitaux et en rééchelonnant les réparations. C’est le plan Dawes. L’économie de l’Allemagne se retrouve donc sous perfusion des aides américaines.

La volonté de retour à la normale des Etats après la Première Guerre mondiale est compliquée à appliquer. Les problèmes monétaires ainsi que les obstacles au commerce international et les secteurs de l’industrie font prendre conscience aux Etats qu’ils ne pourront certainement jamais retrouvé leurs niveaux d’avant guerre.

 

 

 

 

 

 

Les problèmes touchent aussi l’agriculture et la société. Mais les différents pays ne réagissent pas de la même manière face aux problèmes. On est en pleine illusion de prospérité.

 

L’agriculture est certainement le secteur le plus touché. La meilleure qualité de l’engrais et son utilisation qui se multiplie, le machinisme, la hausse de la productivité provoquent une surproduction. Des stocks se forment. La baisse des prix est impressionnante. Par exemple, le prix du blé a baissé de 60% au Canada. Les prix des matières premières ont baissé aussi. Les prix agricoles en 1919, l’indice était de 209, en 1929 il est de 138 aux EUA. De plus, la baisse de la consommation de la population a aggravé le problème des agriculteurs. Une situation durable de surproduction agricole s’est établie au cours des années 1920 car, malgré des gains de productivité et de rendement relativement modestes, la production a augmenté plus vite que les capacités de consommation d’une population mondiale, dont les effectifs ne s’accroissent plus que modérément dans les pays industrialisés et dont le taux d’urbanisation progresse trop lentement.

 

La situation pour les agriculteurs se dégrade. En 1929, 40% des grands domaines allemands sont endettés et 42% des terres sont hypothéqués aux Etats-Unis. De plus, la hausse du protectionnisme et la rétractation du commerce mondial, rendent l’agriculture peu compétitive. Les Etats-Unis disposent de grandes exploitations mécanisées mais souffrent de la contraction des débouchés européens depuis la fin de la guerre. Les agricultures européennes reconstruites pour l’essentiel sur la base de petites ou moyennes exploitations peu modernes qui exigent des protections douanières pour endiguer la concurrence des produits à bas prix en provenance des pays neufs. L’agriculture doit faire face à de nombreuses difficultés qui la font sombrer encore plus.

 

La société est elle aussi contrastée. Il y a vraiment un développement de la classe moyenne. Cette classe veut consommer massivement, elle utilise des crédits pour atteindre le pouvoir d’achat de la classe d’au dessus. Ils sont avides d’acquérir une aisance matérielle. On est dans une société d’opulence, d’accumulation intensive, de consommation de masse. Aux EUA, l’automobile se diffuse, le confort ménager, développement de grands magasins comme Wal-Mart aussi. Les mœurs évoluent et la spéculation croît, elle n’est plus sans aucun rapport avec la réalité, à force de spéculer, le prix de l’action ne correspond plus au progrès de l’entreprise.

Le monde ouvrier est lui en proie à une montée du chômage. L’indice du niveau de vie d’un ouvrier en France était en 1922 de 120, en 1929 il n’est plus que de 108. Le fordisme ne s’est pas développé autant que les Etats l’auraient voulu. Les 5$/ day ne sont pas une réalité pour tout les ouvriers du monde. En France, malgré les traits communs, une consommation limitée par l’insuffisance du pouvoir d’achat, des conditions de logement toujours médiocres, le monde ouvrier reste profondément hétérogène et hiérarchisé.

Les paysans face aux multiples problèmes d’une agriculture qui va de plus en plus mal. Le salaire d’un ouvrier agricole passe de l’indice 206 en 1919 à l’indice 170 en 1929. En Europe, les paysanneries restent nombreuses et influentes : leur mécontentement est un facteur de crise sociale, de même que leur pauvreté relative constitue une gêne pour l’écoulement d’une production industrielle parvenue au stade de la grande série.

 

Le Royaume-Uni poursuit son déclin. Après l’agitation sociale des années 1925 et 1926, il y a une reprise économique jusqu’en 1929 mais cette reprise est éphémère. En Effet, le RU dépend du commerce extérieur et le commerce extérieur va mal. Il exporte moins de charbon, or le charbon était son domaine de prédilection. Le RU n’est pas autosuffisant sur le plan alimentaire. C’est un pays endetté qui lui aussi dépend des aides américaines. En 1929, le RU n’assure plus que 9% de la production industriel mondiale. Il perd sa place dans la hiérarchie mondiale.

L’Allemagne fait 11.6% de la production industrielle mondiale en 1928. En 1923, l’Allemagne vie une année inhumaine notamment à cause de l’hyper inflation. A partir de 1924, l’économie de l’Allemagne est sous perfusion des aides américaines. Pour Demangeon, l’Europe est en déclin, sa politique est éclatée, son unité monétaire rompue. L’Europe est devenue malthusienne.

Les Etats-Unis pendant les années 20 sont en pleine croissance économique. Mais l’offre est supérieure à la demande. Les concentrations des entreprises forment des oligopoles. L’agriculture souffre. Entre 1925 et 1926, on constate l’apparition de bulles spéculatives. On achète des actions à crédit. La spéculation est sans réalité économique.

Les Etats doivent faire face à de nombreuses difficultés comme l’agriculture ou une société hétérogène, avec une classe qui vit pleinement la prospérité alors que les autres s’enfoncent dans la misère.

 

 

 

 

 

La prospérité espérée par les Etats n’est pas une réalité. Et la crise de 1929 est la matérialisation de toutes les limites de la prospérité des années 20.

Les années 20 sont aussi celles du recours excessif aux crédits. L’esquisse d’une société d’abondance euphorise les Américains qui s’enorgueillissent aussi du dynamisme de leur industrie. Mais cette consommation encouragée par un déluge publicitaire a un revers : la montée de l’endettement. La politique des hauts salaires pratiquée par Ford reste en effet une exception. De nombreux américains ne rentrent pas dans la prospérité et le pouvoir d’achat augmente moins vite que l’offre créant un risque croissant de surproduction.

La menace masquée par la généralisation du crédit à la consommation, d’autant plus attractif que le taux d’intérêt reste très faible et que les banques rivalisent dans leurs offres. Ainsi, 80% des automobiles sont vendues à crédit. Cette fuite en avant où le consommateur peur acheter sur ses revenus futurs une voiture mais aussi plus de confort évite dans l’immédiat la mévente mais au prix d’une fragilité croissante pour les banques et l’ensemble des acteurs de l’économie. Ainsi, la seule construction automobile absorbe 85% du caoutchouc et du pétrole par exemple. Tout arrêt des ventes ne peut que susciter une catastrophe dans un marché pratiquement saturé puisqu’en 1929 on compte 29 millions de véhicules en circulation pour 123 millions d’habitants, soit un véhicule pour 4 personnes.

 

Dans l’euphorie et l’aveuglement d’une époque où chacun semble croire que tout est possible tout de suite, l’anarchie du crédit débouche sur un dérèglement majeur, la construction de bulles spéculatives sans rapport avec la réalité. La spéculation se tourne vers la Bourse de New York à partir de 1925. La hausse des cours est amorcée par le comportement des industriels les plus lucides. Conscients qu’il n’est guère opportun d’investir leurs profits dans un marché où l’offre peine à trouver sa demande, ils reportent en bourse leurs disponibilités.

Les facilités du crédit qui permettent d’acheter des titres avec un minimum d’argent, l’arrivée sur le marché de milliers d’Américains qui ont découvert le marché des valeurs grâce à l’intéressement maintiennent ensuite une tendance haussière qui se transforme en bulle sans rapport avec la réalité à partir de 1928. Même si 3% seulement des Américains participent à cette spéculation, les surenchères à la hausse ont fait passer les titres à côté de Wall Street de 27 milliards de $ en 1925 à 89 milliards en 1929.

Le 24 octobre 1929, le Black Thursday, plus de 10 millions de titres sont échangés, la valeur de la bourse baisse de 25% environ. Le 29 octobre, 16 millions de titres sont échangés. On assiste alors à une véritable catastrophe économique. Les valeurs baissent, on appelle cette période la « Hoover panic ». C’est un véritable phénomène de panique psychologique, il faut vendre à tout prix, c’est déraisonnable. Les acheteurs à crédit en voyant s’effondrer la valeur de l’action vendent leurs actions. C’est une situation dramatique. Les banques ont prêté de l’argent aux intermédiaires et les brockers font pression sur les actionnaires. Les actionnaires vont donc lever leurs épargnes à la banque. Ce simple krach se transforme en crise financière, touchant particulièrement les banques puis ça va déboucher sur une crise générale qui va plonger le monde dans une situation catastrophique.

 

 

La prospérité n’a été qu’une illusion pendant les années 20. Certes elle a été présente mais bien trop peu pour être une véritable réalité que la population mondiale a pu ressentir. Les limites étaient trop importantes pour être ignorées : les secteurs industriels oubliés, l’agriculture au fond du gouffre, la société trop hétérogène, la consommation basée sur des crédits. Cette prospérité a engendré la création de bulles spéculatives qui a conduit au krach boursier du 24 octobre 1929 puis à une crise générale devenue un étalon crise.

La crise de 1929 est une crise majeur du 20ème siècle qui a engendré la montée des régimes autoritaires, comme le régime nazi d’Hitler à partir de janvier 1933 et qui a transformé le libéralisme ainsi que le capitalisme. On est passé du Welfare capitalism à une ébauche du Welfare State.

 

 

Liens utiles