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Les Aveugles, Commentaire Composé Maeterlinck

Publié le 10/10/2010

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maeterlinck

 

Maurice Maeterlinck se rendit célèbre par la création du mouvement symboliste, il fut également un excellent dramaturge. Maeterlinck, dans un style étonnamment semblable à celui de Samuel Beckett, marquera l’année 1891 par la création de sa seconde pièce Les Aveugles  dont nous étudierons le dénouement. Cet extrait de texte présente l’intérêt d’être un drame symboliste. L’auteur met en scène un groupe d’aveugles égarés ainsi qu’un enfant sanglotant. Dans une atmosphère propice au malaise, Maeterlinck fait croître l’angoisse et le mystère et introduit adroitement une réflexion sur la condition humaine.

 

     L’auteur, tout d’abord, crée une ambiance particulièrement adaptée à l’angoisse.

D’une part, les personnages sont ici atteints d’une cécité irrémédiable et absolue qui les handicape profondément. En effet, leur perception du monde extérieur, même s’ils usent d’un champ lexical très visuel « vois-tu «, « il voit «, se limite ici à des « bruit[s] « inquiétants qu’ils interprètent sans avoir aucune certitude quant à leur origine. L’enfant enfin, seul capable de les guider, est trop apeuré pour communiquer, il « pleure «, et la tension s’en voit renforcée. Le cadre imposé aux aveugles est donc une importante source d’angoisse. D’autre part, l’absence d’information et de précisions quant au lieu, à l’identité des personnages et à l’époque plongent protagonistes et spectateurs dans un cadre vide de repères. Les didascalies sont rares et l’énonciation particulièrement floue : aucun nom n’est évoqué, les personnages sont seulement différenciés par leur âge, leur genre et l’origine de leur cécité ; certains sont « aveugles-né[s] «, d’autres sont vieux ou « vieilles « mais aucun n’est précisément identifié. Le rythme de la pièce contribue également au malaise. Effectivement, l’action est ici inexistante, les personnages, constamment dans l’attente, demeurent dans un vide oppressant.

 

     Ensuite, dans une atmosphère propice au malaise, Maeterlinck fait subtilement croître angoisse et mystère. D’une part et ce bien que les aveugles conjecturent sur l’origine des bruits, ( « bruit des pas «, « robe « ou « mer « ? ) la longueur du texte et l’absence d’indices renforce le mystère et le lecteur attend l’issue de cette situation avec inquiétude. Le mystère est complet. D’autre part, les aveugles tentent de combler le vide alentour dans le but de se rassurer. Usant d’interjection « Oh «, d’anaphores et de répétitions « Ce sont des pas ! Ce sont des pas ! « superflues, chaque réplique est désarticulée. L’omniprésence des phrases exclamative dénote un affolement certain tandis que l’abondance d’interrogatives «  Que vois-tu ? «souligne une panique évidente et un besoin de réponses. La tension est croissante : les phrases se raccourcissent, se suspendent, le rythme ralentit. Enfin, le silence apparaît, laissant les protagonistes au paroxysme de l’effroi. En outre, le rapprochement géographique du bruit à mesure que le texte avance amplifie l’angoisse des aveugles. Les différents stades de leur malaise sont d’ailleurs remarquables : d’abord ils se rassurent quant à l’origine des bruits « N’aie pas peur «, ensuite ils tentent de leur trouver une explication rationnelle, puis ils les craignent et finissent par les supplier «  Ayez pitié […]«. L’angoisse chez les aveugles s’intensifie donc tout au long de cet extrait.

 

C’est dans ce décor assurément sombre que l’auteur choisit d’introduire une symbolique forte et très travaillée. Dans cet extrait, Maeterlinck présente clairement à son lecteur-spectateur une de ses réflexions quant à l’absurdité de la condition humaine. D’une part, les bruits semblent être de véritables représentation de la Mort, ou plus largement de la fatalité. Ils se rapprochent, implacables et s’arrêtent au milieu des hommes. D’autre part, le rapprochement entre ce groupe d’aveugles en scène et l’humanité est remarquable. Il ressort de cette métaphore que l’Homme n’est pas seulement perdu, mais aveugle également. L’idée que l’on se fait de la Mort nous terrifie de la même façon que ces aveugles craignent ce qu’ils s’imaginent être l’inconnu. Enfin, on peut supposer que le seul voyant, jeune, l’enfant apeuré, n’est autre qu’une image du futur de l’humanité, du renouveau et de l’espoir des hommes. Il se révèlera finalement inutile et l’on peut voir en cela une marque de la fatalité.

     Dans une atmosphère propice au mystère, l’auteur fait naître chez son lecteur-spectateur et chez ses personnages une angoisse grandissante. De ce cadre effrayant ressort une symbolique profonde et une réflexion de Maeterlinck sur la condition humaine. Si cette symbolique est personnelle, on peut remarquer que le thème de cet extrait n’est pas novateur. Si la forme diffère, la tragédie grecque n’aborde t-elle pas les mêmes thèmes que Maeterlinck dans cet extrait ?

 

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