Les cheveux pour exprimer l'amour
Publié le 29/11/2013
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Ecriture poétique et quête du sens du Moyen-Age à nos jours Textes du Corpus « Ces cheveux d'or... », L'Olive,X, (1550), Joachim Du Bellay « Un hémisphère dans une chevelure », Le Spleen de Paris, (1869), Charles Baudelaire « La Chevelure », Spleen et idéal, Les Fleurs du Mal (1861), Charles Baudelaire Vous montrerez comment le poète célèbre la femme à travers la chevelure. Au XVIe siècle, le blason est un genre poétique très prisé. Le sonnet X de du Bellay paru dans L'Olive en 1550 fait ainsi l'éloge des cheveux de la femme aimée. Baudelaire reprend ce thème en 1861 dans Les Fleurs du mal avec « la Chevelure » dont il propose une réécriture dans Le Spleen de Paris., (1869) intitulé « Un Hémisphère dans une chevelure ». Il s'agira de montrer comment l'évocation des cheveux permet aux poètes de valoriser la femme. Ainsi, le cheveu apparaît comme un attribut de la féminité. La métaphore qui ouvre le sonnet de Du Bellay, « ces cheveux d'or », donne un caractère raffiné à la femme, dont la blondeur est rapprochée du métal précieux. La couleur du cheveu est aussi mise en avant chez Baudelaire dans « La Chevelure » à travers les métaphore « noir océan » 22 et « mer d'ébène ». La couleur noire offre une image plus mystérieuse et magnétique de la femme, toujours associée à des éléments valorisants, la mer et l'ébène. L'attention est aussi portée à la coiffure, avec « tes tresses lourdes et noires » dans « Un Hémisphère dans une chevelure ». Les cheveux sont en effet aussi une arme de séduction. Ce sont les cheveux qui fascinent Baudelaire dans son texte en prose lorsqu'il emploie l'impératif « Laisse moi respirer l'odeur de tes cheveux »1. Le poète semble ainsi succomber à la femme aimée grâce à sa chevelure. Il en est de même pour Du Bellay sur lequel le charme de la chevelure exerce un magnétisme certain, comme en témoigne la gradation « j'aime, j'adore et je prise », qui amplifie le sentiment amoureux causé par la beauté des cheveux de « Madame ». C'est une fois encore la chevelure qui attire Baudelaire, et suscite en lui le sentiment amoureux, comme l'indique la métaphore « je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse/Dans ce noir océan » 21. Le cheveu est en effet aussi le lien qui unit le poète à la femme aimée. Il est ainsi attribut sensuel. C'est lui qui procure au poète de la Pléiade « L'heur et plaisir ».le rythme binaire insiste sur le désir qui attache l'homme à la femme et qui naît de la chevelure en « premier » 2 pour Du Bellay. Cette sensualité du cheveu se retrouve dans les deux textes de Baudelaire à travers l'omniprésence du champ lexical de l'odorat, avec, dans la version en vers, les termes « parfums » (2,10,17) « aromatique » 8, « senteurs » 29, et « musc » 30 qu'on retrouve dans le poème en prose ligne 17, ainsi que « respirer »1, « odeur » (1,15,17), « odorant » 2, « parfumée » 8... Cette obsession pour l'odeur marque le désir que suscite la femme aimée à l'aide de sa chevelure. Celle-ci revêt en effet chez les deux poètes une puissance quasi-magique. Le magnétisme exercé par les cheveux dans le sonnet se traduit par la métaphore filée qui les associent à des « liens » 1 dont « forts sont les noeuds » 5, reprise par l'expression « ce dur lien » 11 . Ces cheveux qui emprisonnent le poète sont ce qui le relie à sa maîtresse. A l'inverse, la chevelure de Baudelaire semble ouvrir l'homme au monde à travers l'immensité qu'elle représente, comme en témoigne l'anaphore qui ponctue la prose des lignes 9 à 16 avec « dans l'océan de ta chevelure », « dans les caresses de ta chevelure », « dans l'ardent foyer de ta chevelure » et « dans la nuit de ta chevelure ». Les cheveux sont un tout qui libère le poète et le font, paradoxalement, voyager en restant immobile. C'est ce dont témoigne le titre « Un Hémisphère dans une chevelure » et la métaphore de la version en vers « La langoureuse Asie et la brûlante Afrique/Tout un monde lointain(...)/ Vit dans tes profondeurs. » Le magnétisme de la femme est ainsi célébré chez les deux poètes, à trois siècles d'intervalle. Il s'agit dans les trois textes de montrer en quoi la chevelure est un symbole de féminité et de séduction, qui suscite des sentiments forts chez les poètes. Cependant, là où les cheveux enferment le poète Du Bellay dans un amour exclusif, ils libèrent Baudelaire : la femme et l'amour deviennent pour le poète du XIXe siècle synonymes d'évasion du monde réel.
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