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Les hommes se posent toujours les mêmes questions

Publié le 14/09/2013

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Les hommes se posent toujours les mêmes questions

Aussi loin que l’on remonte dans le passé de l’homme, on trouve chez lui un constant besoin de connaître et de

comprendre. Connaître ce qui l’entoure. Le ciel et ses astres, la terre et ses richesses, les mille visages d’un

univers qui est pour lui source de vie et surtout, comprendre le pourquoi de son existence en ce monde,

découvrir sa vocation ou son destin. Ce besoin dut naître très tôt, beaucoup plus tôt qu’on ne l’imaginait

encore il y a quelques décennies. Dans les tombes du paléolithique inférieur, il y a plus de cent mille ans, on a

retrouvé de nombreux squelettes, enterrés dans une position identique : couchés sur le côté, un bras sous la

tête, l’autre en avant, avec, autour d’eux, déposés selon un ordre précis, des pierres taillées, des coquillages,

des cornes ou des crânes d’animaux. Ainsi-en un temps où l’homme se dégageait à peine de sa longue

hérédité animale, dès cette ère lointaine, l’Homo-sapiens s’interrogeait déjà sur la mort et couchait ses défunts

dans la position du sommeil, il allumait près d’eux des feux symboliques, il veillait ce repos sans sommeil.

Aucun doute ne peut subsister : l’homme avait déjà conscience de sa place singulière dans cet univers hostile

où l’intelligence demeurait son arme principale contre la faim, les pauvres et la peur. Les petits coquillages,

les dents, les silex, tous ces menus objets qu’on glissait dans les mains des cadavres, les aliments que l’on

plaçait aussi à leur côté attestent une croyance tenace en l’existence d’un autre monde après la mort. Les

toutes premières tombes préhistoriques montraient que l’homme se posait déjà des questions : celles d’il y a

vingt mille ans prouvent qu’entre-temps, il leur avait trouvé une réponse.

Mais il faut attendre l’apparition de l’écriture, trois mille ans avant notre ère, pour posséder des témoignages

plus précis, plus irréfutables, les tablettes sumériennes, les hiéroglyphes égyptiens, les hymnes indiens du

Rigveda1.

A la grande différence de notre époque qui fait de plus en plus appel aux connaissances rationnelles pour

résoudre les énigmes de l’univers, les peuples d’autrefois firent appel aux mythes qui décrivaient comment

l’univers s’était formé, comment l’homme avait été créé, qui expliquaient le pourquoi et le comment de tout ce

qui existe dans le monde.

Cet aspect vital des mythes est aujourd’hui pratiquement oublié : à plus de trois mille ans de distance, ces

récits sont perçus comme des contes ou de beaux-poèmes. Mais le besoin des mythes n’est pas mort pour

autant, ni même leur création.

Nous sommes beaucoup moins éloignés qu’on ne le croit de la sensibilité des peuples de jadis. Et une même

capacité d’émotion devant les mystères et les splendeurs du monde nous rend encore sensibles aux messages

des mythes.

Jacques LACARRIERE2, En suivant les dieux.

P. Lebaud - 1984

1Rigveda = l’une des quatre grandes divisions des écritures sacrées indiennes

2Jacques Lacarrière, né en 1925, helléniste et spécialiste du monde grec, a écrit récemment plusieurs ouvrages

liés à l’histoire des religions.

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