Les lais de Marie de France
Publié le 05/11/2012
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Marie Balloué L1 Etudes théâtrales / Lettres modernes Marie de France et son oeuvre Marie de France est la première femme écrivain française mais on ne sait quasiment rien d'elle, on peut néanmoins lui attribuer avec la quasi-certitude l'écriture de trois oeuvre. Elle est l'auteur des Lais, vers 1170, on en a pour témoignage une phrase du Lai de Guigemar : « Ecoutez donc, seigneurs, les récits de Marie, qui tient sa place parmi les auteurs de son temps. «. Elle écrit également un recueil de fables ésopiques, vers 1180. A nouveau on justifie cette affirmation par une citation du texte : « A la fin de ce texte, que j'ai rédigé en français, je vais donner mon nom pour qu'on s'en souvienne : j'ai pour nom Marie et je suis de France. «. Plus tard, vers 1190 on lui attribue l'écriture d'un autre texte, Le Purgatoire de saint Patrice, qui raconte avec des détails les souffrances du purgatoire, signé par une Marie, qui dit avoir traduit l'ouvrage en langue romane pour le rendre accessible à tous, pour ne pas qu'ils sombrent dans l'oubli (Traduction de latin en français pour le Purgatoire, de l'anglais en français pour les Fables, de l'oral à l'écrit pour les Lais). Le lai Les récits des aventures prodigieuses du temps des anciens bretons donnent naissance à des contes puis à des lais, qui en sont la transcription. Le lai apparait au XIIème siècle, durant le siècle ou naît une littérature romanesque qui compose un nouvel idéal, l'idéal courtois avec des valeurs nouvelles : politesse raffinée, mesure, largesse, culte de la femme. Le lai est un court poème narratif ou l'on retrouve souvent la structure universelle du conte merveilleux, c'est-à-dire : un couple exclus trouve refuge près du surnaturel, on assiste ensuite à la transgression d'un interdit, qui entraîne la perte de leur amour, mais les deux finissent par se retrouver dans le monde réel ou dans la mort. On peut ensuite dire que le lai aborde les mêmes thèmes folkloriques : thème de Peau d'Ane, du noeud à la chemise et la boucle de la ceinture, de la Belle au bois dormant et les croyances attachées à la belette, de la biche qui parle à son bourreau, de la chasse au blanc cerf, de la nef magique... Ces thèmes sont ensuite intégrés à un univers poétique lié à l'aventure, l'aventure étant l'évènement qui fait basculer le héros dans le surnaturel ou juste dans un monde idéal ou l'amour impossible devient alors possible. L'univers des lais reste quand même inscrits dans l'univers féodal du XIIème siècle. Cette ailleurs ou l'amour s'épanouit comme il le veut est souvent incarné par un objet dans lequel on enferme tout le symbolisme du récit. Plus formellement, on peut dire que le lai ne dépassent que rarement les milles vers, dans ces milles vers on retrouve un fil conducteur qui apparaît nettement, à la différence des romans arthuriens en vers ou l'on a plusieurs héros, des quêtes entreprises puis suspendues, et recommencées... Dans le lai on retrouve un nombre de personnages restreint, l'action est rapidement nouée, pas de long passage sur le passé du héros, aussi, les évènements nous sont contés dans l'ordre même où ils se produisent. Marie de France a pour rôle de faire passer ces contes populaires de l'oral à l'écrit. Ses lais abordent souvent le thème de l'amour, mais son but n'est pas de problématiser l'amour, elle ne se définit pas comme un auteur courtois, car elle ne cherche pas à défendre une morale. Des héros simplement en quête du bonheur, ils le trouvent alors dans l'amour, mais celui-ci s'accompagne de souffrance qui entraîne leur réunion soi en ce monde, soi dans la mort. Marie de France est la poétesse emblématique de cette forme de poésie, il existe beaucoup d'autres lais qui ont les mêmes sources folkloriques que les 12 poèmes du recueil dont est tiré le lai Le Chèvrefeuille, mais qui sont beaucoup en dessous de l'art de Marie de France, par ailleurs beaucoup sont restés anonymes (Par exemple, les lais de Graelent et de Guigamor, le lai de Tydorel, etc.), d'autres pas (Par exemple le Lai de l'ombre, 1136-37 de Geoffroy Gaimar). Jusque-là les lais sont de types narratifs, un récit continu en octosyllabes, mais plus tard ils deviennent une chanson proprement dite, avec des stances distinctes, voire avec un refrain (Déjà le lai de la dame du Fael qui remplit ces critères à la fois). C'est ce qu'on appellera les lais de types lyriques. Au XIVème siècle, ils se donneront des règles précises énoncées par Guillaume de Machaut (1300-1377 / Lui écrira 24 lais, dont 19 en musique), qui consiste à être divisé en deux parties de huit vers, chaque huitain se divisant lui-même en deux parties qui forme un quart de la strophe. A l'inverse du XIIème siècle ou les lais ne répondaient à aucunes combinaisons particulières de rimes, à partir de cette époque ils seront à rimes embrasées, et hétéromiques, c'est-à-dire constitué de vers de longueur différentes, sept et quatre syllabes le plus souvent (Eustache Deschamps et Jean Froissart mettent en pratique ces règles.). Le lai donnera naissance au fabliau, les deux formes se ressemblent à la différence près que le lai est plus empreint de sensibilité et de mélancolie. On considère le lais comme l'ancêtre du genre littéraire de la nouvelle. Le Chèvrefeuille Le Chèvrefeuille est un lai narratif, on n'y retrouve pas de stances distinctes ni de refrain. On retrouve par contre un fil conducteur clair : de la séparation aux retrouvailles de Tristan et de la reine. A ces derniers, qui sont les personnages principaux de ce poème, on en ajoute seulement deux autres, qui eux sont secondaires, le roi Marc et Brangien, la suivante de la reine. On peut donc dire avoir un nombre de personnages restreint. Quant à l'action, elle, se trouve rapidement nouée, dès les vers 11, 12, 13 et 14, « Le roi Marc, furieux contre son neveu Tristan, l'avait chassé de la cour à cause de son amour pour la reine. «. L'action se déroulera par la suite clairement, on ne lira pas de longs passages sur le passé du héros, seulement quelques évocations, « [...] elle y reconnaîtra bien aussitôt un message de son ami. Elle l'a déjà reconnu, un jour, de cette manière. « ; « Tristan a regagné son pays natal, le sud du pays de Galles, [...] «. Les évènements progressent de manière linéaire, ils nous sont racontés dans l'ordre ou ils se produisent : Exclusion de la cour de Tristan par le roi / Tristan retourne au pays de Galles / Il revient en Cornouailles / Il apprend que la reine se rendra à Tintagel / Il l'intercepte avec un signal, et se retrouve enfin / Puis ils se séparent. Ces évènements se rapprochent un peu de la structure traditionnelle des contes merveilleux : L'exclusion/entraîne la séparation des amoureux / leurs retrouvailles. On remarque un léger flou des notions spatio-temporelles, pas de quoi perturber la compréhension du récit, seulement aucunes descriptions, « [...] pour y demeurer une année entière [...] « ; « [...] dans la forêt, [...] « ; « [...] convoqués à Tintagel. « ; « [...] pour la pentecôte [...] « ; « Le jour du départ du roi [...] «. Le thème folklorique est là, celui des deux amours séparés, intégrer à un univers poétique qu'est la métaphore du chèvrefeuille. L'aventure est également présente, le héros bascule de l'exclusion de la cour / de la forêt ou il se cache au moment où il retrouve la reine, ce qui était impossible devient possible, « Ils ont enfin la joie de se retrouver ! Il peut lui parler à son aise et elle, lui dire tout ce qu'elle veut. «. Pour finir l'ailleurs auquel tend ce lai est celui d'un pays ou l'amour s'épanouit comme il le veut, cet ailleurs est incarné par le chèvrefeuille. On peut donc dire que ce lai de Marie de France comporte à peu près toute les caractéristiques du lai en général, hormis peut-être une, celle d'éléments surnaturels survenant durant le récit.
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