Les Mille et Une Nuits (extrait).
Publié le 07/05/2013
Extrait du document
«
— Ma sœur, retiens bien les conseils que je vais te donner.
Lorsque je serai chez le roi, il te fera demander.
Tu viendras le trouver aussitôt, et lorsque tu constateras que nos ébats auront pris fin, tu me diras : « Ô ma sœur, si tu ne dors
pas, raconte-moi une petite histoire.
» Alors je commencerai un récit...
dont l’issue coïncidera avec ma délivrance et avec elle celle de toute la communauté ! Oui, entends-tu, c’est ainsi que je compte faire oublier au roi ses habitudes
sinistres...
Dounyazade approuva ces paroles et promis de seconder les projets de son aînée.
La nuit arriva.
Le vizir prit Chahrazade et l’emmena auprès du Grand Roi Chahriyâr.
Celui-ci la fit entrer dans son lit et se livra avec elle à mille jeux.
À la suite de quoi la belle enfant se prit à pleurer.
— Pourquoi ces larmes ? s’étonna le roi.
— J’ai une sœur cadette, expliqua Chahrazade, et je voudrais la faire venir ici pour lui faire mes adieux et recueillir les siens avant l’apparition de l’aube.
Le roi envoya chercher la sœur cadette.
Dounyazade arriva dans la chambre et s’étendit au pied du lit.
Lorsque l’obscurité fut complète, elle ouvrit l’œil et attendit patiemment que le roi eût fini de mener son affaire avec sa sœur.
À la fin,
comme les deux conjoints reprenaient leurs esprits, elle se risqua à toussoter et murmura :
— Ô ma sœur, si tu ne dors pas, raconte-moi une de tes belles histoires, de celles qui nous aidaient à passer nos veillées.
Ensuite, dès avant l’aube, je te ferai mes adieux, car je ne sais trop ce que demain te réserve...
Chahrazade demanda au roi :
— Me permets-tu de lui raconter une histoire ?
— Oui, fit le roi.
Chahrazade, toute à sa joie secrète, s’adressa alors à sa sœur :
— Écoute, lui dit-elle...
Elle n’avait pas terminé son récit que le jour vint à paraître.
Chahrazade se tut.
Le roi, visiblement fort embarrassé, se demandait de quelle manière il devait s’y prendre pour connaître la fin de l’histoire.
Lorsque Dounyazade aperçut la
lumière de l’aube, elle s’écria :
— Ô ma sœur, que ton récit est beau et merveilleux !
— Ce que vous venez d’entendre, insinua alors la conteuse, n’est rien en comparaison de ce que je me propose de vous révéler la nuit prochaine...
si je reste en vie et si le roi m’accorde un délai pour le raconter.
Mon histoire comporte en
effet nombre d’épisodes plus beaux et plus merveilleux encore que ceux dont je vous ai régalés.
Alors le roi se dit en lui-même : « Par Dieu ! Je ne la tuerai que lorsque j’aurai entendu la suite.
Me voilà bel et bien obligé de reporter sa condamnation au lendemain...
»
Enfin l’aube céda la place au jour, et le soleil brilla de tout son éclat.
Le roi s’en alla régler les affaires de son royaume, soucieux qu’il était du bon gouvernement de ses sujets.
Quant au père de Chahrazade, son vizir, il fut bien étonné de ce que son maître n’envoyât pas à la mort sa nouvelle épousée, et ne
laissa pas de s’en réjouir beaucoup.
Chahriyâr cependant vaquait à ses fonctions royales, décrétant de sa bouche tout ce qu’il lui semblait bon de décréter, ce qui le tint affairé jusqu’au soir.
Il regagna alors son palais, se retira dan ses
appartements et admis Chahrazade dans son lit.
Au cœur de la nuit, la voix de la sœur cadette se fit entendre à nouveau :
— Par Dieu ! ô ma sœur, si tu ne dors pas, raconte-moi donc une de tes belles histoires, afin d’agrémenter notre veillée.
— Oui, conte-nous vite la suite de ton récit d’hier, renchérit le roi.
Qu’est-il donc arrivé à notre héros ? Je brûle de le savoir.
— Volontiers, ô roi fortuné, répondit Chahrazade.
Avec amour et respect je t’obéirai.
Et elle continua à dérouler ainsi le fil de ses histoires, l’interrompant à la fin de chaque nuit et le reprenant au cours de la nuit suivante, toujours avec la permission du roi Chahriyâr...
Et mille et une nuits s’écoulèrent.
[...].
»
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