Devoir de Philosophie

Les politiques de lutte contre le travail clandestin

Publié le 16/01/2011

Extrait du document

travail

 1. Les mesures incitatives

Depuis le 24 octobre 2007, l’Union Européenne intensifie la lutte contre le travail non déclaré. Le travail non déclaré en Europe demeure un problème qui entrave l'action de l'UE dans sa recherche d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi, et d'une croissance plus forte. Selon le commissaire chargé de l’emploi Vladimír Špidla, «L’économie souterraine sape le financement des systèmes de sécurité sociale, entrave l'application de politiques économiques adéquates et peut aboutir à un dumping social«. Même si certaines initiatives nationales contre le travail non déclaré se sont avérées payantes, l’UE doit intensifier ses actions et prendre des mesures plus décisives.

 

 Phénomène complexe suscité par de multiples facteurs, le travail non déclaré appelle une action équilibrée combinant la prévention, la lutte contre la fraude et des sanctions. Le poids de la fiscalité et des cotisations sociales ainsi que la lourdeur des procédures administratives sont généralement considérés comme des facteurs propices au travail au noir, mais ce dernier est aussi de plus en plus lié à la sous-traitance et au faux travail indépendant. Enfin, dans certains États membres, l’application de dispositions transitoires à l’égard des travailleurs des nouveaux États membres a exacerbé le recours au travail non déclaré.

Parallèlement, la fixation de salaires minimaux peut faire régresser les pratiques de paiement de la main à la main ; au contraire, la sur taxation des heures supplémentaires encourage de telles pratiques. Un renforcement de la coopération entre les autorités fiscales/caisses de sécurité sociale et l’inspection du travail joue également un rôle déterminant. Des accords spécifiques entre gouvernements et partenaires sociaux ont été à l’origine de solutions innovantes, telles que la « carte professionnelle « des travailleurs du bâtiment.

 

La Commission Européenne propose alors :

 

-  de réduire davantage la fiscalité du travail et les charges administratives, dans le contexte de la stratégie de l’UE pour l’emploi et la croissance;

-  un réexamen des dispositions transitoires par les États membres dans les meilleurs délais, au vu de la contraction du marché du travail dans certains États membres, ces dispositions limitants la mobilité des travailleurs des nouveaux États membres constituent un exemple frappant des lourdeurs administratives imposées;

-   de faciliter les échanges de bonnes pratiques, une évaluation plus systématique des politiques et une meilleure quantification du travail non déclaré dans le cadre du nouveau programme PROGRESS de l'UE. Le programme PROGRESS, dont les mesures pour l’emploi bénéficient d’une enveloppe annuelle d’environ 20 millions d’euros, soutient entre autres des études, l'élaboration d’outils statistiques et l’échange de bonnes pratiques grâce à des activités de mise en réseau et de diffusion de l’information. Il est bien adapté à une action visant à pallier les lacunes actuelles en matière de quantification du travail non déclaré et à une mise en commun de l'expertise des autorités nationales, en association avec les parties prenantes et notamment les partenaires sociaux. Ces questions figureront parmi les priorités du programme en 2008.

 

-   d’étudier l’éventuelle mise en place d’une plateforme européenne de coopération entre les inspections du travail et d’autres instances chargées de la lutte contre la fraude;

-   de tenir compte de la problématique du travail non déclaré dans les principes communs de flexicurité actuellement élaborés; Le problème posé par un marché segmenté du travail, où de vastes catégories de travailleurs sont pris au piège dans des activités non protégées, est aussi de plus en plus reconnu. Le travail non déclaré constitue un cas extrême de segmentation du marché de l’emploi qui va à l’encontre de tous les principes fondamentaux de la flexicurité. La communication sur la flexicurité[1] propose huit principes et quatre parcours classiques, points de départ d’une définition par les États membres de leurs propres politiques en la matière, en fonction de leur situation et de leurs traditions. De telles politiques pourraient aider à transformer le travail non déclaré en emploi régulier, en rendant celui-ci plus attrayant autant pour les travailleurs que pour les employeurs.  Concrètement, la flexicurité conférerait aux travailleurs davantage de droits dans le domaine de l’accès à la formation, des politiques actives du marché du travail et de l'indemnisation du chômage, tout en améliorant les conditions de création d'emplois réguliers par les employeurs, grâce à une réduction des charges administratives et à la possibilité de disposer d’une main-d’' uvre plus qualifiée.

 

-    d’associer activement les représentants des travailleurs et des employeurs dans la lutte contre le travail non déclaré.

 

La commission européenne s’implique donc de plus en plus dans la lutte contre le travail clandestin en Europe en instaurant de nouvelles actions.

 

2) Les politiques répressives

 

Différents types de politiques visant une diminution du travail non déclaré ont été menées avec succès dans les États membres.

Du point de vue financier, le poids de la fiscalité tend à encourager un recours au travail non déclaré, notamment pour les personnes peu rémunérées/qualifiées,  d’autant plus que les travailleurs non déclarés perçoivent souvent en même temps des prestations sociales. Ces dernières années, les États membres ont réduit le poids de la fiscalité sur les bas salaires en introduisant un revenu minimal non imposable ou des salaires minimaux, mais le rythme de ces réductions a été en moyenne assez faible (1,2% en moyenne, par rapport à un taux initial de prélèvement de 40%).

Le travail non déclaré peut être lié à la volonté d’échapper au paiement des taxes indirectes. Par conséquent, certains États membres ont réduit la TVA sur certains services spécifiques à forte intensité de main-d’' uvre. En France, cette mesure a été appliqué dans le secteur de la rénovation et de l’entretien des bâtiments ainsi que pour les services aux personnes, ce qui a abouti à un nombre significatif de créations d'emploi (plus de 40 000).

Certains États membres ont entrepris de simplifier les procédures administratives et d’éliminer ainsi l’un des principaux facteurs encourageant le travail non déclaré. Des chèques services, un moyen simple pour les ménages d’engager des personnes pour la prestation de services dans un cadre régulier, ont été introduits en Belgique, en Autriche et en Espagne. Cette mesure a souvent permis de créer un nombre important d’emplois (40 000 en Belgique), mais elle a aussi nécessité de gros efforts budgétaires, dus à l'importance des aides publiques requises.

De nombreux États membres ont simplifié les procédures d’enregistrement des travailleurs. C’est ce qu’a fait la France dans les années 90 afin d’encourager la régularisation des travailleurs agricoles et des saisonniers.  900 000 travailleurs sont actuellement couverts.

Plusieurs États membres se sont efforcés d'améliorer leurs dispositifs de surveillance et de lutte contre le travail non déclaré. Leur action a souvent pris la forme d’une coopération renforcée à l’échelle nationale entre les autorités fiscales/organismes de sécurité sociale et l’inspection du travail. À cette fin, des structures de coordination interministérielle ont été instaurées en France, en Belgique, en Irlande et en Italie; le Portugal a quant à lui créé les interfaces nécessaires entre les bases de données de ses services d’inspection pour que le travail non déclaré puisse plus facilement être détecté. Les inspections et contrôles y ont gagné en efficacité, et les effets sur l’emploi, bien qu’en grande partie non quantifiés, ont été positifs.

 

-----------------------

[1] Vers des principes communs de flexicurité, COM(2007)359 du 27.6.2007

Liens utiles