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Max Weber

Publié le 03/01/2011

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MAX WEBER

 

J'adopterai la même démarche que pour la présentation de Durkheim de façon à pouvoir mettre en vis à vis les deux auteurs. Par contre je ne développerai pas les 3 parties dans le même ordre parce qu'il faut d'abord présenter la position épistémologique de Weber pour bien comprendre sa démarche méthodologique.

1. la première partie sera consacrée à la posture épistémologique de Max Weber que je définirai comme étant un relativisme tempéré ou, bien tempéré, selon les modulations que l'on veut apporter.

2. Ensuite une seconde partie portera sur l'objet d'étude de la sociologie selon Weber : non pas le fait social mais l'activité sociale selon la traduction actuelle d'Economie et Société ou encore l'action sociale, selon l'expression considérée préférable par beaucoup d'auteurs (R. Aron, ou encore Isambert Jamati dans un article récent de l'Année Sociologique...). Aussi dans le programme avons-nous retenu l'expression “ action sociale ” non pas par erreur mais en toute connaissance de cause.

3. Et enfin, dans un troisième point sera présentée la méthode du sociologue, c'est à dire une démarche qui se veut à la fois compréhensive et qui en ce sens s'oppose à celle de Durkheim, mais aussi explicative, et cela on l'oublie trop souvent.

Voilà pourquoi, on ne peut opposer la sociologie durkheimienne qui serait explicative à la sociologie weberienne qui serait compréhensive, Weber a une démarche beaucoup plus intégrée que cela et il essaie de mêler compréhension de l'action et explication au sens de Durkheim.

 

1. LA POSTURE DE MAX WEBER : UN RELATIVISME TEMPERE.

 

1.1. LA SELECTION DES FAITS 

Pour Weber le but de la science et plus particulièrement de la sociologie n'est pas de reproduire les faits sociaux, ou si vous préférez le réel mais bien d'avantage de le reconstruire. Cela suppose donc que l'on opère une sélection dans le réel pour pouvoir l'expliquer.

Il nous faut donc essayer d'expliquer pourquoi il est nécessaire d'opérer cette sélection, d'une part et comment faire d'autre part.

1.1.1. Pourquoi faut-il opérer une sélection dans le réel ?

Selon Weber reprenant la thèse de Rickert, le réel est inépuisable, infini, indéfini, complexe, chaotique.

On trouve donc à la fois cette notion d'infini mais aussi de chaos ce qui veut dire que premièrement il est vain de vouloir reproduire le réel. S'il est infini alors que nos concepts eux sont finis, on ne voit pas comment on pourrait reproduire de l'infini avec du fini. Mais en plus ce ne serait pas intéressant car comme le réel est chaotique, reproduire le réel serait reproduire le chaos c'est à dire élaborer des propositions qui ne sont pas significatives, qui ne font pas sens.

Etudier le réel cela veut dire au contraire l'organiser, le clarifier, mettre de l'ordre, faire une sélection dans la multitude des faits.

Weber développe longuement la thèse selon laquelle le réel est infini sur deux plans :

· il est infini extensivement au sens où l'homme étant capable d'innovations, pas seulement d'innovations techniques mais aussi d'innovations sociales, il ajoute toujours quelque chose au réel que nous ne pouvons pas prévoir. L'histoire est donc ouverte. En conséquence la sociologie ne peut-être une science prédictive, car il y a cette capacité de l'homme à inventer des choses nouvelles qui ne pouvaient pas entrer dans les prévisions des chercheurs.

· il est infini intensivement car la manière même de vivre à chaque époque dans chaque société est différente. On vit plus ou moins intensément tel ou tel aspect de la vie sociale, on met tel aspect au premier plan à telle époque dans telle société, tel autre aspect à telle autre époque dans telle autre société.

Concrètement dans les sociétés traditionnelles la religion était mise au premier plan de la vie sociale, alors qu'au contraire dans nos sociétés modernes c'est l'économique qui est mis au premier plan etc...On ne vit pas la vie sociale de manière uniforme mais selon les époques, selon les sociétés, on met en avant telle ou telle sphère du social.

=> reproduire le social signifierait alors qu'il faudrait reproduire la manière dont il a été pensé à chacune des époques et dans chacune des sociétés ce qui est une tâche impossible.

Voilà pourquoi il faut opérer une sélection des faits.

1.1.2. Comment opérer cette sélection des faits ?

Nous n'avons pas de critère objectif pour le faire et nous touchons là au relativisme de Weber ; à savoir que dans toute étude scientifique il y a au départ ce qu'il appelle un moment subjectif, moment où un le chercheur doit poser un certain nombre de présupposés qui sont indémontrables, qui sont même infalsifiables si on reprenait la terminologie de Popper aujourd'hui. Donc les conclusions que l'on retire d'une recherche ne valent que dans la mesure où valent les hypothèses de départ de la recherche. C'est une perspective qu'adoptent volontiers les économistes dans le travail de modélisation.

En fonction de quoi va se faire cette sélection puisqu'elle est subjective ? Pour Weber elle se fera en fonction de ce qu'il appelle, après Rickert, le rapport aux valeurs .

On va sélectionner dans le réel les éléments qui nous paraissent significatifs en fonction de notre rapport aux valeurs.

En fait il y a une double sélection en quelque sorte :

· il y a une sélection en fonction des valeurs des individus qu'on étudie. Il est vrai que ce qui intéresse les individus aujourd'hui dans le social, ce n'est peut-être pas la même chose que ce qui les intéressait au 19ème. On va déjà tenir compte du rapport aux valeurs des individus dont l'objet est étudié, ce qui faisait sens pour eux à leur époque.

· mais surtout il y a un deuxième sas de sélection c'est le rapport aux valeurs du chercheur lui-même, bien entendu. Donc en fonction de ses propres aux valeurs il va accorder de l'importance à tel ou tel événement plutôt qu'à tel ou tel autre.

Or si on ajoute à cela que Weber pose comme postulat si on peut dire, et cela dans la lignée des travaux de Nietzsche que les valeurs sont irréductiblement antagonistes, ce qu'il appelle encore le polythéisme de valeurs :les valeurs sont comme les dieux de l'Olympe, elles se combattent en permanence, elles sont irréductiblement opposées ; il peut y avoir des compromis entre elles, mais jamais de réconciliation, jamais d'unification des valeurs .

Si on pose donc comme fondamental cet antagonisme des valeurs cela va se traduire au niveau de la sélection des fait par l'antagonisme fondamental des hypothèses qui seront choisies par chaque scientifique. D'où le fait qu'on pourra mettre en œuvre des recherches partant d'hypothèses tout à fait irréconciliables éventuellement.

Weber se demande par exemple si un anarchiste ferait un bon chercheur en droit. A priori cela paraît étonnant. Or Weber répond qu'un anarchiste pourrait faire un excellent chercheur juridique parce que justement son rapport aux valeurs est tel qu'il serait amené à questionner les règles de droit de telle manière que les autres chercheurs plus traditionalistes ne l'on jamais fait et donc il sera à même de faire apparaître sur la règle de droit, son élaboration, son fonctionnement ses effets etc, des choses que l'on avait pas découvertes jusque là.

Par contre ce qu'il ne faut pas confondre, et cela est malheureusement courant , c'est le rapport aux valeurs qui est éminemment subjectif - autant de rapports aux valeurs, autant de sélections de faits, autant de systèmes d'hypothèses - et ce que Weber appelle la neutralité axiologique, (axiologique c'est l'adjectif pour désigner les valeurs), c'est à dire la neutralité par rapport aux valeurs ; ce n'est pas la même chose.

Il pose à la fois l'existence d'un rapport aux valeurs subjectif mais aussi d'une neutralité des valeurs, donc neutralité axiologique, à respecter par le chercheur. Il veut dire par là que le scientifique ne peut pas tirer de ses recherches des conclusions qui vont au delà de ce que la science peut démontrer. En d'autres termes, le scientifique doit bien préciser premièrement que ces résultats ne sont vrais que dans le cadre du système d'hypothèses de départ, c'est à dire relativiser les résultats de ses recherches et ne pas porter de jugement évaluatif sur ce qu'il observe. Deuxièmement, il doit s'interdire d'intervenir dans des domaines qui ne sont pas proprement scientifiques. Enfin et surtout, ne pas justifier des choix de morale ou des visions du monde à partir des résultats de la science.

Comme dit encore Weber la science est elle-même une valeur parce que croire en la science, c'est croire en la vérité; mais la science ne peut pas être productrice d'idéaux, elle ne peut pas nous donner des règles de conduite ou un sens à notre vie.

Et c'est là une grande différence avec Durkheim qui pensait malgré tout, même si certaines formules sont ambiguës, qu'en construisant une science du social on pourrait construire une morale sur des bases scientifiques et mener des politiques plus adaptées aux besoins des temps présents, c'est à dire des temps où il vivait.

Pour Weber il y a une coupure absolue et la neutralité axiologique - j'y reviens parce que c'est important pour nous comme professeurs, cela consiste d'une part à dire aux étudiants, ou aux élèves, quel est le système d'hypothèses sous-jacent à la construction qu'on a faite, donc donner les règles du jeu sous-jacentes à votre recherche par exemple et ne pas prétendre être neutre. La neutralité axiologique ce n'est donc pas laisser parler les faits ou choisir la voie moyenne, mais bien justement être conscient du rapport aux valeurs subjectifs qui sous-tend chaque recherche et en limite le domaine de validité et surtout expliciter ses limites.

Et vous savez que là dessus il a eu un grand débat avec ses collègues de l'école historique allemande au sein de l'Association pour la science et la politique sociales. Un certain nombre d'universitaires allemands considéraient que c'était artificiel de vouloir couper les résultats de la science des prescriptions de morale et de politique et considéraient que le débat politique devait entrer à l'Université.

1.1.3. Dernier point ce propos, s'il y a plusieurs rapports aux valeurs, s'il y a plusieurs hypothèses possibles, donc plusieurs constructions conceptuelles, comment les évaluer ?

Est-ce que tout se vaut ? Weber n'est qu'un relativiste tempéré car il ne considère pas que tout se vaut. A la manière d'un Feyerabend aujourd'hui, par exemple. Comment apprécier la sélection des faits réalisée par les différents chercheurs ?

En fonction de leur caractère heuristique, en fonction de leur fécondité, en fonction de leur capacité à déconcerter l'opinion de sens commun, à nous faire découvrir des choses qui étaient inaperçues jusque là.

Mais bien entendu la science est pour lui une entreprise infinie. Car une nouvelle sélection de faits va nous faire découvrir un autre aspect du réel et nous amener à poser d'autres questions et ainsi de suite. Il n'y a jamais de fin à la quête scientifique dans cette perspective là..

1.2. LES CONSEQUENCES DE CETTE APPROCHE DANS LE DOMAINE DE LA CONSTRUCTION DES CONCEPTS

Il s'agit du problème de la construction de l'idéal type chez Weber.

Ce n'est pas du tout la même démarche que celle de Durkheim. Chez Weber le fait social ne se construit pas par généralisation, par abstraction en fonction de l'ensemble des phénomènes observés. Le concept se construit à partir de l'idée que le chercheur en a. On retrouve la sélection des faits et c'est pour cela que l'on peut dire que Weber est nominaliste parce que c'est le chercheur qui choisira de définir tel phénomène de telle manière.

Ainsi dans l'Ethique Protestante il ne prétend pas du tout étudier la genèse du capitalisme ou de l'esprit du capitalisme mais bien plutôt de l'esprit d'un certain capitalisme, le capitalisme moderne tel qu'il apparaît au 17° siècle. qui n'est ni le capitalisme \" traditionnel \" ni le capitalisme \" spéculatif \" qui a pu exister antérieurement.

1.2.1 Ceci étant dit donc comment construire l'idéaltype ?

Il définit l'idéal type -dans les Essais sur la Science où on trouve les éléments les plus intéressants là dessus - comme un tableau de pensée homogène. Je pars de là parce que la métaphore me paraît intéressante pour essayer de comprendre les choses et après on ira au-delà.

Tableau de pensée homogène cela veut dire un tableau, ce qui signifie que ce n'est pas la reproduction du réel, mais un tableau au sens d'une oeuvre artistique. Cela signifie qu'on a sélectionné des faits dans le réel et comme dans un tableau il y a des éléments qui sont en avant plan, d'autres éléments qui sont en arrière plan, d'autres éléments qui ont été négligés, certains qui ont été grossis, d'autres que l'on voit à peine, etc.. Tout dépend de l'angle de vision, tout dépend du point de vue qu'on prend sur les faits, c'est cela la sélection. C'est un premier point.

Mais en plus l'adjectif homogène veut dire qu'on a essayé de gommer toutes les contradictions possibles pour faire apparaître en quelque sorte l'objet de manière cohérente, harmonieuse, sans contradiction. On présente l'objet dans son homogénéité la plus grande. Le concept weberien qui se veut univoque est donc très éloigné des concepts construits par Marx qui rendent compte de la contradiction inhérente au réel.

1.2.2. Concrètement comment fait-on ?

Construire un idéaltype, cela consiste premièrement à enchaîner des phénomènes que l'on rencontre de manière diffuse en quelque sorte. Ainsi, on ne va jamais rencontrer la bureaucratie telle qu'il la formule, ou le capitalisme tel qu'il le formule, mais il va constituer le concept à partir d'un certain nombre de traits qu'il a prélevé sur différentes entreprises capitalistes ou sur différentes formes de bureaucratie qu'il a pu observer. Cela consiste ensuite à mettre de la cohérence, de la logique dans l'ensemble des traits relevés quitte à atténuer voire à gommer certains et au contraire à mettre en avant d'autres. Le concept est une production idéalisée seulement au sens logique du terme.

Par contre idéal type ne veut pas dire que cela correspond à un idéal en termes de valeurs. Une formule de Weber peut permettre aux élèves de comprendre cela même si elle est assez brutale : \" il y a des types idéaux de religion comme il y a des types idéaux de bordels \" écrit Weber dans les Essais sur la théorie de la science.

Intervention : Freund cite Arpagon.

Réponse : exact, c'est une bonne manière d'illustrer ce que Weber entend par idéaltype. Mais, on pourrait aller plus loin. Actuellement se pose le problème suivant en sociologie, en tous cas en ethnométhodologie : est-ce que les concepts weberiens en terme de l'idéaltype sont construits vraiment différemment de ceux du sens commun ?

On inverse ainsi le problème qu'on se posait à propos de Durkheim, on allait des concepts du sens commun , vers les concepts scientifiques à la suite d'une rupture, là on se dit : est-ce que la construction scientifiques de l'idéal type à partir d'un certain nombre d'a priori , ce n'est pas tout simplement la manière dont nous construisons nos concepts de sens commun dans la vie quotidienne : à savoir que pour percevoir autrui de manière générale, , nous sommes obligés de construire des catégories, nous sommes obligés de typifier les autres, de les stéréotyper autrement on ne pourrait pas reconnaître un ordre, des constantes dans la société.

Par exemple si vous avez des attentes, si vous êtes capables d'agir de telle ou telle manière quand un inspecteur vient dans vos classes, c'est bien parce que, même si ce n'est pas conscient, vous avez construit un idéaltype de ce qu'est un inspecteur qui attend un certain type de leçon etc...qui est certainement caricatural mais pas plus que les concepts weberiens, c'est à dire que vous avez regroupé sous la catégorie \" inspecteur \" des éléments que vous avez prélevés à partir de l'attitude de plusieurs inspecteurs et qui n'appartiennent à aucun d'entre eux, pris séparément. Vous aller de même les accentuer jusqu'à les caricaturer et cela va constituer d'une certaine manière un idéaltype possible de ce qu'est un inspecteur !

Les élèves font également des types idéaux du professeur. Et puis dans tous les rapports, l'homme par rapport à la femme, l'ouvrier par rapport au cadre, etc...Il y toute une série de travaux en sociologie qui visent ainsi à montrer que nous constituons des catégorisations, donc d'une certaine manière des types idéaux, en permanence, sans nous en rendre compte.

1.2.3 Comment Weber procède-t-il dans L'Ethique protestante ?

Il construit deux types idéaux : l'idéal type du capitaliste moderne, l'idéal type du protestant, calviniste, et il montre qu'il y a une analogie en quelque sorte entre leurs systèmes de valeurs en schématisant. Mais ce qui est intéressant ici est de voir comment il construit pratiquement l'idéal type du capitaliste, et là on retrouve d'un certain point de vue des préoccupations qui étaient aussi celles de Durkheim. Il en fait un signalement provisoire, on retrouve la définition provisoire de Durkheim, simplement elle n'est pas construite de la même manière

Il procède de la manière suivante : il prend un texte de Benjamin Franklin, “ souviens-toi que le temps c'est de l'argent etc... ” et il fait de ce texte justement un texte représentatif de l'esprit capitaliste moderne poussé jusqu'à ses sa rationalité la plus forte.

Weber utilise seulement un document écrit, pas plus, il ne regarde pas tous les phénomènes qu'on peut appeler capitalistes, quels sont leurs points communs, mais il choisit un texte qui lui paraît représentatif quasiment à l'excès de ce qu'est le système de valeurs du capitaliste moderne. Enfin, interviennent deux autres éléments: par contraste, il oppose l'esprit du capitaliste moderne, au \" capitaliste spéculatif \" susceptible de gagner de l'argent facile et à court terme, et d'autre part au \" capitaliste traditionnel \", qui produisait pour un marché local, avait de bonne relations avec ses concurrents etc (passages à utiliser avec les élèves...).

1.2.4. Débat :

Question inaudible de l'auditoire sur Marx par rapport à Weber.

Partie de la réponse :

* Premier point : On a affaire à des modèles dans les deux cas et à des modes de raisonnement plus proches du raisonnement hypothético-déductif que du mode de raisonnement inductif de Durkheim.

Il y a une différence essentielle par contre c'est que Weber est relativiste alors que Marx l'est beaucoup moins, il l'est peut-être malgré lui mais il ne met pas le relativisme au centre de son système.

C'est Weber qui dit : ce que nous avons démontré ne vaut que par rapport à la définition que nous avons donnée du capitalisme, du choix que nous avons fait et une autre sélection de faits aurait permis de faire apparaître d'autres déterminismes, notamment le déterminisme de l'économie sur la religion comme a pu la montrer Marx.

Ce qu'il reproche à Marx ,c'est d'utiliser des concepts qui seraient heuristiques comme l'idéal type mais qui sont réifiés par lui, comme si la réalité se déroulait vraiment comme le concept ou la théorie le décrit. Pour Weber, Marx confond, pour utiliser une conceptualisation bourdieusienne, la logique du modèle avec la logique du réel ; et cela Weber ne le fait pas.

* Deuxième point : Maintenant sur Marx, il y a plusieurs lectures.

On a présenté Marx comme holiste au sens ou il a étudié ce qu'on appelle encore en termes \" Maussien \" le fait social total, la société dans son ensemble, refusant de la découper entre sociologie, économie, psychologie, philosophie. il analyse la société globale. On l'a considéré comme holiste aussi dans la mesure où il mettait l'accent sur un certain nombre de déterminismes par exemple technologiques dans certains textes, dans d'autres au contraire il met l'accent sur l'autonomie de la superstructure etc... Mais il y a tout un courant contemporain qui se développe de plus en plus chez les économistes et chez certains sociologues pour faire de Marx le premier théoricien de l'individualisme méthodologique.

Je pense à R. Boudon et encore plus à celui auquel Boudon a emprunté, John Elster, qui a fait sa thèse sur une interprétation analytique de Marx, publiée d'ailleurs dans la collection de Boudon au PUF. Il essaie de retravailler Marx en distinguant l'aspect métaphysique de Marx, les scories en quelque sorte idéologiques de Marx, et l'aspect scientifique de Marx qu'il essaie de retraduire en terme de dilemme du prisonnier et de stratégie des jeux. Quelqu'un comme Elster et d'autres anglo-saxons considèrent Marx comme un penseur important parce qu'ils en font le père de l'individualisme méthodologique.

M. Olson dans Les Stratégies de l'Action Collective montre aussi finalement que Marx a très bien compris qu'il ne suffisait pas d'avoir des intérêts communs pour que cela débouche sur une mobilisation. On relit le passage de la classe en soi à la classe pour soi en terme de dépassement de l'obstacle du \" cavalier libre . Je pense qu'au moment où Marx est un peu répudié par les marxistes, il renaît par les marxiens, sans jeu de mots, c'est-à-dire ceux qui le considèrent comme un penseur important parmi d'autres (comme on est weberien, durkheimien etc..) sans pour autant adhérer à la théorie marxiste au sens politique du terme.

1.2.5. En conclusion sur cette partie : Pourquoi cet attachement de Weber à la construction de définition idéal typique ?

Je pense que sa préoccupation est la même que Durkheim. Il construit différemment les concepts mais il considère que la sociologie doit avoir des concepts univoques, et donc qu'il faut définir rigoureusement les objets d'étude.

Mais il considère en même temps que toute construction conceptuelle dépend d'hypothèses a priori et qu'en conséquence pour qu'il puisse y avoir un contrôle de la part de la communauté scientifique et donc un savoir cumulatif, il faut expliciter ses hypothèses de départ. Cela va permettre ce que nous appellerions aujourd'hui dans un langage plus moderne un contrôle externe et interne des proposition scientifiques.

Contrôle interne, c'est celui de la cohérence des raisonnements d'une part, mais c'est celui également de l'adéquation entre les conclusions de la recherche et la réalité empirique.

En d'autres termes il s'agit de construire ce qu'on appelle des modèles, (un modèle peut être non mathématisé) et ensuite de mesurer leur adéquation par rapport à la réalité en termes d'écarts. Le modèle s'écarte plus ou moins du réel, rend compte plus ou moins du réel

c'est là le contrôle interne de la théorie ; tout chercheur peut reprendre les recherches d'un de ses collègues en disant voilà je pars des mêmes hypothèses que vous, on va voir si on aboutit aux mêmes conclusions, si on rend bien compte de tous les faits, s'il n'y a pas des faits qui contredisent vos conclusions etc ...

Mais à côté de cela, c'est ce qu'il ajoute par rapport à Durkheim, c'est la notion de contrôle externe. C'est à dire qu'on pourra également à partir du moment où le chercheur explicite ses hypothèses de départ, contester ces hypothèses de départ au nom d'un autre rapport aux valeurs et dire je suis d'accord avec les conclusions auxquelles vous arrivez compte tenu de vos hypothèses de départ, mais partant, moi, d'autres hypothèses, j'arrive à des conclusions différentes.

C'est en ce sens qu'on peut affirmer que Weber est relativiste : il pense que la recherche scientifique n'aura jamais de fin et qu'on pourra toujours construire des hypothèses nouvelles.

 

2. L'OBJET DE LA SOCIOLOGIE CHEZ WEBER , L'ACTION SOCIALE

 

 

N.B. La dactylographie a été faite à partir d'un enregistrement

de fortune et le style n'a pas été modifié, il s'agit donc là du style parlé.

 

2.1 Qu'est-ce que l'action chez Weber?

2.2 Qu'est-ce qu'une action sociale ?

2.3 Les déterminants de l'action sociale

2.4 Une typologie des relations sociales

 

Introduction de la partie : L'objet de la sociologie : L'action sociale (ou l'activité sociale pour ceux qui préfèrent la traduction des Editions Plon.)

Pour Weber, la sociologie n'a pas pour but d'étudier des faits sociaux mais d'analyser des comportements individuels et c'est en ce sens qu'on peut considérer Weber comme l'un des fondateurs de l'individualisme méthodologique.

Ainsi dans la lettre à Robert Liefmann écrite peu avant sa mort en 1920, que vous avez dans le fascicule d'enseignement de spécialité ; il écrit :

 Si je suis devenu sociologue (comme l'indique mon arrêté de nomination), c'est essentiellement afin de mettre un point final à ces exercices à base de concept collectif dont le spectre rôde toujours. (là vous voyez, c'est l'opposition à Durkheim). En d'autres termes, la sociologie, elle aussi, ne peut procéder que des actions d'un, de quelques, ou de nombreux individus séparés. C'est pourquoi elle se doit d'adopter des méthodes strictement “ individualistes ”.

 

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