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odyssèe d'homère , les tempetes

Publié le 27/02/2008

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Parmi tous le récits de tempête dans l'Odyssée, le point le plus intéressant - rarement remarqué- est que deux d'entre eux se rapportent à la même tempête, celle qu'Ulysse affronte seul entre l'île de Calypso et celle des Phéaciens : le récit du narrateur au chant V et celui du personnage au Chant VII concernent la même "histoire" au sens défini par les narratologues tels Gérard Genette, avec changement de point de vue. Une comparaison détaillée minutieuse montre que le récit du narrateur est non seulement beaucoup plus long et détaillé, mais beaucoup plus "personnel" : il comporte quatre monologues intérieurs d'Ulysse, phénomène exceptionnel d'Ulysse avec cette densité et qui paraît paradoxal dans cette situation, si ce n'était justement le moyen qu'a le narrateur homérique de décrire la tempête intérieure qui agite l'âme du personnage. Ulysse racontant la tempête n'a bien sûr aucun moyen de décrire aux Phéaciens ses états d'âme pendant la tempête, mais c'est une des préoccupations du narrateur extérieur. Au moment où Ulysse aperçoit la terre des Phéaciens intervient une très belle comparaison familiale à forte résonnance affective - d'autant que l'attente va être déçue cette fois-ci, et que le naufragé va être emporté à nouveau par le flot- le retour du naufragé évoquant le retour d'un père malade à la santé, La comparaison entre les deux récits fait paraître un autre détail, qui peut s'expliquer par le dimensions différentes du récit d'ensemble, mais pourrait aussi relever du phénomène de "focalisation" : le narrateur s'attache à donner les durées, aussi bien pour les dix-sept jours de navigation tranquilles que pour les deux jours passés dans la tempête. Le personnage au contraire ne rappelle que les dix-sept jours de vent portant, et ensuite ne donne plus de précision temporelle : tout se passe comme si le temps écoulé dans la tempête n'avait laissé dans sa mémoire que le souvenir d'une longue durée de lutte, avec des moments de découragement d'ailleurs. Cela expliquerait aussi le vers 183 du chant VII, décrivant l'arrivée sur la terre ferme comme un retour à soi et à la conscience. On a pu remarquer que les deux tempêtes les plus importantes pour l'Odyssée sont celles où le héros est seul, soit parce que ses derniers compagnons disparaissent précisément dans cette tempête, avant l'arrivée chez Calypso, soit parce qu'il a fait seul le voyage, entre Ogygie et Schérie. Dans les deux cas, et dans les trois récits auxquels donnent lieu ces deux tempêtes, le héros se retrouve à cheval sur un bois de navire. La tempête est un épisode-clef de l'Odyssée parce qu'elle constitue une épreuve de l'identité et de la personnalité. Elle permet la manifestation de la capacité du héros à affronter non seulement les dangers extérieurs et les monstres les plus étranges, Cyclopes et Sirènes, mais ceux de la solitude et de la nature. C'est l'épreuve du retour à soi, qui fait défaillir, tout nu, sur un rivage, l'épreuve aussi du "Nouveau Monde" montrant que d'Ulysse à Sindbad ou à Crusoé, l'aventure maritime suit les mêmes chemins. S'il s'agit bien d'une épreuve de l'identité, cela pourrait expliquer deux des petites énigmes que pose le texte de l'Odyssée : comme cela a été dit ci-dessus, le récit autobiographique de la tempête à la suite de laquelle il a abordé, seul, nu et sale, dans le lit du fleuve de Scérie, est fait en réponse à la question d'identité posée par la reine des Phéaciens, Arété, provoquant un effet d'inadéquation entre question et réponse dans le dialogue. L'explication généralement donnée du phénomène est la manie du travestissement du personnage, justification qu'il n'est pas question de contredire. Mais on pourrait peut-être lui en superposer une autre : psychologiquement il se pourrait que pour le personnage d'Ulysse, la tempête ait été une telle épreuve qu'elle l'a laissé avec la seule conscience d'exister, d'être "soi" ou de pouvoir dire "je", et avec la nécessité de raconter la tempête, d'en faire un récit qui la mette à distance. Le second problème est un vers de ce récit, le vers 283, avec une forme verbale qui a parfois surpris les critiques et qui me semble au contraire cohérente avec cette interprétation : les ves 280- 283 L'analyse du rôle de la tempête dans l'épopée homérique suscite deux types de conclusions : d'abord sur la modernité du récit odysséen, sur la relation intime entre tempête et polyphonie narrative peut-être ; ensuite sur la relation entre l'épisode de tempête dans le récit et la psychologie : en utilisant le célèbre passage de l'Odyssée dans lequel Ulysse, en proie à un débat intérieur, s'adresse à lui-même ce bel encouragement, "Patience, mon coeur" Jacqueline de Romilly concluait néanmoins s'appuyant sur les analyses du célèbre philologue Bruno Snell sur le caractère un peu sommaire de la psychologie homérique : "la célébrité de ce petit débat intérieur montre assez combien l'épopée était peu portée à décrire la vie psychologique et combien ses plus grandes réussites etaient, en ce domaine, modestes." Il me semble que les récits de tempête montrent la subtilité de la psychologie de l'Odyssée : le narrateur du chant V suit les réactions du personnage avec attention dans ses monologues et dans les images qu'il en donne, et celui du chant VII prête à Ulysse, avec une grande pudeur qui s'explique par sa position d'hôte et de suppliant, un récit de l'épreuve subie dont on connaît des échos littéraires - par exemple dans le roman d'Achille Tatius où il s'agit probablement selon mon interprétation d'une parodie- mais non d'équivalent. Ulysse est resté célébre pour son voyage maritime,de retour de Troie à Ithaque,contrarié par la colére de Poséidon. L'espace de la mer,la « saumure »,le « gouffre » est caractérisé par ses tempêtes. Or ce motif est devenur,au fil des siécles,un véritable topos littéraire. Quel usage en fait Homére?

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