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Petit abécédaire pascalien

Publié le 11/09/2006

Extrait du document

Que vous suggèrent ces notions quand on les applique aux Pensées de Pascal ?

Voici quelques éléments de réponses…(f=fragment numéroté)

A comme Altruisme : Disposition à se dévouer à autrui. Les convictions chrétiennes de Pascal l’amènent à encourager l’altruisme au nom de la charité chrétienne. Le soin qu’il apporte à respecter un adversaire dont il combat les idées (le libertin) et la fameuse « pensée de derrière « (voir cette notion) qui solidarise en quelque sorte le chrétien parfait avec le peuple font de Pascal un penseur altruiste. Amour propre : Pour Pascal, « le moi est haïssable «, c’est ce qui justifie sa distance à l’égard de Montaigne qui avait donné à l’expression de ses idées philosophiques une forme autobiographique. Toutefois, Pascal reconnait qu’il est nécessaire de bien se connaitre soi-même pour régler sa vie et ses actions ; mais il s’en prend principalement à l’amour propre lorsque celui-ci est inculqué aux enfants pendant leur éducation. (« …l’admiration gâte tout dès l’enfance « f 59/60) Ange : part d’animalité subsiste en l’homme qui, comme les autres êtres vivants, est soumis à la maladie et à la mort. C’est quand il cède à ses plus bas instincts que l’homme est semblable aux bêtes : les animaux sont même capables de l’effrayer (phobie des chats, des rats etc…) voire de l’impressionner au point d’en faire des divinités comme dans le paganisme. (« Se soumettre aux bêtes jusqu’à les adorer « f49) Comme les bêtes, il choisit la force contre la justice (loi de la jungle), il cède à la concupiscence des sens, délimite son territoire ou cherche à l’étendre en employant la violence et se divertit à la manière d’un chien qui recherche inlassablement le gibier. Mais ce tableau ne suffit pas à caractériser l’homme dans sa totalité, car il y a aussi une part d’« ange « en lui (voir ce mot). Anthropocentrisme : Conception qui consiste à mettre l’homme au centre du monde et qui conduit à penser que celui-ci est supérieur aux autres créatures vivantes. L’anthropocentrisme peut dériver en ethnocentrisme lorsqu’à cette époque, on tend à faire de la culture européenne chrétienne la seule culture de référence possible. À l’inverse, l’anthropocentrisme peut aussi déboucher sur un « humanisme « sous la forme d’une défense des « droits de l’Homme «, mais parfois au détriment des autres créatures vivantes. À l’instar de Descartes, Pascal défend une conception anthropocentrique en affirmant la supériorité de l’homme sur le vivant (voir Roseau pensant), mais son tableau pessimiste de la condition humaine n’en fait pas pour autant un humaniste convaincant. Il s’agirait alors plutôt de « théocentrisme «, puisque pour Pascal, seul Dieu est au centre du monde. À l’inverse, Montaigne apparait comme un des premiers penseurs qui prend ses distances avec l’anthropocentrisme dominant : en affirmant que l’homme n’est pas supérieur à l’animal (Apologie de Raimond Sebond) et en prenant la défense des Indiens d’Amérique pendant les années de conquête (chapitre « Des Coches « des Essais) Anthropologie : Science de l’homme, de l’humanité et de la nature humaine qui débouchera au XXème s. sur l’ethnologie. Les thèmes abordés par Pascal dans sa réflexion sur la condition humaine (vanité, misère, grandeur, divertissement…) constituent les prémisses d’une anthropologie et rappellent que Pascal, avant d’être croyant, est aussi un scientifique intervenant dans des domaines aussi variés que les sciences exactes et les sciences humaines. Cette multiplicité d’approches est comparable à la quête des Humanistes et Érudits de la Renaissance (siècle précédent). Pascal place d’ailleurs l’étude des mœurs au dessus des sciences exactes : f 21 «la science des mœurs me consolera toujours de l’ignorance des sciences extérieures. « Antithèses : Figure de style qui consiste dans une même séquence à opposer deux notions contraires. Les deux parties de L’Apologie de la religion chrétienne envisagée par Pascal procèdent par antithèse (Misère/Grandeur) et l’on retrouve ces deux mots clé en tête des liasses II et VI. L’antithèse permet à Pascal de prouver que l’Homme est d’une nature inconstante voire contradictoire et qu’il ne faut jamais le définir de manière univoque par une idée sans envisager l’idée contraire. On peut en déduire une morale du « juste milieu « comme dans le fragment suivant : f 53 : « Il n’est pas bon d’être libre / Il n’est pas bon d’avoir toutes les nécessités (=subir toutes les contraintes) « Apologie : syn. d’éloge, de plaidoyer. Pascal s’engage au milieu du XVIIème siècle dans une Apologie de la religion chrétienne, projet que la mort prématurée de l’auteur interrompra. Le plan en était très rigoureux et il ne reste de cet immense travail que des ébauches, parfois entièrement rédigées ou laissées à l’état de brouillons et d’aphorismes que les spécialistes ont regroupés sous le titre de Pensées. Une apologie est une réaction de défense ; elle suppose donc le déclin de la doctrine chrétienne à laquelle Pascal est attaché ; il prend ainsi le parti redoutable de défier rationalistes, sceptiques et libertins. Athéisme : Négation radicale de l’existence de Dieu. Au XVIIème s., la petite minorité d’athées se nomme « libertins « (voir ce mot) et si Pascal se situe aux antipodes de cette conception, il fait de l’athée un interlocuteur privilégié qu’il espère bien convaincre. Le fait que l’athée ne mette même pas en doute l’existence de Dieu (sinon il ne serait pas athée mais agnostique) est une certitude trompeuse (f 71). En dressant un tableau de la misère humaine, Pascal cherche à ébranler la conviction de ceux (athées, libertins) qui n’ont que la destinée humaine comme seul espoir. Que reste-t-il à l’incroyant si l’homme et la vie terrestre n’ont rien d’admirable ? Il y a une part d’ange en l’homme qui vient compenser sa part d’animalité. Par sa grandeur qui tient dans sa pensée, l’homme prend conscience de sa misère et ressent par un instinct secret (voir ce mot) les avantages de sa première nature, avant sa déchéance. Toutefois, l’orgueil l’amène à se croire égal aux anges et ironiquement Pascal écrit : « Le malheur veut que qui veut faire l’ange, fait la bête « (f 572). À l’inverse, celui qui s’humilie mérite qu’on le grandisse. « S’il se vante, je l’abaisse ; s’il s’abaisse, je le vante… « (f 121) Animal : Avec Descartes mais contre Montaigne (Apologie de Raimond Sebond), Pascal défend une conception anthropocentrique : l’homme est supérieur à l’animal (comme aux plantes) car il a le privilège de la pensée. Toutefois, la B comme Bonheur : L’homme désire le bonheur, c’est une certitude. Mais selon les individus, cette quête recouvre des idéaux parfois totalement opposés : bonheur dans la vertu pour les uns, dans la volupté pour les autres… L’homme ne peut donc atteindre le souverain bien (voir cette notion) et il échoue dans sa quête d’un bonheur parfait qui serait le même pour tous. Les échecs dans la vie sont d’ailleurs plus fréquents que les réussites ; aussi, il ne reste plus à l’homme qu’à se consoler par des bonheurs factices et éphémères qu’il trouve dans des situations qui prouvent sa vanité ; et surtout, ce semblant de bonheur, l’homme le recherche dans le divertissement. Refusant la tranquillité, il en est réduit à se complaire dans les tracas. Installé par Dieu dans la déchéance, l’homme n’est toutefois pas responsable du sort auquel il est destiné et pourtant, cette idée de bonheur lui vient de cet « instinct secret « qui lui rappelle sa première condition, celle du paradis terrestre. La seule issue : s’en remettre à Dieu qui l’a destitué de sa première nature. Brouette : absolue. Il reste cependant attaché à ce que l’ordre social et politique ne soit pas bouleversé. (Voir : Despotisme, Révolte, Peuple…) Casuiste : Directeur de conscience qui veille dans chaque famille aisée à ce que la morale religieuse soit bien respectée. Pour corriger le laxisme dont on accuse l’église catholique au début du XVIIème siècle (les jésuites qui assurent l’éducation tendent à minimiser les fautes…), on assiste à un durcissement des principes et les premiers écrits à caractère théologique de Pascal vont dans ce sens. Casuiste était un métier et si l’on ne voulait pas perdre son emploi, on avait tendance à tolérer les écarts commis par ceux dont on avait la charge et qui pouvaient aussi vous renvoyer. Charité : Vertu chrétienne dont Pascal fait un de ses trois ordres, l’ordre de la charité qui rapproche l’homme de Dieu. La Charité relève du Cœur et à ce titre, elle est bien supérieure à la Raison. Chasse : christianisme et à propos duquel il montre à quel point il est supérieur à toute attitude rationnelle : « Le Cœur a ses raisons que la Raison ne connait pas. « Climats (théorie des) : En insistant sur les différences de coutumes selon les pays, Pascal montre que la recherche d’une loi unique régissant tous les hommes sur terre est une vue de l’esprit. Cette relativité des coutumes anticipe sur ce qu’au XVIIIème s. on appellera la théorie des climats (conception défendue par Montesquieu et Mme de Staël). Quand on vit dans les brumes du nord, la sensibilité des peuples est bien différente et plus mélancolique que ce qu’on peut rencontrer en milieu méditerranéen. Les variations climatiques confirment l’impossibilité d’établir des lois universelles et justifient le caractère changeant de l’homme dans l’espace. « On ne voit rien de juste ou d’injuste qui ne change de qualité en changeant de climat « (f 56) Cœur : Ce concept est directement employé par Pascal dans le sens que lui donne la Bible, à savoir : les facultés de l’âme au rang desquelles on trouve un mélange d’intelligence, de mémoire et de volonté (le mot cœur dans le langage du XVIIème siècle voulait dire « courage «…) Le Cœur chez Pascal s’oppose à la raison dont il convient de se méfier. L’intuition (qui vient certes du cœur mais est souvent bien utile aux scientifiques…) permet précisément selon Pascal d’entrevoir la vérité et il rattache ces qualités humaines – cœur, intuition, instinct secret – à « l’esprit de finesse « (voir cette notion). « Le Cœur a ses raisons que la Raison ne connait pas « Concupiscence : Terme de la théologie chrétienne désignant le penchant humain à jouir des biens terrestres. Contrairement à la force qui s’impose à l’homme contre son gré, la concupiscence dépend des choix volontaires de chacun et a été installée en nous par Dieu suite à la faute originelle. Pascal distingue trois formes de concupiscence qui, toutes les trois viennent confirmer la vanité et la misère humaine : - La concupiscence des sens qui correspond aux tentations charnelles comme la gourmandise, ou physiques comme la paresse. Ce stade nous rapproche du monde animal. ? Se rassurer : il n’y aura pas de question sur le sujet bien qu’il s’agisse du « prétexte « à une découverte pascalienne. Ceci posé, Pascal n’a pas inventé la brouette, mais il a bien inventé la machine à calculer et mis au point quelques théorèmes fondamentaux. C comme Cabale : Terme qui désigne des groupes de pression organisés ; après les guerres de religion qui ont eu pour conséquence l’éclatement du dogme chrétien unique, ces regroupements prennent prétexte la diffusion de leurs conceptions théologiques. Il existe donc toutes sortes de cabales, qu’il s’agisse de cabales libertines ou de cabales ultra religieuses. C’est une cabale qui a causé l’interdiction du Tartuffe de Molière parce que la pièce dénonçait l’hypocrisie en matière de religion. Les cabales de l’époque sont un peu l’équivalent des lobbies actuels qui ont pour objectif d’influencer le pouvoir politique. Capitaine de vaisseau : Parmi les exemples de divertissements choisis par l’homme, Pascal a une prédilection pour la chasse. Ce n’est pas un hasard car la chasse réunit toutes les conditions du divertissement : un personnel domestique particulièrement important, une attente très longue avant d’entrer en action, un moment de la vie humaine où l’homme ressemble à ses chiens et traque le gibier ; tous les ingrédients sont là pour dévoiler à la fois la futilité et l’efficacité de ce divertissement. Par ailleurs, c’est aussi une manière de révéler au libertin, amateur de jeu et de chasse, le caractère dérisoire de ses préoccupations. Pascal prend l’exemple d’un homme accablé de malheurs et qui oublie en un rien de temps ce qui le préoccupait peu de temps avant. En effet, « il est tout occupé à voir où passera ce sanglier que les chiens poursuivent avec tant d’ardeur depuis six heures. « Une activité comme la chasse révèle que ce n’est pas le but (la prise) qui est visée par les chasseurs mais le fait d’avoir l’attention accaparée par l’attente, autant dire quand il ne se passe rien ! Chrétien parfait : Situé au sommet de la pyramide pascalienne, le Chrétien parfait est celui qui réunit toutes les vertus possibles : connaissance rationnelle, qualités de cœur, foi inébranlable. De plus, grâce à sa « pensée de derrière «, il intègre les qualités du peuple en y ajoutant « la lumière « dont ce dernier est dépourvu. C’est quasiment le statut des Saints de l’évangile. Christianisme : À la suite du philosophe Saint Augustin qui l’a inspiré, Pascal défend une vision chrétienne du monde et attache une importance particulière aux deux périodes définies par la Bible dont la première est définitivement révolue : avant la faute (voir Péché originel) et après la faute. Il est attaché à l’esprit de charité qui est au cœur du Métaphore utilisée par Pascal pour montrer l’absurdité de la filiation quand il s’agit de gouverner un état dans les systèmes monarchiques. Les privilèges de la naissance, surtout lorsqu’ils concernent un très jeune monarque, ne sont pas des critères de compétence. Pascal compare la société à un bateau et déclare « on ne choisit pas pour gouverner un vaisseau celui des passagers qui est de la meilleure maison « (f 28). C’est pourtant ce qui se produit pour un royaume. On pourrait en déduire que Pascal remet en cause par ce trait d’ironie la monarchie - La concupiscence du savoir qui recouvre la curiosité intellectuelle gratuite, le voyage pour le plaisir, le raisonnement purement rationnel. - La Concupiscence de la domination qui fait de l’homme un être se substituant à Dieu pour imposer sa force et dominer autrui. Connais-toi toi-même : Même s’il prend ses distances par rapport à Montaigne à qui il reproche d’avoir trop valorisé son « égo « à travers les Essais, Pascal reconnait la nécessité de se connaitre soi-même ne serait-ce que pour régler sa vie et son comportement (f 68). Il s’adresse aussi par là même au libertin qui se caractérise selon lui par la méconnaissance de soi. Contrariétés : Titre de la Liasse VII qui doit être compris littéralement : existence de contraires en l’homme, à la fois crédule et incrédule, timide et téméraire etc... Contrairement à l’animal, l’homme n’est pas d’une seule nature, il est changeant et c’est en grande partie la diversité des coutumes qui fait de lui un être instable et « contrarié «. Les contraires se retrouvent à tous les niveaux, qu’il s’agisse de l’usage de la raison (il cherche la vérité mais ne trouve que l’incertitude) ou de préoccupations qui font intervenir ses sentiments (il cherche le bonheur mais ne récolte que désillusions…) L’homme est donc un composé égal de grandeur et de misère. Cet entremêlement de contradictions n’est pas loin de faire de l’homme, selon la formule du fragment 121 « un monstre incompréhensible «. Seul le recours à la foi chrétienne permet de trouver une issue acceptable. qui entoure le pouvoir, le monarque continue d’impressionner ses sujets. « Le caractère de la divinité est empreint sur son visage « (f 23). Pourtant, les exemples montrent que les rois ne disposent que d’une légitimité éphémère car ils sont le plus souvent assassinés, contraint à abdiquer ou à s’exiler. Ils pourraient éviter ces risques en s’entourant de conseillers, mais ils préfèrent gouverner seuls et cet exercice solitaire du pouvoir les conduit à la tyrannie (voir ce mot). Dialogue : Les Pensées ne constituent pas un monologue mais un dialogue, le plus souvent implicite, avec différents interlocuteurs. Déjà, dialogue avec les philosophes antiques ou contemporains auxquels Pascal se réfère pour les approuver ou les réfuter : Epictète, Montaigne, Descartes… Dialogue avec les textes sacrés : la Bible… Dialogue avec luimême en particulier au début du fragment sur le divertissement, thèse entièrement originale et qu’il ne doit à personne. Dialogue voire polémique, ce qui suppose des arguments opposés qu’on essaie de confronter et de concilier : c’est bien la démarche de Pascal qui fait dialoguer en l’Homme sa part de grandeur et sa part de misère. Dieu : Réfutant le libertin qui en nie l’existence, Pascal défend la thèse adverse et mise sur la foi en Dieu comme seule solution au final à nos misères. Toutefois, il réserve la référence à Dieu pour la seconde partie de son projet apologétique (« Félicité de l’Homme avec Dieu «) et s’abstient d’y faire trop souvent allusion dans la première partie dont sont issues les liasses au programme. Se limitant à la condition de l’homme sans dieu, Pascal reste ainsi sur le terrain du libertin : même sans faire intervenir la foi, la misère de l’homme est suffisamment probante et devant tant de « preuves «, il ne nous reste qu’à « écouter Dieu, notre maître à tous « (f 122). Discontinuité : La succession des fragments numérotés donne une impression de discontinuité, voire de désordre. Le lecteur se trouve d’autant plus désarçonné que, souvent, les mêmes idées se répètent et qu’il n’y a pas de véritable progression, ce qui est bien entendu une impression trompeuse. Est-ce un choix ou le résultat d’une œuvre inachevée ? La discontinuité des aphorismes permet un temps pour le lecteur qui est celui de la méditation personnelle. C’est un peu comme si on faisait succéder toutes les morales des Fables de La Fontaine sans jamais raconter l’histoire qui précède. C’est un choix de « moraliste « (voir ce mot). Il permet aussi d’attirer l’attention sur le rythme de chaque formule et d’en apprécier la pertinence. Discours faux : Ils résultent de la confusion des « Ordres « (voir cette notion). Ce qui est du domaine de la force est sans rapport possible avec ce qui relève de la beauté. C’est pourquoi, selon Pascal, l’artiste (ordre de la beauté) est difficilement comparable au prince (ordre de la force). Prétendre donc « Je suis beau, donc on doit me craindre « ou « je suis fort donc on doit m’aimer « (allusion à la monarchie absolue) sont des exemples de discours faux et tyrannique. Il suffit de remettre les choses dans le bon ordre et cela donnera « Je suis beau donc on doit m’aimer « (jugement artistique par exemple) ou « je suis fort, donc on doit me craindre (jugement politique). Mais on comprend bien qu’en restituant le bon ordre, on démystifie le pouvoir…qui ne se maintient non parce qu’il est bel et bien mais parce qu’il terrorise ! Divertissement : Dans la philosophie de Pascal, le terme divertissement ne désigne pas seulement les activités de loisir, mais toute activité (même professionnelle) qui détourne l’homme du repos. L’auteur consacre une liasse entière (n° VIII) à ce sujet entièrement original, Pascal ne devant à aucun autre courant de penser cette observation particulière de l’activité et des comportements humains. Le fragment 126 présente un développement organisé et argumenté qui révèle que Pascal tenait beaucoup à ce sujet visant le libertin. Réduit par Dieu à la déchéance, l’homme se révèle incapable de supporter le repos qui pourtant était son état naturel avant le péché originel. Tous les hommes cherchent donc à s’occuper pour ne pas avoir à penser à eux-mêmes et à leur misérable condition. Pascal choisit ses exemples parmi les occupations des rois et des nobles qui sont les plus exposés au malheur et disposent de moyens considérables pour se « divertir « : la gestion des affaires mais aussi la chasse, le jeu etc. Le divertissement peut être tout à fait dérisoire comme suivre une boule de billard ou attendre pendant des heures la venue d’un sanglier qu’on va chasser. Dominer : Le désir de domination relève à la fois du domaine psychologique (un individu cherche à en dominer un autre) que du domaine politique quand des despotes à la tête de nations cherchent à en dominer d’autres. Le désir de domination est donc universel (f 54) et il conduit très vite à la tyrannie, manifestation caractéristique de la misère humaine. Dogmatisme : Attitude qui consiste à affirmer une conception du monde et à l’imposer comme étant la seule vérité possible à l’exclusion de toutes les autres. Le dogmatisme conduit nécessairement à l’intolérance et reste principalement le fait de dogmes (= doctrines) religieux ou politiques dominants. Il conduit fréquemment au fanatisme. Contrairement à l’approche des philosophes des lumières qui, un siècle après Pascal, verront dans la Raison une garantie de liberté d’expression, l’auteur des Pensées estime que la raison nous conduit à avoir des certitudes et encourage à ce titre le dogmatisme. f 122 « La raison confond (=trompe) les dogmatiques […] Humiliez-vous Raison impuissante ! « Doute : Pour Pascal, douter serait pour le libertin un « progrès « de sa pensée car son obstination à vouloir nier Dieu l’égare. Toutefois, Pascal considère que le doute absolu pratiqué en toute circonstance est une manifestation cachée des limites de la raison (je doute, donc je pense, donc je suis… comme l’affirmait Descartes) Il s’en prend alors au scepticisme absolu des Pyrrhoniens : Douter de tout, c’est encore avoir une certitude par la prétention à la vérité. D comme Demi-savant : Au second niveau de la pyramide pascalienne, on trouve le demi-savant, juste au dessus du peuple. Disposant de quelques connaissances, celui-ci croit tout savoir et sa vanité l’amène à mépriser l’ignorance du peuple. Il est dépourvu de toute pensée de derrière. Descartes : philosophe français contemporain de Pascal, auteur du célèbre Discours de la méthode. Le dialogue de Pascal avec Descartes est très présent, au moins implicitement, dans les liasses des Pensées au programme. Pascal se rapproche de Descartes sur la question de l’anthropocentrisme : l’homme est supérieur à l’animal par la pensée et la capacité à raisonner. Il le réfute cependant quand Descartes considère que la Raison seule est infaillible. Pascal lui substitue les qualités qui viennent du « Cœur « (voir ce mot) et nous rapprochent de Dieu. Despotisme : Pascal vit dans le système de la monarchie absolue et s’il ne met pas en cause l’ordre établi par cette hiérarchie, l’exemple des rois est fréquemment employé pour justifier la misère humaine. Pascal s’appuie sur ce paradoxe : plus l’homme a de puissance et de privilèges, plus il se place dans une situation où toute sa vie sera marquée par l’angoisse de sa destitution : ce qu’il met en œuvre pour l’éviter relève de la tyrannie du divertissement. Pour Pascal, le Roi est loin d’être l’équivalent de Dieu comme le laissaient entendre les monarques de l’époque et comme le croyait le peuple superstitieux. Déjà, un chef d’état est obligé de s’imposer par la force (voir cette notion) et à ce titre, il s’entoure de nombreux gardes. La puissance de l’imagination est telle que même sans la présence de ces gardes et de tout le protocole Dualisme : Quand se manifeste dans une donnée d’ensemble deux caractéristiques contraires qui parviennent à coexister. La pensée de Pascal est profondément dualiste mais non manichéenne : en effet, l’homme n’est pas entièrement misérable, il n’est pas non plus exclusivement grand mais il est un composé égal de misère et de grandeur. C’est ce que le philosophe développe dans la liasse « Contrariétés « (voir ce mot) « esprit de géométrie « et qui fait valoir tout ce qui relève de la raison pure (dans la démarche d’un scientifique par exemple) et un autre ordre qui fait intervenir les qualités plus intuitives venant du « Cœur « et qu’il nomme « esprit de finesse «. Dans les deux cas, le résultat final est le plus souvent négatif. Esprit de géométrie : on cherche la vérité mais on trouve l’erreur. Esprit de finesse : on cherche le bonheur mais on trouve la misère et la mort. sont très arbitraires et révèlent l’incapacité de l’homme à se trouver des règles universelles. G comme Gloire : rechercher la gloire et les honneurs, attitude particulièrement caractéristique chez les « grands « de ce monde est une des formes les plus évidente de la vanité et c’est « une sottise de chercher les grandeurs « (f 14) Grâce : La question de la Grâce divine, c'està-dire le salut de l’homme après sa mort, anime les débats entre Jésuites et Jansénistes à l’époque de Pascal et de l’Abbaye de Port Royal (voir ce mot). Pour les Jésuites, majoritaires au sein de l’église catholique en France, l’homme lui-même par son comportement peut se racheter de la faute originelle et gagner la clémence de Dieu. Pour les Jansénistes, courant minoritaire, Dieu décide seul en dernier recours et a tout programmé à l’avance sans qu’on sache qui peut être sauvé ou non. La Grâce peut donc être accordée à un criminel plutôt qu’à un homme de bonne volonté, il n’y a pas d’incidence du comportement des hommes sur les décisions divines. De là une réflexion sur la Providence qui aura de nombreux échos au siècle suivant (voir Voltaire) et irritera fortement le courant libertin qui lui nie toute intervention de Dieu dans le destin des hommes. Grandeur : Titre de la liasse VI qui est en parallèle avec la liasse Misère qui a fait l’objet d’un développement précédent. Malgré sa condition misérable voulue par Dieu, l’homme n’est pas exempt d’une certaine « grandeur « et celle-ci le caractérise tout autant que sa misère. Déjà, l’homme est grand par la pensée (« l’univers m’engloutit […], par la pensée je le comprends « f 104). Il l’est aussi parce qu’il a su s’organiser en société grâce à un comportement qui l’amène à se préoccuper de son rapport avec autrui. La charité chrétienne prouve la grandeur de l’homme. Sa supériorité face aux animaux ou autres créatures vivantes est également indéniable et si un animal a des qualités naturelles (le flair pour un chien), l’homme ne doit rien à l’instinct et fait valoir ses qualités par la raison et d’autres facultés de l’âme (sentiments, mémoire, volonté…). Mais c’est avant tout avec Dieu (et non sans lui) que l’homme peut retrouver une félicité perdue. Grimace : E comme Enfant roi : F comme Félicité : Terme qui peut être compris comme synonyme de bonheur mais avec une connotation plus religieuse. « Félicité de l’Homme avec Dieu « devait constituer le titre de la deuxième grande partie de l’Apologie de la religion chrétienne, œuvre inachevée de Pascal. Force : Dans la réflexion de Pascal, la force (par exemple celle du monarque et de son armée) est à distinguer de l’imagination qui, elle, utilise davantage la ruse (apparence trompeuse). La force est, dans une vision idéale, complémentaire de la justice : le juge établit les lois (domaine spirituel), le policier ou le soldat veillent à leur bonne application (domaine matériel). Mais le plus souvent il n’en est pas ainsi : face à l’impuissance de la justice, la force agit seule et dans ces conditions devient tyrannique. Cette absence de relation réciproque entre force et justice accentue la misère de l’homme. Toutefois, la force a un avantage selon Pascal : elle permet d’éviter les guerres civiles et contribue à ce titre à maintenir les sociétés en paix, même si cette stabilité s’est trouvée par la voie de l’injustice. « La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique « ( f 94) Fragment : Extraits des Pensées numérotés dans l’édition de Michel Le Guern de 11 à 129 et regroupées en 7 Liasses (II Vanité à VIII Divertissement)… Ces fragments se présentent soit sous la forme d’aphorismes, entièrement rédigés ou non, soit sous la forme de développements élaborés dont les trois principaux sont consacrés à « l’imagination « (f 41), le fragment 56 de la laisse « Misère «, le fragment 122 de la liasse « Contrariétés « et le fragment consacré au « divertissement « (f 126). L’ensemble de ces fragments constituent un puzzle inachevé mais organisé : ils devaient constituer la matière d’un traité ayant pour but l’Apologie de la religion chrétienne. Frontière : Reprenant à son compte la réflexion de Montaigne qui s’appuyait sur le regard étranger trouvant choquant que le pouvoir puisse être confié à un enfant sans expérience alors que l’Européen se scandalise des mœurs soit disant « cannibales « des peuples dits « sauvages «, Pascal mène une critique implicite de la transmission du privilège royal par la naissance. « Cannibales se rient d’un enfant roi « (f 93). Il souligne aussi l’injustice qu’il y a à acquérir très tôt dans l’existence des avantages qu’un roturier mettra de nombreuses années à mériter. Pascal remettrait-il en cause les privilèges qui perdureront jusqu’à la révolution française ? Pas vraiment, car il pense par ailleurs que le système transitoire de la Régence est préférable à une « démocratisation « des institutions qui auraient le malheur de favoriser les rivalités pour la conquête du pouvoir et entraineraient d’inévitables guerres civiles. Malgré ses injustices, l’ordre établi doit rester stable, ne serait-ce que pour garantir la paix. Ennui : Privé de « divertissement « (voir ce mot), l’homme s’ennuie car il ne supporte ni le repos, ni la solitude, deux conditions qui l’obligent à prendre conscience de sa misère. L’activité la plus dérisoire suffit alors à le tirer de cet ennui qui lui révèle un « néant « insupportable. Ensemble et détail : Peu de temps après l’apparition de la perspective en peinture (Renaissance), Pascal s’inspire peut-être de cette représentation de l’espace pour mieux souligner l’incapacité humaine à percevoir à la fois l’ensemble d’un paysage et ses détails. Quand on est perdu au beau milieu du paysage, on voit bien quelques détails mais on n’a aucune idée de l’ensemble et quand au contraire on prend du recul et que le panorama nous permet d’appréhender l’ensemble, on ne peut percevoir aucun des détails minuscules qui composent pourtant ce paysage. (f 61) L’homme ne saurait donc être l’égal de Dieu dont la religion chrétienne nous enseigne qu’il voit tout, sait tout et qu’on ne peut rien lui cacher. Esprit de finesse / Esprit de géométrie : Pascal considère qu’il y a deux ordres dans la pensée : celui qu’il définit par la formule « Plaisante justice qu’une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà « (f 56). La phrase est de Pascal mais la réflexion est inspirée de Montaigne qui le premier a montré la relativité des coutumes. Ce qui peut être considéré comme un crime dans un pays, peut-être parfaitement autorisé dans un autre. Si les frontières sont parfois naturelles puisque justifiées par des chaines de montagnes ou des cours d’eau, en revanche les différences de coutumes d’un pays à un autre La métaphore péjorative de la grimace symbolise tout le pouvoir de l’imagination, puissance trompeuse. Faute d’une véritable compétence, les hommes et principalement ceux qui disposent d’un pouvoir (rois, magistrats, gens de cour etc…) utilisent « la grimace « pour séduire ou impressionner ceux qu’ils tiennent en leur dépendance. Il se trouve que les tenues adoptées par certaines élites sociales relèvent d’un costume de grand guignol : « bonnets carrés[…]hermines dont ils s’emmaillotent en chats fourrés… « (f 41) Ces déguisements dignes de comédiens sont à distinguer de la « force « ( voir ce mot) que Pascal rend plus spécifique, mais les deux procédés sont utilisés complémentairement ( notamment par les rois) pour assurer une domination. À noter que Molière fait dire à Don Juan, défenseur de l’hypocrisie, que cette dernière est une « grimace nécessaire « : influence de Pascal ? Guerre : La guerre est absurde, tant au niveau des causes (s’approprier arbitrairement un territoire qui appartient à autrui) que des effets : elle fait d’un homme un assassin légitime… et favorise la tyrannie, l’esprit de domination. Toutefois, la guerre, que Pascal désigne par l’expression « droit de l’épée «, permet au final de maintenir la paix par le principe (faute d’une véritable justice !) de la loi du plus fort. Une guerre peut être justifiée si elle est décidée par un conseil et non par un homme seul. (f 55). On peut constater que seule l’Église garantit la paix : « car il y a une justice véritable et nulle violence. « (f 78) Infinis (les deux) : Pour parachever le tableau de la misère de l’homme, Pascal recourt également à la cosmologie et s’appuie sur son expérience de scientifique. Pris dans l’immensité de l’univers, l’homme est insignifiant et il sera d’autant plus perdu qu’il existe aussi un infini microscopique à l’échelle des atomes. Il existe donc deux infinis : l’infiniment grand qui renvoie à l’univers et l’infiniment petit qui est en nous et que nous ne pouvons concevoir. Le développement sur les deux infinis se trouve au fragment 185 : « Car enfin, qu’est-ce qu’un homme dans la nature ? un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout… « En écrivant le conte Micromégas qui présente un géant qui voyage sans crainte et sans difficultés dans l’espace, Voltaire parodie les idées de Pascal qui, lui, cherche à nous effrayer. Voltaire considère qu’on n’a pas à craindre l’immensité de l’univers. Instinct secret : Formule utilisée par Pascal pour désigner cette intuition que l’homme porte au plus profond de lui et qui lui permet d’entrevoir la félicité de sa première nature, même si parfois cet instinct secret le mène à choisir des bonheurs factices. La notion est abordée dans le fragment consacré au divertissement (f 126) « ils (les hommes) ont un autre instinct secret qui reste de la grandeur de notre première nature, qui leur fait connaitre que le bonheur n’est en effet que dans le repos. « moment, le peuple (ou une fraction des classes dirigeantes, généralement plus lucides) peut se rebeller, ce qui conduit au désordre. Dans de telles conditions, la justice cède devant la force qui finit par s’imposer faute d’une véritable justice que seule l’église chrétienne non violente est apte à prescrire. La justice ne peut exister sans la force car la justice, qui repose sur des valeurs morales et spirituelles, a besoin de la force pour s’imposer alors que cette même force n’a cure de justice ! « La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique « (f 94) L comme Liasse : Unité de classement des fragments correspondant aux « Pensées « de Pascal. Ce sont en quelque sorte les différents chapitres correspondant à la progression du raisonnement pascalien. Ce travail de classement a été réalisé par Pascal lui-même et l’enchaînement des 7 liasses au programme (II à VIII) aborde une thématique très proche de ce que nous nommons aujourd’hui l’anthropologie (voir ce mot). Libertin : Pascal a écrit ses Pensées à l’adresse du libertin, terme qui désigne la minorité d’intellectuels de milieux aisés qui à cette époque ne croient pas en l’existence de Dieu et qui, par la même, s’estiment libres dans leur conduite de s’affranchir des principes religieux. Le choix des exemples comme la chasse, la danse, la musique, les jeux (argument du Pari), les conversations de salon sont autant de données qui visent les habitudes libertines. Le fait que Pascal s’appuie sur la force du raisonnement (le libertin est un scientifique cultivé) et qu’il critique la société de son temps sont également des gages donnés à l’adversaire. Le but final de Pascal est de créer dans l’esprit du libertin un tel désarroi qu’il ne lui reste plus après qu’à parier dans son intérêt sur l’existence de Dieu… Dieu à qui il est fait peu souvent allusion dans la première partie de l’œuvre, précisément pour se placer sur le terrain de l’Homme, en qui le libertin a toute confiance. H comme Homme : la condition humaine est au centre de l’œuvre de Pascal. Supérieur aux animaux et au vivant par la pensée mais inférieur à Dieu son créateur, l’Homme subit une destinée marquée par la déchéance originelle et qui se confirme dans tous les domaines de l’activité intellectuelle et sociale : Perdu dans l’immensité de l’univers, Cherchant à se grandir par vanité, incapable de repos et de sérénité, perdant son temps en de multiples divertissements et cherchant à dominer autrui par la force ou les ruses de l’imagination, l’homme doit assumer sa condition misérable et pourtant, par la pensée, la connaissance de soi et l’esprit de charité, il peut se rapprocher de Dieu et ainsi supporter sa condition. Il est donc unique par sa capacité à comprendre sa misère sans pouvoir pour autant y remédier sans l’aide de Dieu. J comme Jansénisme : Courant religieux adoptant la doctrine de Jansénius et s’opposant aux Jésuites qui sont au cœur de la religion d’état. Jansénistes et Jésuites s’opposent sur la question de la Grâce divine (voir ce mot) et de la prédestination et la conception janséniste conduira ses adeptes à être condamnés pour attitude hérétique. L’abbaye de Port Royal, foyer de propagande janséniste et centre culturel important, sera brûlée pendant le règne de Louis XIV. Pascal et Racine sont les deux écrivains de langue française qui seront influencés par le Jansénisme. L’austérité de la doctrine conduit l’un à une conception pessimiste du monde et l’autre à élaborer une œuvre de dramaturge à dominante tragique. Job et Salomon : Dans la Bible, Job symbolise l’extrême pauvreté ; il s’oppose à Salomon, réputé pour ses richesses. La mention de l’un et de l’autre au fragment 65 révèle que , quelle que soit sa condition matérielle, l’homme est misérable. Justice : Faute d’une justice universelle, les hommes ont établi des lois différentes selon les pays (voir coutume). La justice ne garantit donc pas un Souverain Bien sur lequel tous les peuples s’accorderaient. Déjà, celui qui décide des lois est différent selon les pays : en Angleterre, c’est le législateur ; en France, c’est le souverain absolu ; partout, c’est la coutume présente du pays où l’on est né qui fait loi. Ensuite, les peuples se laissent piéger par les mensonges de leurs gouvernants et vivent dans l’illusion que ces derniers sont à leur service. En réalité, c’est l’injustice qui s’installe partout comme norme et, à tout I comme Imagination : Parmi toutes les facultés de l’homme, l’imagination est la plus puissante : ainsi, elle supplante les sens mais surtout la Raison, personnifiée par Pascal en femme légitime qui se désespère d’être délaissée au profit de cette «maitresse d’erreur et de fausseté «, « cette superbe ennemie «. Par le terme imagination, Pascal désigne le pouvoir des apparences, le paraitre qui dissimule l’être et fait de nos sociétés de véritables « sociétés du spectacle «. Elle est une des formes les plus pernicieuses de la vanité et par son pouvoir de séduction, personne ne lui échappe, « les fous comme les plus sages «. Le magistrat incapable de rendre la vraie justice, le médecin impuissant à soigner les malades, le chef d’état inapte à résoudre les problèmes de son peuple, le philosophe placé sur une planche solide au milieu du vide (voir Vertige), tous ont recours à l’imagination pour pallier à leurs diverses faiblesses qui dans certains cas relèvent de la pure incompétence. À Pascal de conclure que si tous ces individus disposaient de la véritable connaissance dans leurs spécialités, ils n’auraient pas besoin de jouer sur l’apparence trompeuse de leurs costumes, de leurs manières, de leurs fantasmes et de leurs discours. En somme, ils n’auraient pas besoin d’user de la « grimace « (voir ce mot) M comme Machines : La métaphore de la machine est utilisée par Descartes pour caractériser les animaux. Pascal reprend cette idée quand il décrit les gestes « mécaniques « accomplis par un animal qui suit son instinct, ce qui prouve que l’animal ne peut être comparable à l’homme qui, lui, accomplit des actions réfléchies. « Le bec du perroquet qu’il essuie quoiqu’il soit net. « (f 98) Quoique quoi !? Magistrat : Exemple fréquemment cité par Pascal pour révéler le recours à l’imagination (voir ce mot) en matière de justice. Métiers : La réputation d’un métier dépend de la coutume qui, elle, varie d’un lieu à un autre. Selon le pays où nous sommes nés, nous sommes conditionnés dès l’enfance par le choix d’un métier sachant que certains sont respectables et d’autres ont au contraire mauvaise réputation. « Car des pays sont tout de maçons, d’autres tout de soldats… « (f 541) Misère : La misère de l’homme se constate à tous les niveaux : sur le plan philosophique pour commencer puisque l’homme perdu dans l’univers cherche une compensation dans la connaissance mais reste malgré ses efforts incapable d’atteindre la vérité ; en temps qu’individu, il est incapable de trouver le vrai bonheur : sa recherche des plaisirs est incessante mais ne lui permet pas de véritable épanouissement. Éternellement insatisfait, il s’ennuie, se divertit, cherche à dominer autrui. Enfin, la société ne lui donne guère l’occasion de s’affirmer : soumis à un pouvoir tyrannique, trahi par une justice mensongère, conditionné par la coutume du lieu où il vit, il lui faut multiplier les efforts pour s’adapter ou se révolter, cette dernière tentation conduisant nécessairement au désastre. Toutefois, l’homme n’est pas exempt d’une certaine « grandeur « (voir ce mot) : on ne peut le limiter à sa seule condition misérable. Montaigne : Le dialogue avec Montaigne qui se traduit par des références implicites est récurrent dans les liasses au programme. Pascal emprunte à l’auteur des Essais la nécessité de bien se connaitre soi-même dont il fait une règle de vie. L’argument pascalien portant sur la variabilité des coutumes (voir Frontière), phénomène qui prouve le caractère changeant de l’homme dans le temps et dans l’espace, doit beaucoup à Montaigne. En revanche, Pascal ne reprend pas à son compte la lutte contre l’anthropocentrisme que développe Montaigne dans l’Apologie de Raimond Sebond. Pour Pascal, l’animal comme les autres créatures vivantes restent inférieures à l’homme car dépourvus de pensées. L’homme a l’avantage de se savoir misérable. La valorisation du « Moi « reste aussi chez Pascal limitée contrairement à Montaigne qui a choisi le genre autobiographique pour présenter ses pensées. On trouve toutefois une certaine importance de l’engagement personnel pascalien au début du développement sur le divertissement (f 126) Moraliste : Auteur qui traite de Morale, c'est-à-dire doctrine des mœurs, science qui enseigne à conduire sa vie, ses actions. Le but du moraliste est de permettre aux hommes d’atteindre le bonheur, mais contrairement au religieux, le moraliste ne fixe pas de commandements, il ne prescrit pas, il se contente de décrire. Au lecteur de se faire une opinion. La plupart des écrivains et essayistes du XVIIème siècle (époque classique) sont moralistes et s’expriment sous des formes diverses : la fable (La Fontaine) le portrait caricatural (La Bruyère Caractères) la comédie (Molière) les maximes ou aphorismes (La Rochefoucauld et bien entendu Pascal lui- même). Pascal est un moraliste pessimiste qui invite son lecteur (le libertin) à se connaitre lui-même et à se tourner vers la foi chrétienne qui constitue la seule planche de salut. Mystère : Parmi tous les mystères qui existent dans le monde et sur lesquels viennent échouer nos tentatives d’explication, l’Homme est incontestablement le plus incompréhensible. Pascal l’exprime dans une formule en forme de chiasme qui fait intervenir sans la nommer explicitement l’énigme divine : « l’homme est plus inconcevable sans ce mystère que ce mystère n’est inconcevable à l’homme « (f 122) P comme Paix : L’usage de la force conduit les hommes à la guerre et toute violence est inutile, qu’elle soit provoquée par des armées organisées ou par des révoltes populaires, voire des « Frondes « conduites par des factions rivales du pouvoir. Le système monarchique peut céder à la tentation du despotisme et de la tyrannie (voir ces mots), mais, même si cette oppression justifie qu’on s’en scandalise, mieux vaut la stabilité d’un ordre injuste à l’anarchie des séditions. Le risque vient essentiellement de l’exercice solitaire du pouvoir. Le roi doit s’entourer de conseillers et ne pas décider seul, la paix en dépend comme elle dépend de l’église qui nous invite à respecter le message biblique, qui est un message de paix. Pari : Sachant que le libertin est un amateur de jeu, Pascal s’est appuyé sur l’argument du « pari « pour le convaincre de l’intérêt (faute de conviction) qu’il y avait à croire en Dieu. Si l’on parie que Dieu n’existe pas et qu’effectivement, il n’existe pas, on ne gagne rien puisqu’il s’agit d’une proposition négative. Si, au contraire, on parie qu’il existe : on peut perdre son pari comme dans toute mise, mais on peut aussi gagner car tout devient possible : donc, l’homme a tout intérêt à miser sur l’hypothèse de l’existence divine : il n’y a rien à perdre et tout à gagner. Péché originel : Placé par Dieu dans le paradis terrestre, l’homme a désobéit à son créateur et celui-ci l’a déchu. Dans la tradition chrétienne, toute notre vie consiste à expier cette faute pour nous racheter. Le péché originel marque donc la limite entre notre première nature qui proposait un bonheur authentique et notre seconde nature marquée par la déchéance et par conséquent la misère. Pascal, en chrétien fervent, appuie toute son argumentation sur cette révélation biblique. Toutefois, sensible aux objections du libertin, il reconnait que le poids de cette faute ne devrait pas reposer sur les générations d’hommes et de femmes qui se sont succédées depuis : payer pour une faute commise par les premières créatures humaines (Adam et Ève), ce n’est ni juste, ni rationnel… Les enfants n’ont pas à assumer la culpabilité des parents ; la logique et la justice devraient affranchir l’humanité présente de cette faute originelle. Soit répond Pascal, mais il en est ainsi : il y a là un « mystère incompréhensible « voulu par Dieu et la faiblesse de l’homme ne lui permet pas de se placer au dessus des décisions divines. «… entendez de votre maître votre condition véritable que vous ignorez. Écoutez Dieu. « (f 122) Pensée de derrière : C’est une pensée mais aussi un regard guidé par la « Lumière divine« et qui appartient aux plus éclairés à savoir les « Chrétiens parfaits « qui ont l’avantage de ne pas regarder le Peuple avec mépris, contrairement aux semi-habiles ou aux dévots (voir pyramide pascalienne). Elle permet de rapprocher le chrétien parfait du peuple, mais avec une différence notoire, c’est que ce dernier est laissé dans l’ignorance alors que cette pensée de derrière donne le privilège de la connaissance et de la compassion. (f 83) N comme Nature : L’homme fait partie de la nature mais il se distingue par la pensée (voir roseau pensant). Comme les bêtes et les plantes, l’homme est soumis à la maladie, à la mort et aux tentations sensorielles. Pour Pascal, si les animaux sont soumis aux lois de la nature, en revanche l’homme est contraint par ses propres lois qui dépendent de la coutume. Or, la nature est constante : une espèce animale ou végétale vivra toujours dans les mêmes conditions, alors que l’homme (soumis à la coutume) se caractérise par le changement et l’instabilité. Dans un autre sens hérité de la tradition philosophique, le mot « nature « renvoie pour Pascal à une double condition : la première nature de l’homme qui était marquée par le bonheur au sein du paradis terrestre, puis la seconde nature qui le caractérise depuis le péché originel et le condamne au malheur. La réminiscence de cette première nature nous laisse entrevoir l’idée du bonheur perdu. Néant : La conscience du Néant se retrouve dans les situations où l’homme s’ennuie car il est privé de divertissement. Le Néant, c’est aussi la prise de conscience que nous sommes un « point « perdu dans l’univers infini. Nuit de la conversion : Âgé de 31 ans, le 23 novembre 1654, au cours d’une nuit d’extase qu’il nommera « nuit de feu «, Pascal fait l’expérience de la présence divine. Sur le champ, il écrit un « mémorial « qui apporte le témoignage de sa révélation. Cousu dans la doublure de son vêtement, le document l’accompagnera jusqu’à la fin de ses jours. O comme Ordres (les trois) : De la même façon que Dieu, l’Homme et les animaux ne sont pas du même « ordre «, il est peu pertinent de confondre dans les valeurs humaines ce qui appartient à des ordres différents. Il y a déjà l’ordre de la chair qui détermine tout ce qui est corporel et à ce titre, on peut y inclure la force qui consiste à dominer physiquement autrui. Puis, l’ordre de l’esprit dans lequel évolue le savant mais sans accéder pour autant à la vérité. Enfin, il y a l’ordre de la charité qui permet à tout homme par l’intermédiaire du Christ de se rapprocher de Dieu. La confusion des ordres conduit à des discours faux et/ou tyranniques (voir cette notion). Pessimisme : Pascal propose une vision pessimiste de l’Homme. Quelle que soit sa condition sociale, l’Homme est misérable. Il est incapable d’atteindre la vérité et cède facilement à la concupiscence que lui dictent son esprit (curiosité intellectuelle vaine) ou ses penchants corporels. La domination de l’Homme par l’Homme est aussi le signe manifeste de cette misère et l’incapacité de vivre sans divertissement achève de dresser un tableau pessimiste de la condition humaine. Toutefois, Pascal atténue cette vision négative en montrant qu’on peut prendre conscience par la pensée de cette misère et nous rendre ainsi différent des autres créatures, entre autre par la connaissance de soi. f 105 « la grandeur de l’homme est grande en ce qu’il se connait misérable ; un arbre ne se connait pas misérable

« déchéance.

Toutefois, l'orgueil l'amène à se croire égal aux anges et ironiquement Pascal écrit : « Le malheur veut que qui veutfaire l'ange, fait la bête » (f 572).

À l'inverse, celui qui s'humilie mérite qu'on le grandisse.

» S'il se vante, je l'abaisse ; s'il s'abaisse,je le vante… » (f 121) Animal : Avec Descartes mais contre Montaigne (Apologie de Raimond Sebond), Pascal défend une conception anthropocentrique :l'homme est supérieur à l'animal (comme aux plantes) car il a le privilège de la pensée.

Toutefois, la B commeBonheur : L'homme désire le bonheur, c'est une certitude.

Mais selon les individus, cette quête recouvre des idéaux parfoistotalement opposés : bonheur dans la vertu pour les uns, dans la volupté pour les autres… L'homme ne peut donc atteindre lesouverain bien (voir cette notion) et il échoue dans sa quête d'un bonheur parfait qui serait le même pour tous.

Les échecs dans lavie sont d'ailleurs plus fréquents que les réussites ; aussi, il ne reste plus à l'homme qu'à se consoler par des bonheurs factices etéphémères qu'il trouve dans des situations qui prouvent sa vanité ; et surtout, ce semblant de bonheur, l'homme le recherche dansle divertissement.

Refusant la tranquillité, il en est réduit à se complaire dans les tracas.

Installé par Dieu dans la déchéance,l'homme n'est toutefois pas responsable du sort auquel il est destiné et pourtant, cette idée de bonheur lui vient de cet « instinctsecret » qui lui rappelle sa première condition, celle du paradis terrestre.

La seule issue : s'en remettre à Dieu qui l'a destitué de sapremière nature.

Brouette : absolue.

Il reste cependant attaché à ce que l'ordre social et politique ne soit pas bouleversé.

(Voir : Despotisme, Révolte,Peuple…) Casuiste : Directeur de conscience qui veille dans chaque famille aisée à ce que la morale religieuse soit bienrespectée.

Pour corriger le laxisme dont on accuse l'église catholique au début du XVIIème siècle (les jésuites qui assurentl'éducation tendent à minimiser les fautes…), on assiste à un durcissement des principes et les premiers écrits à caractèrethéologique de Pascal vont dans ce sens.

Casuiste était un métier et si l'on ne voulait pas perdre son emploi, on avait tendance àtolérer les écarts commis par ceux dont on avait la charge et qui pouvaient aussi vous renvoyer.

Charité : Vertu chrétienne dontPascal fait un de ses trois ordres, l'ordre de la charité qui rapproche l'homme de Dieu.

La Charité relève du Cœur et à ce titre,elle est bien supérieure à la Raison.

Chasse : christianisme et à propos duquel il montre à quel point il est supérieur à toute attitude rationnelle : « Le Cœur a ses raisons que laRaison ne connait pas.

» Climats (théorie des) : En insistant sur les différences de coutumes selon les pays, Pascal montre que larecherche d'une loi unique régissant tous les hommes sur terre est une vue de l'esprit.

Cette relativité des coutumes anticipe sur cequ'au XVIIIème s.

on appellera la théorie des climats (conception défendue par Montesquieu et Mme de Staël).

Quand on vitdans les brumes du nord, la sensibilité des peuples est bien différente et plus mélancolique que ce qu'on peut rencontrer en milieuméditerranéen.

Les variations climatiques confirment l'impossibilité d'établir des lois universelles et justifient le caractère changeantde l'homme dans l'espace.

« On ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de qualité en changeant de climat » (f 56) Cœur :Ce concept est directement employé par Pascal dans le sens que lui donne la Bible, à savoir : les facultés de l'âme au rangdesquelles on trouve un mélange d'intelligence, de mémoire et de volonté (le mot cœur dans le langage du XVIIème siècle voulaitdire « courage »…) Le Cœur chez Pascal s'oppose à la raison dont il convient de se méfier.

L'intuition (qui vient certes du cœurmais est souvent bien utile aux scientifiques…) permet précisément selon Pascal d'entrevoir la vérité et il rattache ces qualitéshumaines – cœur, intuition, instinct secret – à « l'esprit de finesse » (voir cette notion).

« Le Cœur a ses raisons que la Raison neconnait pas » Concupiscence : Terme de la théologie chrétienne désignant le penchant humain à jouir des biens terrestres.Contrairement à la force qui s'impose à l'homme contre son gré, la concupiscence dépend des choix volontaires de chacun et aété installée en nous par Dieu suite à la faute originelle.

Pascal distingue trois formes de concupiscence qui, toutes les troisviennent confirmer la vanité et la misère humaine : - La concupiscence des sens qui correspond aux tentations charnelles commela gourmandise, ou physiques comme la paresse.

Ce stade nous rapproche du monde animal. ? Se rassurer : il n'y aura pas de question sur le sujet bien qu'il s'agisse du « prétexte » à une découverte pascalienne.

Ceci posé,Pascal n'a pas inventé la brouette, mais il a bien inventé la machine à calculer et mis au point quelques théorèmes fondamentaux. C commeCabale : Terme qui désigne des groupes de pression organisés ; après les guerres de religion qui ont eu pour conséquencel'éclatement du dogme chrétien unique, ces regroupements prennent prétexte la diffusion de leurs conceptions théologiques.

Ilexiste donc toutes sortes de cabales, qu'il s'agisse de cabales libertines ou de cabales ultra religieuses.

C'est une cabale qui acausé l'interdiction du Tartuffe de Molière parce que la pièce dénonçait l'hypocrisie en matière de religion.

Les cabales de. »

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