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Plan Les Géhennes de Montaigne

Publié le 21/03/2015

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Michel de Montaigne, «  De la conscience », Essais, II, 5(1595) Les strates de la rédaction signalées par les majuscules A (pour les années 1580-1582), B (pour 1588) et C (pour la période ultérieure) offrent des informations précieuses sur la progression de sa pensée. L'essai s'achève sur ces lignes. Les Géhennes 1Citation extraite des Sentences, de Publius Syrius, poète et moraliste latin du Ie siècle avant J.-C.2Qui les appelle « barbares ». 3Souci de la vérité. 4L'instruction dans la procédure judiciaire est la phase où l'on enquête sur la réalité des faits reprochés de l'accusé. Traduction A.Lanly, Éditions Honoré Champion A. C'est une dangereuse invention que celle des tortures, et il semble que ce soit plutôt une épreuve d'endurance que de vérité. Cachent la vérité et celui qui peut les supporter est aussi celui qui ne peut pas les supporter. Pourquoi, en effet, la douleur me fera-t-elle avouer ce qui en est qu'elle ne me forcera de dire ce qui n'est pas ? Et, à l'inverse, si celui qui n'a pas fait ce dont on l'accuse est assez endurant pour supporter ces tortures, pourquoi ne le sera pas celui qui l'a fait, quand une aussi belle récompense que celle de la vie [sauve] lui est proposée ? Je pense que le fondement de cette invention est appuyé sur la considération de la force de la conscience, car, en ce qui concerne coupable, il semble qu'elle aide la torture pour lui faire avouer sa faute, et qu'elle l'affaiblisse [lui], et, de l'autre coté, qu'elle fortifie l'innocent contre la torture. À dire vrai, c'est un moyen plein d'incertitude et de danger. B. Que ne dirait-on pas, que ne ferait-on pas pour échapper à d'aussi pénibles douleurs ? CC. Etiam innocentes cogit mentiri dolor.1 [La douleur force à mentir même les innocents]. PourPour cette raison il arrive que celui que le juge a torturé pour ne pas le faire mourir innocent, il le fasse mourir et innocent et torturé. B. Mille et mille, sous l'action de la torture, ont chargé leurs têtes de faux aveux. [...] nbhbhhA. Toujours est-il que c'est, C. dit-on, A. la chose la moins mauvaise que l'humaine faiblesse ait pu inventer. BBBBBBC. Bien inhumainement pourtant et bien inutilement, à mon avis ! Beaucoup de nations, moins barbares en cela que les nations grecque et romaine qui les appellent ainsi2, estiment qu'il est horrible et cruel de torturer et de briser [les membres] d' un homme sur la faute duquel vous êtes encore dans le doute. En quoi est-il responsable de votre ignorance ? N'êtes-vous pas injustes, vous qui, pour ne pas le tuer sans cause, lui faites pire que le tuer ? [...]. Je ne sais d'où je tiens le récit suivant, mais il représente exactement la probité scrupuleuse3 de notre justice. Une femme de village accusait devant un général d'armée, grand justicier, un soldat d'avoir arraché à ses enfants encore petits le peu de bouillie qui lui restait pour les nourrir, cette armée ayant ravagé tous les villages aux environs. De preuve, il n'y en avait point. Le général, après avoir sommé la femme de bien peser ses paroles parce qu'elle serait condamnée pour cette accusation si elle mentait, et elle persistant, fit ouvrir le ventre au soldat pour s'informer de la vérité du fait. Et la femme se trouva avoir raison. Condamnation qui sert d'instruction4 au procès !

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