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Poujade, J'ai choisi le combat.

Publié le 14/04/2013

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Poujade, J'ai choisi le combat. Dans le discours poujadiste qui rencontre un franc succès en France à l'approche des législatives de janvier 1956, intellectuels et technocrates sont mis au banc des accusés. Partant d'une historiette métaphorique, Pierre Poujade publie fin 1955 cette parodie anti-intellectualiste et populiste : il accuse l'État de céder à ses propres et improductives lubies, source de la gabegie dont souffre la France à ses yeux. Une situation, précise Poujade selon son argumentaire démagogique, qu'une simple ménagère de bon sens saurait éviter. J'ai choisi le combat de Pierre Poujade [...] sans être un distingué psychologue, il était permis de deviner qu'à force de chauffer le dessous de la marmite, un beau jour le couvercle sauterait... À ce moment précis, l'humble ménagère qui n'est pas diplômée des Hautes Études et Sciences politiques et sociales, tout simplement baisse la flamme ou éteint, selon sa cuisine. Si, au contraire, perdant tout son bon sens, elle augmentait la puissance du feu, le dernier des chiens de poubelles se mettrait à hurler ! Tout ça, c'est du vulgaire, diront les intellectuels fatigués. Bien sûr, mais pour la société il vaut mieux avoir affaire à des « vulgaires « de bon sens qu'à des polytechniciens « abrutis « par les mathématiques. Vous vous souvenez de cette bonne histoire que je vous ai racontée à Paris, et que mon cher ami Magne, de Marseille, m'avait apprise ? C'était un de ces polytechniciens faiseurs de projets et de plans qui font prime dans nos ministères. C'était « l'homme à penser « du régime. Omniscient comme tous ses collègues, il venait de terminer, pour le ministère de la Famille, son rapport concernant « l'influence des racines de poteaux télégraphiques sur la reproduction des singes «. Car, dit-on, l'homme descend du singe... Bref, avant de présenter à l'Assemblée le budget de la Défense Nationale, le ministère voulait avoir un rapport complet sur les puces ! Donc notre savant technicien prend une puce savante et commence par vouloir établir un barème variable sur ses bonds ! Mettant la bestiole là, bien sur une ligne « préparée à l'avance « (comme le repli de l'autre fois, vous vous en souvenez ? c'est le même) : -- Puce, saute ! dit-il de sa belle voix de « penseur «. Lui, il ne peut pas pousser, avec ses poumons, sa poitrine de bicyclette ne le permet pas. Le souffle vient d'en haut, toujours plus haut... Et la puce bondit. Tout était prévu. On est technicien ou on l'est pas. Dame ! faut ce qu'il faut ! Notre homme, sur qui pesait la responsabilité de l'avenir de notre armée, sortit son crayon spécial, carnet et instrument de haute précision en main, il mesura le saut de l'animal... Aussi sérieux qu'Archimède, il inscrivit : 29 cm 5 mm. Soudain, il devient penseur à en faire crever de jalousie celui de Rodin... Un trait de génie venait de faire tressaillir sa puissante cervelle. Reprenant la pince avec l'assurance du gars qui sent l'inspiration, il coupe les pattes de la puce et la repose sur la ligne fatidique. -- Puce, saute ! Puce, saute ! Pas plus au troisième qu'au premier commandement, la puce ne bronche ! -- Eurêka, dit-il en américain ! Et reprenant ses ustensiles, il mentionne sur ses dernières notes : « Lorsque je coupe les pattes à une puce, elle devient sourde ! « Vous dites que c'est idiot ? Je me réserve de vous donner un certain nombre de décrets, avec références, et vous verrez où se trouvent les idiots ! 1 Parodie du nom de deux grandes écoles : les Hautes Études commerciales et l'Institut d'études politiques. 2 Anciens élèves de l'École polytechnique, la première des grandes écoles scientifiques. Source : Poujade (Pierre), J'ai choisi le combat, Saint-Céré, Société Générale et des Publications, 1955. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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