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ROUSSEAU A L'ILE SAINT-PIERRE - Rêveries, cinquième Promenade.

Publié le 02/10/2010

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ROUSSEAU A L'ILE SAINT-PIERRE - Rêveries, cinquième Promenade. Quand le soir approchait, je descendais des cimes de l'île, et j'allais volontiers m'asseoir au bord du lac, sur la grève, dans quelque asile caché; là, le bruit des vagues et l'agitation de l'eau, fixant mes sens et chassant de mon âme toute autre agitation, la plongeaient dans une rêverie délicieuse, où la nuit me surprenait souvent sans que je m'en fusse aperçu. Le flux et le reflux de cette eau, 5 son bruit continu, mais renflé par intervalles, frappant sans relâche mon oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvements internes que la rêverie éteignait en moi, et suffisaient pour me faire sentir avec plaisir mon existence sans prendre la peine de penser. De temps à autre naissait quelque faible et courte réflexion sur l'instabilité des choses de ce monde, dont la surface des eaux m'offrait l'image; mais bientôt ces impressions légères s'effaçaient dans l'uniformité du mouvement continu qui me berçait, et, qui, sans aucun concours actif de mon âme, ne laissait pas de m'attacher, au point qu'appelé par l'heure et par le signal convenu, je ne pouvais m'arracher de là sans efforts.

Dans la cinquième promenade de ses Rêveries, Rousseau cherche à donner l'idée du bonheur qu'il connut à l'île Saint-Pierre, en décrivant la vie qu'il y menait. Quand l'eau était calme, il naviguait sur le lac; quand le lac agité ne permettait pas la navigation, il herborisait dans l'île; puis, le soir, il redescendait au bord de l'eau et se laissait aller à une rêverie dont il analyse la genèse et les aspects. Le texte. La rêverie a charmé la promenade de l'après-midi; avec le soir, elle va se prolonger, mais dans le repos. Une entière solitude est nécessaire, et le désir de Rousseau est rendu sensible par le mouvement de la phrase, qui se termine par trois indications de lieu, de plus en plus limitées : au bord du lac, sur la grève, dans quelque asile caché. Le mot asile rappelle la valeur particulière que prend pour Rousseau la solitude, à partir du moment où, croyant être haï des hommes, il cherche à se soustraire à leur persécution. La solitude suffirait à la rêverie, puisque Rousseau écrira un peu plus loin : « J'ai souvent pensé qu'à la Bastille et même dans un cachot où nul objet n'eût frappé ma vue, j'aurais encore pu rêver agréablement. »

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