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séparant par un liquide acidulé : immédiatement cette même matière de la machine sera livrée à l'action d'une autre force première, le galvanisme, qui la gouvernera selon ses lois et se manifestera en elle par des phénomènes particuliers.

Publié le 23/10/2012

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séparant par un liquide acidulé : immédiatement cette même matière de la machine sera livrée à l'action d'une autre force première, le galvanisme, qui la gouvernera selon ses lois et se manifestera en elle par des phénomènes particuliers. Ici encore, l'étiologie ne pourra nous apprendre que les circonstances au milieu desquelles cette force se montre, et les lois qui la régissent... La force elle-même est une manifestation de la volonté et, en tant que telle, n'est pas soumise aux formes du principe de raison, est « sans raison «. Elle est en dehors du temps, elle est présente partout, et l'on dirait qu'elle guette constamment l'arrivée des circonstances grâce auxquelles elle peut se manifester et s'emparer d'une matière déterminée, en expulsant les autres forces qui y régnaient naguère. Le temps n'existe que pour elle ; par lui-même, il n'a aucun sens. Pendant des milliers d'années les forces chimiques sommeillent dans une matière, jusqu'à ce que le choc d'un réactif les mette en liberté : c'est alors seulement qu'elles apparaissent ; mais le temps n'existe que pour cette apparition, et non pour la force elle-même. Pendant des milliers d'années encore, le galvanisme sommeille dans le cuivre et le zinc, et tous deux gisent à côté de l'argent, qui, dès qu'il se rencontre avec eux dans certaines conditions, doit s'enflammer. Dans le règne organique lui-même, nous voyons une semence desséchée conserver pendant trois mille ans la force qui repose en elle, et, grâce à de certaines circonstances favorables, germer enfin et devenir plante. Ces considérations nous ont bien fait voir la différence qu'il y a entre une force naturelle et ses manifestations ; nous nous sommes convaincus que cette force est la volonté elle-même à tel degré de son objectivation. La multiplicité ne convient qu'aux phénomènes, à cause de l'espace et du temps, et la loi de causalité n'est pas autre chose que la détermination du point dans le temps et dans l'espace où se produisent les phénomènes particuliers. Dès lors, nous pourrons comprendre toute la vérité et toute la profondeur de la doctrine de Malebranche sur les « causes occasionnelles «. Il serait intéressant de comparer cette théorie avec l'exposé que je viens de faire, et de voir comment deux doctrines dont le point de départ est si opposé peuvent arriver à une parfaite concordance. Je m'étonne que Malebranche, emprisonné dans les dogmes positifs que son temps lui imposait, ait rencontré si heureusement et si exactement la vérité, malgré toutes les entraves, sans abandonner pour cela le dogme, du moins dans la forme. C'est qu'on ne s'imagine pas combien grande est la force de la vérité, combien elle est tenace et opiniâtre. Nous retrouvons ses traces dans les dogmes les plus bizarres et les plus absurdes de tous les temps et de tous les pays, mêlées, fondues, de la façon la plus étrange, mais cependant toujours reconnaissables... D'ailleurs, Malebranche a raison : toute cause naturelle n'est qu'une cause occasionnelle ; elle ne donne que l'occasion de la manifestation de cette volonté une et indivisible, qui est la substance de toutes choses et dont les degrés d'objectivation constituent tout le monde visible. Ce n'est que la manifestation, la visibilité de la volonté en tel point, à tel moment, qui est amenée par la cause, et qui, en ce sens, dépend d'elle ; ce n'est pas le tout du phénomène, son essence intime. Aucune chose au monde n'a de raison de son existence générale et absolue, mais seulement une raison de ce qu'elle est ici ou là. Pourquoi une pierre manifeste à tel moment de la pesanteur, à tel autre de la rigidité ou de l'électricité, ou encore des propriétés chimiques, voilà ce qui dépend de causes, d'influences extérieures, et ce que celles-ci peuvent expliquer ; mais ces propriétés elles-mêmes, tout ce qui constitue l'essence de la pierre, son être qui se compose de toutes ces propriétés et qui se manifeste de ces différentes manières, en un mot le fait qu'elle est telle qu'elle est, et en général le fait qu'elle existe, voilà ce qui est sans raison, voilà ce qui n'est que la visibilité de la volonté inexplicable. Ainsi, toute cause est une cause occasionnelle : nous l'avons constaté dans la nature inconsciente ; mais il en est absolument de même quand ce ne sont plus des causes ou des excitations, mais des motifs qui déterminent la production des phénomènes, c'est-à-dire dans la conduite de l'homme et de l'animal. Car, ici comme là, c'est toujours la même volonté qui apparaît, très différente suivant les degrés de ses manifestations, qui se diversifie dans les phénomènes et qui, par rapport à eux, est soumise au prin- cipe de raison, bien que par elle-même elle soit absolument libre. Les motifs ne déterminent pas le caractère de l'individu, mais seulement les manifestations de ce caractère, c'est-à-dire les actes ; la forme extérieure de la conduite, et non pas son sens profond et son contenu ; celui-ci tient au caractère, qui est le phénomène immédiat de la volonté, c'est-à-dire qui est inexplicable. Pourquoi un tel est un scélérat, tandis que cet autre est un brave homme, voilà qui ne dépend ni de motifs, ni d'influences extérieurs, ni des maximes de la morale, ni des sermons, et qui, dans ce sens, est inexplicable. Mais quand un méchant montre sa méchanceté par de petites iniquités, par de lâches intrigues ou par de basses fourberies, exercées dans le cercle étroit de son entourage, ou quand il opprime les peuples qu'il a conquis, quand il précipite un monde entier dans la désolation et fait couler le sang de millions d'hommes, c'est là alors la forme extérieure de sa manifestation, ce qui ne lui est pas essentiel, ce qui dépend des circonstances au milieu desquelles le destin l'a placé, de son entourage, des influences extérieures, des motifs ; mais jamais on n'expliquera par là la décision de l'individu : elle procède de la volonté dont cet homme est une manifestation. Nous en parlerons dans le quatrième livre. La façon dont le caractère développe ses propriétés peut se comparer à celle dont les corps, dans la nature inconsciente, manifestent les leurs. L'eau reste l'eau avec les propriétés qui lui sont inhérentes ; mais lorsque, mer paisible, elle réfléchit ses bords, lorsqu'elle s'élance écumante sur les rochers, lorsqu'elle jaillit artificiellement dans les airs, comme un rayon délié, elle est soumise à des causes extérieures : un état lui est aussi naturel que l'autre ; mais, suivant les circonstances, elle est ceci ou cela, également prête à toutes les métamorphoses, et pourtant, dans tous les cas, fidèle à son caractère et ne manifestant jamais que lui. De même, tout caractère humain se manifeste suivant les circonstances ; mais les manifestations qui en résultent seront ce que les circonstances les auront faites. (Monde, I, 139-43.) 2. GRADATION DES FORCES ET LUTTE POUR L'EXISTENCE On pourra constater sans doute, dans l'organisme, les traces de toutes sortes d'activités physiques ou chimiques,

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