ses spé

 

Spécialité SES – Sujet type Bac

 

 

Schumpeter – Progrès technique et croissance économique

 

 

 

Document 1

Nous avons vu que le rôle de l'entrepreneur consiste à réformer ou à révolutionner la routine de production en exploitant une invention ou, plus généralement, une possibilité technique inédite [...]. Cette fonction ne consiste pas essentiellement à inventer un objet ou à créer des conditions exploitées par l'entreprise, mais bien à aboutir à des réalisations.

Or, cette fonction sociale est, dès à présent, en voie de perdre son importance et elle est destinée à en perdre de plus en plus et à une vitesse accélérée dans l'avenir, ceci même si le régime économique lui-même, dont l'initiative des entrepreneurs a été le moteur initial, continuait à fonctionner sans perturbations. En effet, d'une part, il est beaucoup plus facile désormais que ce n'était le cas dans le passé, d'accomplir des tâches étrangères à la routine familière, car l'innovation elle-même est en voie d'être ramenée à une routine. Le progrès technique devient toujours davantage l'affaire d'équipes de spécialistes entraînés qui travaillent sur commande et dont les méthodes leur permettent de prévoir les résultats pratiques de leurs recherches. Au romantisme des aventures commerciales d'antan succède rapidement le prosaïsme (1), en notre temps où il est devenu possible de soumettre à un calcul strict tant de choses qui naguère devaient être entrevues dans un éclair d'intuition géniale.

J.A. Schumpeter, Capitalisme, Socialisme et Démocratie, Payot, 1990 (première édition, 1942).

1. Prosaïsme: sens du concret.

Document 2

L'accent est systématiquement mis sur le goût entrepreneurial du risque, mais une caractéristique de la nouvelle économie semble être... la fuite des capitaux devant le risque. Les « décrochages » du Nasdaq sont systématiquement suscités par des écarts de résultats par rapport aux prévisions. Que Priceline(2), en septembre, ou Gateway(2) en décembre, avertissent que leurs revenus trimestriels seront inférieurs aux prévisions du budget, et c'est tout le Nasdaq qui dérape. Les investisseurs de l'e-business(3) exigent avant tout et paradoxalement une forte prévisibilité et une planification en acier!

Ph. Lorino, Alternatives économiques, n' 188, janvier 2001.

1. Marché financier américain des nouvelles technologies.

2. Entreprises du secteur Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication.

3. Secteur des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

 

 

 

Questions

 

1. À l'aide du document 1 et de vos connaissances, vous montrerez en quoi l'entrepreneur dans l'analyse de Schumpeter est au cœur de la dynamique du capitalisme. (9 points)

2. Expliquez la phrase soulignée. (4 points)

3. En quoi le document 2 confirme-t-il la vision de Schumpeter sur l'évolution du capitalisme? (7 points)

 

 

 

 

CORRIGÉ

 

QUESTION 1

J.A. Schumpeter (1883-1950) est un économiste d’origine autrichienne qui s’est intéressé aux variations de l’activité économique sur le long terme. Il considère que le capitalisme repose sur la capacité des hommes à introduire des innovations dans l’économie, notamment des innovations majeures entraînant une « révolution industrielle ».

Pour Schumpeter, l’entrepreneur est l’acteur central de la dynamique du capitalisme car il est celui qui innove. Seuls les entrepreneurs ont les qualités requises pour innover : ils sont visionnaires, ont le goût du risque, ont un esprit indépendant et sont capables de diriger. L’entrepreneur-innovateur est bien au cœur de la dynamique du capitalisme car il crée les innovations qui sont à l’origine des cycles.

L’innovation est l’application d’une invention dans le domaine de la production, ou selon les termes de Schumpeter, « une nouvelle combinaison » ou encore « une possibilité technique inédite ». Il en existe de cinq natures : fabrication d'un bien nouveau, nouvelle méthode de production, de transport ou de commercialisation, découverte d'une nouvelle source de matière première, création d'une nouvelle organisation, innovation commerciale, ouverture d'un nouveau débouché.

La dynamique du capitalisme repose sur l’innovation car l’activité n’est pas régulière, elle suit des mouvements cycliques longs d’une cinquantaine d’années, appelés cycles de Kondratieff : l’expansion ou croissance économique est suivie d’une crise puis viennent la récession et la reprise. Ce mouvement cyclique est impulsé par les innovations qui surviennent par grappe au creux de la récession. Celle-ci incite à innover pour renouer avec la croissance.

 

 

QUESTION 2

 

Schumpeter dresse le portrait de l’entrepreneur-innovateur : risque, indépendance, compétences. Il associe ce personnage à un aventurier des débuts du capitalisme. Mais l’auteur perçoit aussi l’évolution de la fonction d’innovation dans l’entreprise. L’innovation est devenue une activité planifiée.

 

 

QUESTION 3

Le document 2 explique qu’à la tête des entreprises on ne trouve plus des entrepreneurs innovateurs mais des managers dont le rôle est de faire monter le cours des actions des entreprises pour satisfaire les actionnaires. La valeur boursière d’une entreprise peut être totalement indépendante des performances productives de l’entreprise.

Ainsi, l’objectif du manager n’est pas d’innover mais de gérer l’entreprise de façon à en faire monter la valeur boursière. Cependant, on peut nuancer les idées de ce document car on a constaté de fortes hausses des actions d’entreprises innovantes, notamment cotées au NASDAQ, car l’innovation est le gage de futurs profits.