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Vigny, Cinq-Mars (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Vigny, Cinq-Mars (extrait). Ce passage est situé à la fin du roman, puisqu'il retrace aussi la fin du héros. Cinq-Mars, dont le complot contre Louis XIII a été éventé, est condamné à mort. Les conjurés, complices du jeune noble, sont dispersés dans la foule, prêts à déclencher un mouvement de foule pour le sauver ; mais le sort de celui-ci paraît inévitable. Ménageant un certain suspens, Vigny relate cependant la mort du héros de manière à souligner son aspect romantique : loin d'éprouver de la crainte, il monte à l'échafaud en véritable dandy (la description de ses vêtements le suggère), imperturbable et « mélancolique «. Cinq-Mars d'Alfred de Vigny (chapitre 25) -- À la mort ! « dit Fontrailles d'une voix sinistre qui fit taire toutes les voix. On n'entendit plus que les pas lents des chevaux, qui s'arrêtèrent tout à coup par un de ces retards qui arrivent dans la marche de tout cortège. On vit alors un douloureux et singulier spectacle. Un vieillard à la tête tonsurée marchait avec peine en sanglotant, soutenu par deux jeunes gens d'une figure intéressante et charmante, qui se donnaient une main derrière ses épaules voûtées, tandis que de l'autre chacun d'eux tenait l'un de ses bras. Celui qui marchait à sa gauche était vêtu de noir ; il était grave et baissait les yeux. L'autre, beaucoup plus jeune, était revêtu d'une parure éclatante : un pourpoint de drap de Hollande, couvert de larges dentelles d'or et portant des manches bouffantes et brodées, le couvrait du cou à la ceinture, habillement assez semblable au corset des femmes ; le reste de ses vêtements en velours noir brodé de palmes d'argent, des bottines grisâtres à talons rouges, où s'attachaient des éperons d'or ; un manteau d'écarlate chargé de boutons d'or, tout rehaussait la grâce de sa taille élégante et souple. Il saluait à droite et à gauche de la haie avec un sourire mélancolique. Un vieux domestique, avec des moustaches et une barbe blanche, suivait, le front baissé, tenant en main deux chevaux de bataille caparaçonnés. Les jeunes demoiselles se taisaient ; mais elles ne purent retenir leurs sanglots en les voyant. « C'est donc ce pauvre vieillard qu'on mène à la mort ? s'écrièrent-elles ; ses enfants le soutiennent. -- À genoux, mesdames, dit une religieuse, et priez pour lui. -- À genoux ! cria Gondi, et prions que Dieu les sauve ! « Tous les conjurés répétèrent : « À genoux ! à genoux ! « et donnèrent l'exemple au peuple, qui les imita en silence. « Nous pouvons mieux voir ses mouvements à présent, dit tout bas Gondi à Montrésor : levez-vous ; que fait-il ? -- Il est arrêté et parle de notre côté en nous saluant ; je crois qu'il nous reconnaît. « Toutes les maisons, les fenêtres, les murailles, les toits, les échafauds dressés, tout ce qui avait vue sur la place, était chargé de personnes de toute condition et de tout âge. Le silence le plus profond régnait sur la foule immense ; on eût entendu les ailes du moucheron des fleuves, le souffle du moindre vent ou le passage des grains de poussière qu'il soulève ; mais l'air était calme, le soleil brillant, le ciel bleu. Tout le peuple écoutait. On était proche de la place des Terreaux ; on entendit des coups de marteau sur des planches, puis la voix de Cinq-Mars. Un jeune chartreux avança sa tête pâle entre deux gardes ; tous les conjurés se levèrent au-dessus du peuple à genoux, chacun d'eux portant la main à sa ceinture ou dans son sein, et serrant de près le soldat qu'il devait poignarder. « Que fait-il ? dit le chartreux ; a-t-il son chapeau sur la tête ? -- Il jette son chapeau à terre loin de lui «, dit paisiblement l'arquebusier qu'il interrogeait. Source : Beaumarchais (Jean-Pierre de) et Couty (Daniel), Anthologie des littératures de langue française, Paris, Bordas, 1988. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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