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Zola l'Assommoir, travail sur Gervaise Macquart

Publié le 04/12/2011

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CORPUS DE TEXTES

 

«  Oui, oui, blanchisseuse … A dix ans … Il y a douze ans de ça […]

-C'est du chien, ça ! S'écria Mme Boche, émerveillée de la rudesse des coups de battoir [donnés par Gervaise]. Quelle mâtine ! Elle vous aplatirait du fer, avec ses petits bras de demoiselle ! »

Non, nous ne sommes pas mariés, reprit Gervaise. Moi, je ne m'en cache pas. Lantier n'est pas si gentil pour qu'on souhaite d'être sa femme. S'il n'y avait pas les enfants, allez! ...J'avais quatorze ans et lui dix-huit, quand nous avons eu notre premier. L'autre est venu quatre ans plus tard … C'est arrivé comme ça arrive toujours, vous savez. Je n'étais pas heureuse chez nous; le père Macquart, pour un oui, pour un non, m'allongeait des coups de pied dans les reins. Alors, ma foi, on songe à s'amuser dehors … On nous aurait mariés, mais je ne sais plus, nos parents n'ont pas voulu. » […]

« Il n'est pas gentil, alors ?

-Ne m'en parlez pas ! Répondit Gervaise, il était très bien pour moi, là-bas; mais depuis que nous sommes à Paris, je ne peux plus en venir à bout... Il faut vous dire que sa mère est morte l'année dernière; en lui laissant quelque chose, dix-sept cents francs à peu près. Il voulait partir pour Paris. Alors, comme le père Macquart m'envoyait toujours des gifles sans crier gare, j'ai consenti à m'en aller avec lui; nous avons fait le voyage avec les deux enfants. Il devait m'établir blanchisseuse et travailler de son état de chapelier. Nous aurions été très heureux … Mais, voyez-vous, Lantier est un ambitieux, un dépensier, un homme qui ne songe qu'à son amusement. Il ne vaut pas grand-chose, enfin … Nous sommes donc descendu à l'hôtel Montmartre, rue Montmartre. Et ç'a été des dîners, des voitures, les théâtre, une montre pour lui, une robe de soie pour moi ; il il n'a pas mauvais cœur, quand il a de l'argent. Vous comprenez, tout le tremblement, si bien qu'au bout de deux mois nous étions nettoyés. C'est à ce moment)là que nous sommes venus habiter l'hôtel Boncœur et que le sacrée vie à commencé ... » p34-35

\"Le quartier trouvait Gervaise bien gentille. Sans doute, on clabaudait sur son compte, mais il n'y avait qu'une voix pour lui reconnaître de grands yeux, une bouche pas plus longue que ça, avec des dents très blanches. Enfin, c'était une jolie blonde, et elle aurait pu se mettre parmi les plus belles, sans le malheur de sa jambe. Elle était dans ses vingt-huit ans, elle avait engraissé. Ses traits fins s'empâtaient, ses gestes prenaient une lenteur heureuse. Maintenant, elle s'oubliait parfois sur le bord d'une chaise, le temps d'attendre son fer, avec un sourire vague, la face noyée d'une joie gourmande. Elle devenait gourmande; ça, tout le monde le disait; mais ce n'était pas un vilain défaut, au contraire. Quand on gagne de quoi se payer de fins morceaux, n'est-ce pas ? On serait bien bête de manger des pelures de pommes de terre. D'autant plus qu'elle travaillait toujours dur, se mettant en quatre pour ses pratiques, passant elle-même les nuits, les volets fermés, lorsque la besogne était pressée. Comme on disait dans le quartier, elle avait la veine; tout lui prospérait.\" p141-142   « Elle était douce comme un mouton, bonne comme du pain. »p142   « Gervaise surtout, devenue grasse, les épaules blondes, luisantes comme une soie, avec un pli de bébé au cou, dont il aurait dessiné de souvenir la petite fossette, tant il le connaissait. »p158   « Gervaise entra, embarrassée, sans oser même balbutier une excuse. Elle n'était plus exacte, ne venait jamais à l'heure, se faisait attendre dès huit jours. Peu à peu, elle s'abandonnait à un grand désordre. » p288   « Maintenant, Gervaise se moquait de tout. Elle avait un geste vague de la main pour envoyer coucher le monde. A chaque nouvel ennui, elle s'enfonçait dans le seul plaisir de faire ses trois repas par jour. La boutique aurait pu crouler, pourvu qu'elle ne fût pas dessous, elle s'en serait allée volontiers, sans une chemise. Et la boutique croulait, pas tout d'un coup, mais un peu matin et soir. Une à une, les pratiques se fâchaient et portaient leur linge ailleurs. » p292   « Tout le quartier pouvait la lâcher, ça la débarrasserait d'un beau tas d'ordures; puis, ce serait toujours de l'ouvrage de moins. En attendant, elle gardait seulement les mauvaises paies, les rouleuses, les femmes comme Mme Goudron, dont pas une blanchisseuse de la rue neuve ne voulait laver le linge, tant il puait. La boutique était perdue. »p292

« Pendant qu'elle sirotait son anisette, elle eut tout d'un coup un souvenir, elle se rappela la prune qu'elle avait mangée avec Coupeau, jadis, près de la porte, lorsqu'il lui faisait la cour. En ce temps-là, elle laissait la sauce des fruits à l'eau-de-vie. Et, maintenant, voici qu'elle se remettait aux liqueurs. Oh ! Elle se connaissait, elle n'avait pas pour deux liards de volonté. On n'aurait eu qu'à lui donner une chiquenaude sur les reins pour l'envoyer faire une culbute dans la boisson. »[…]

« Qu'est-ce que vous buvez donc là , demanda-t-elle sournoisement aux hommes, l'œil allumé par la belle couleur d'or de leurs verres.

-Áa, ma vieille, répondit Coupeau, c'est le camphre du papa Colombe... Fais pas la bête, n'est-ce pas ? On va t'y faire goûter. »

Et lorsqu'on lui eut rapporté le verre de vitriol, et que la mâchoire se contracta, à la première gorgée, le zingueur reprit, en se tapant sur les cuisses :

« Hein ! Ça te rabote le sifflet !... Avale d'une lampée, chaque tournée retire un écu de six francs de la poche du médecin. »

Au deuxième verre, Gervaise ne sentit plus la faim qui la tourmentait. Maintenant, elle était raccommodée avec Coupeau, elle ne lui en voulait plus de son manque de parole. »  p411

 

« Depuis ce jour [de la mort de Coupeau], comme Gervaise perdait la tête souvent, une des curiosités de la maison était de lui voir faire Coupeau. On n'avait plus besoin de la prier, elle donnait lle tableau gratis, tremblant des pieds et des mains, lâchant de petits cris involontaires. Sans doute avait-elle pris ce tic-là à Saint-Anne, en regardant trop longtemps son homme. Mais elle n'était pas chanceuse, elle n'en crevait pas comme lui. Ça se bornait à des grimaces de singe échappé, qui lui faisaient jeter des trognons de choux par les gamins, dans les rues.

Gervaise dura ainsi pendant des mois. Elle dégringolait plus bas encore, acceptait les dernières avanies, mourait un peu de faim tous les jours. Dès qu'elle possédait quatre sous, elle buvait et battait les murs. On la chargeait des sales commissions du quartier. Un soir, on avait parié qu'elle ne mangerait pas quelque chose de dégoûtant; et elle l'avait mangé, pour gagner dix sous. M. Marescot s'était décidé à l'expulser de la chambre du sixième. Mais, comme on venait de trouver le père Bru mort dans son trou, sous l'escalier, le propriétaire avait bien voulu lui laisser cette niche. Maintenant, elle habitait la niche du père Bru. C'était là-dedans, sur de la vieille paille, qu'elle claquait du bec, le ventre vide et les os glacés. La terre ne voulait pas d'elle, apparemment. Elle devenait idiote, elle ne songeait pas seulement à se jeter du sixième sur le pavé de la cour, pour en finir. La mort devait la prendre petit à petit, morceau par morceau, en la trainant ainsi jusqu'au bout dans la sacrée existence qu'elle s'était faite. Même on ne sut jamais de quoi elle était morte. On parla d'un froid et chaud. Mais la vérité est qu'elle s'en allait de misère, des ordures et des fatigues de sa vie gâtée. Elle creva d'avachissement, selon le mot des Lorilleux. Un matin, comme ça sentait mauvais dans le corridor, on se rappela qu'on en l'avait pas vue depuis deux jours ; et on la découvrit déjà verte, dans sa niche. » p516-517

 

 

 

 

Introduction

 

Emile Zola est né le 02 avril 1840 à Paris. En 1843, les Zola partent s'installer à Aix en Provence. Mais reviennent sur Paris en 1857 pour cause financière. Ce n'est qu'en 1862 qu'Emile Zola se procurera un véritable emploi: Commis a la librairie Hachette; où il rencontrera de nombreux auteurs qui l'auront remarqués pour son talent d'écriture et son esprit d'initiatives. En 1864, Zola publie son premier livre chez l'éditeur Lacroix « Contes à Ninon ». C'est en 1866, que Zola se passionne pour le réalisme par le biais de son ami Duranty. Il continue alors à publier des romans, mais plutôt des chroniques dans les journaux... De 1870 à 1893 il publie la série des « Rougon-Macquart ». En 1876 arrive enfin le scandaleux triomphe de « L'Assommoir ». Zola prendra la défense du capitaine « Dreyfus » dans l'affaire juridique du même nom, mais devra s'enfuir en Angleterre en 1898, pour ensuite revenir en France un an après. Ce ne sera que deux ans plus tard qu'il mourra asphyxié dans son appartement à Paris.

 

Dans ce dossier sur « L'Assommoir » d'Emile Zola, nous allons traiter du thème de Gervaise Macquart, qui est le personnage principal de cette oeuvre.

Nous avons choisi ce thème car à travers cette personne fictive on peut apercevoir la mobilité sociale: déchéance sociale et économique.

 

Nous allons essayer de répondre à une problématique, qui est : comment le personnage de Gervaise permet à Zola de décrire son époque et le climat social ?

Nous parlerons de ce thème en différentes parties, en premier lieu la description de Gervaise Macquart, puis en second, sa déchéance.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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I- Présentation du personnage

 

Dans cette première partie nous allons, donc, voir qui est réellement le personnage de Gervaise Macquart. Dans une première sous-partie son portrait physique, puis dans une seconde, son portrait moral.

 

a) Portrait physique

 

Gervaise est le personnage principal du roman, le lecteur la suit à travers tous ses faits et gestes.

 

Au début du récit, c'est une jolie jeune femme, blonde, à la peau claire, mais c'est une boiteuse de naissance – sa mère était battue par son père, durant sa grossesse- mais qui aurait pu être très jolie sans ce défaut. Elle a vingt-huit ans, et a d'abord deux enfants Étienne et Claude, le troisième arrivera plus tard dans le récit sous le nom de Nana. Physiquement, elle a été abîmée par la vie, mais reste néanmoins une jolie jeune femme. Ce n'est qu'après l'ouverture de sa blanchisserie qu'elle se laissera aller, elle deviendra extrêmement gourmande, à un point tel qu'elle en deviendra grasse.

 

Dans cet extrait du roman, l'auteur montre que la vie de Gervaise n'a pas toujours été facile, ses blessures physique subies par son beau-père sont ici citées:

 

« Oui, oui, blanchisseuse … A dix ans … Il y a douze ans de ça […]

-C'est du chien, ça ! S'écria Mme Boche, émerveillée de la rudesse des coups de battoir [donnés par Gervaise]. Quelle mâtine ! Elle vous aplatirait du fer, avec ses petits bras de demoiselle ! »

Non, nous ne sommes pas mariés, reprit Gervaise. Moi, je ne m'en cache pas. Lantier n'est pas si gentil pour qu'on souhaite d'être sa femme. S'il n'y avait pas les enfants, allez! ...J'avais quatorze ans et lui dix-huit, quand nous avons eu notre premier. L'autre est venu quatre ans plus tard … C'est arrivé comme ça arrive toujours, vous savez. Je n'étais pas heureuse chez nous; le père Macquart, pour un oui, pour un non, m'allongeait des coups de pied dans les reins. Alors, ma foi, on songe à s'amuser dehors … On nous aurait mariés, mais je ne sais plus, nos parents n'ont pas voulu. » […]

« Il n'est pas gentil, alors ?

-Ne m'en parlez pas ! Répondit Gervaise, il était très bien pour moi, là-bas; mais depuis que nous sommes à Paris, je ne peux plus en venir à bout... Il faut vous dire que sa mère est morte l'année dernière; en lui laissant quelque chose, dix-sept cents francs à peu près. Il voulait partir pour Paris. Alors, comme le père Macquart m'envoyait toujours des gifles sans crier gare, j'ai consenti à m'en aller avec lui; nous avons fait le voyage avec les deux enfants. Il devait m'établir blanchisseuse et travailler de son état de chapelier. Nous aurions été très heureux … Mais, voyez-vous, Lantier est un ambitieux, un dépensier, un homme qui ne songe qu'à son amusement. Il ne vaut pas grand-chose, enfin … Nous sommes donc descendu à l'hôtel Montmartre, rue Montmartre. Et ç'a été des dîners, des voitures, les théâtre, une montre pour lui, une robe de soie pour moi ; il n'a pas mauvais cœur, quand il a de l'argent. Vous comprenez, tout le tremblement, si bien qu'au bout de deux mois nous étions nettoyés. C'est à ce moment là que nous sommes venus habiter l'hôtel Boncœur et que le sacrée vie à commencé ... » p34-35

 

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Cet extrait du récit montre la popularité positive de Gervaise, Zola montre ici la gentillesse et la bonté de celle-ci:

 

- « Le quartier trouvait Gervaise bien gentille. Sans doute, on clabaudait sur son compte, mais il n'y avait qu'une voix pour lui reconnaître de grands yeux, une bouche pas plus longue que ça, avec des dents très blanches. Enfin, c'était une jolie blonde, et elle aurait pu se mettre parmi les plus belles, sans le malheur de sa jambe. Elle était dans ses vingt-huit ans, elle avait engraissé. Ses traits fins s'empâtaient, ses gestes prenaient une lenteur heureuse. Maintenant, elle s'oubliait parfois sur le bord d'une chaise, le temps d'attendre son fer, avec un sourire vague, la face noyée d'une joie gourmande. Elle devenait gourmande; ça, tout le monde le disait; mais ce n'était pas un vilain défaut, au contraire. Quand on gagne de quoi se payer de fins morceaux, n'est-ce pas ? On serait bien bête de manger des pelures de pommes de terre. D'autant plus qu'elle travaillait toujours dur, se mettant en quatre pour ses pratiques, passant elle-même les nuits, les volets fermés, lorsque la besogne était pressée. Comme on disait dans le quartier, elle avait la veine; tout lui prospérait. » p141-142

Zola compare, ici, Gervaise à un mouton, puis à du pain, cette description nous permet de s'imaginer cette-dernière très chaleureuse, et très gironde:

- « Elle était douce comme un mouton, bonne comme du pain. » p142

Cette phrase montre une partie du corps de Gervaise, on peut même, grâce à cette seule phrase s'imaginer une silhouette de celle-ci:

- « Gervaise surtout, devenue grasse, les épaules blondes, luisantes comme une soie, avec un pli de bébé au cou, dont il aurait dessiné de souvenir la petite fossette, tant il le connaissait. » p158

 

b) Portrait moral

 

Gervaise est, au début du roman, présentée comme une victime: délaissée par Lantier, mais elle ne baissera pas les bras elle ouvrira donc sa blanchisserie. C'est à cette époque que les voisins et amis de cette-dernière la trouveront très agréable, tout lui prospérait. Elle était bien gentille, et travailleuse. Mais une fois le goût du relâchement au travail pris, elle se laissa porter par le temps et la gourmandise. Elle grossit et commença à se moquer de tout et de tout le monde. Puis elle sombra dans l'alcool, la crasse, et la gourmandise.

Dans cet extrait, Zola montre de Gervaise son côté studieux qui commence sérieusement a s'estomper:

- « Gervaise entra, embarrassée, sans oser même balbutier une excuse. Elle n'était plus exacte, ne venait jamais à l'heure, se faisait attendre dès huit jours. Peu à peu, elle s'abandonnait à un grand désordre. »p288

A partir de ce texte, on peut constater la fainéantise déclarée chez Gervaise:

- « Maintenant, Gervaise se moquait de tout. Elle avait un geste vague de la main pour envoyer coucher le monde. A chaque nouvel ennui, elle s'enfonçait dans le seul plaisir de faire ses trois repas par jour. La boutique aurait pu crouler, pourvu qu'elle ne fût pas dessous, elle s'en serait allée volontiers, sans une chemise. Et la boutique croulait, pas tout d'un coup, mais un peu matin et soir. Une à une, les pratiques se fâchaient et portaient leur linge ailleurs. » p292

Ici, on peut voir que ses voisins on peut à faire, désormais, de la pauvre et grasse Gervaise: - « Tout le quartier pouvait la lâcher, ça la débarrasserait d'un beau tas d'ordures; puis, ce serait toujours de l'ouvrage de moins. En attendant, elle gardait seulement les mauvaises paies, les rouleuses, les femmes comme Mme Goudron, dont pas une blanchisseuse de la rue neuve ne voulait laver le linge, tant il puait. La boutique était perdue. » p292

 

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Mais nous pouvons aussi souligner les passages de sa vie, où les Hommes sont souvent les causes de ses changements d'humeurs, et de comportement.

Comme par exemple, lorsque Lantier l'abandonne, elle se ressaisit, et se met à travailler pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses deux garçons. Mais ce-même homme reviendra plus tard, avec pour but de détruire Gervaise, autant psychologiquement que physiquement, en étant toujours aux environs de la boutique de celle-ci; il est un point négatif dans la vie de Gervaise.

Puis il y a Coupeau, son second mari, avec lequel, elle va ouvrir la blanchisserie, un rêve devenu réalité aux yeux de Gervaise. Puis, ensemble, ils auront une petite fille, Nana. Mais lors d'un grave accident , il sombrera dans la fainéantise et l'alcool tout comme Lantier auparavant. Il entraînera Gervaise dans sa déchéance, et mourra peu de temps plus tard.

Enfin il y a Goujet, qui, lui est un bon parti pour Gervaise, et qui est amoureux d'elle. Il aura beau tenter de sortir Gervaise de cet engrenage négatif, rien n'y fera. Il travaille, il est sobre, et est très simple. C'est un modèle, un être inaccessible aux yeux de Gervaise -trop parfait-. Il est l'opposé de Lantier et Coupeau.

Gervaise aura eu une vie amoureuse pas vraiment heureuse, deplus ce sera seule qu'elle mourra.

Enfin, nous pouvons en conclure que Gervaise Macquart était au début du récit une femme respectable, jusqu'au moment où elle se laissera tomber dans la gourmandise, et la fainéantise. Ce qui la poussera à fermer sa blanchisserie, et à sombrer ensuite dans l'alcool. Elle mourra seule sans avoir eu une vie facile, ou pour tout autant avoir été heureuse très longtemps.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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II- La déchéance de Gervaise

 

a) Les causes de sa déchéance

 

La déchéance de Gervaise Macquart s'explique par plusieurs causes ; la principale étant l'alcoolisme.

Dans l'entourage de Gervaise, de nombreuses personnes sont touchées par l'éthylisme, en particulier Coupeau, le second mari de Gervaise. Son alcoolisme est dû à son accident du travail, puisqu'après son immobilisation durant plusieurs mois, la paresse l'a envahi et il a délaissé son travail, pour passer son temps à boire. On peut dire que la misère de son milieu social le pousse vers l'alcool : d'une certaine manière, boire lui permet d'adopter une insouciance par rapport à tous ses problèmes financiers et familiaux.

La faiblesse de Gervaise, dont les hommes abusent, la mènera également vers sa déchéance. Tout au long de sa vie, les hommes qui l'entourent vivent à ses crochets : Lantier, au début du roman vit grâce aux affaires de Gervaise qu'il la force à vendre, puis vit chez elle sans jamais la payer, profite de ses repas et de son logement ; Coupeau se fait choyer par sa femme, lors de sa convalescence, puis grâce au travail acharné de cette dernière il néglige son emploi et ne rapporte plus d'argent. Au final, le schéma traditionnel familial est inversé puisque ce n'est pas le père qui nourrit sa famille grâce à son travail mais bien Gervaise. Elle finira par vivre à crédit et ne remboursera jamais ses nombreuses dettes, ce qui la mettra dans une gêne par rapport à ses créanciers, dont Goujet qui l'aime secrètement. De plus, Gervaise possède un caractère très influençable, ce qui permet à certaines personnes de la manipuler. Nous pouvons ajouter à cela son sentiment d'impuissance : face aux hommes, à la déchéance de Coupeau, mais aussi à ses rivales, Gervaise se sent souvent incapable de lutter.

L'hérédité, le déterminisme, joue aussi un rôle important dans la chute de Gervaise : dans l'extrait qui suit, elle explique que son père la battait, et battra elle-même sa fille Nana.

« Je n'étais pas heureuse chez nous; le père Macquart, pour un oui, pour un non, m'allongeait des coups de pied dans les reins. » Le lecteur apprend également que son père buvait; on peut penser que la chute de Gervaise dans l'alcoolisme est encouragée par une image qu'elle a eut de son père lors de son enfance.

Enfin, tous ces éléments vont conduire Gervaise à un élément déclencheur qui marque le début de sa déchéance ; il s'agit d'un extrait du chapitre dix, où elle boit pour la première fois à l'Assommoir, un cabaret où Coupeau à l'habitude de venir boire avec ses amis. Lorsqu'elle le trouve attablé et ivre, alors qu'elle l'attendait pour sortir, Gervaise, furieuse, entre dans le bar. Elle finira par boire avec son mari et oublier sa colère. C'est le point de départ de son alcoolisme, puisqu'avant, elle ne buvait pas.

« Pendant qu'elle sirotait son anisette, elle eut tout d'un coup un souvenir, elle se rappela la prune qu'elle avait mangée avec Coupeau, jadis, près de la porte, lorsqu'il lui faisait la cour. En ce temps-là, elle laissait la sauce des fruits à l'eau-de-vie. Et, maintenant, voici qu'elle se remettait aux liqueurs. Oh ! Elle se connaissait, elle n'avait pas pour deux liards de volonté. On n'aurait eu qu'à lui donner une chiquenaude sur les reins pour l'envoyer faire une culbute dans la boisson. »[…]

« Qu'est-ce que vous buvez donc là , demanda-t-elle sournoisement aux hommes, l'œil allumé par la belle couleur d'or de leurs verres.

-Ça, ma vieille, répondit Coupeau, c'est le camphre du papa Colombe... Fais pas la bête, n'est-ce pas ? On va t'y faire goûter. »

Et lorsqu'on lui eut rapporté le verre de vitriol, et que la mâchoire se contracta, à la première gorgée, le zingueur reprit, en se tapant sur les cuisses :

« Hein ! Ça te rabote le sifflet !... Avale d'une lampée, chaque tournée retire un écu de six francs de la poche du médecin. »

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Au deuxième verre, Gervaise ne sentit plus la faim qui la tourmentait. Maintenant, elle était raccommodée avec Coupeau, elle ne lui en voulait plus de son manque de parole. »

Gervaise, qui prend goût à l'eau-de-vie de l'Assommoir, y retournera plusieurs fois par la suite, et se soûlera comme le fait Coupeau.

 

b) Les conséquences

 

Les différents causes présentées ci-dessus vont donc mener Gervaise à sa déchéance : sa chute dans l'alcoolisme, la paresse et la saleté. Le voisinage va peu à peu voir sa réputation dégringoler, et ne se privera pas de faire des commérages. Cela engendrera l'indifférence chez Gervaise vis-à-vis des gens qui l'entourent.

Tout d'abord, elle perd son sérieux, sa ponctualité, toutes ses qualités de travail qui faisaient d'elle une ouvrière modèle. Elle s'abandonne dans le désordre et ne s'occupe plus de sa boutique ; peu à peu ses employées s'en vont, faute de salaire. Puis elle est obligée de fermer sa blanchisserie. Tout le quartier se moque d'elle, et elle finit par ne plus y prêter attention.

\"Gervaise entra, embarrassée, sans oser même balbutier une excuse. Elle n'était plus exacte, ne venait jamais à l'heure, se faisait attendre dès huit jours. Peu à peu, elle s'abandonnait à un grand désordre.\" p288 \"Maintenant, Gervaise se moquait de tout. Elle avait un geste vague de la main pour envoyer coucher le monde. A chaque nouvel ennui, elle s'enfonçait dans le seul plaisir de faire ses trois repas par jour. La boutique aurait pu crouler, pourvu qu'elle ne fût pas dessous, elle s'en serait allée volontiers, sans une chemise. Et la boutique croulait, pas tout d'un coup, mais un peu matin et soir. Une à une, les pratiques se fâchaient et portaient leur linge ailleurs.\" p292   \"Tout le quartier pouvait la lâcher, ça la débarrasserait d'un beau tas d'ordures; puis, ce serait toujours de l'ouvrage de moins. En attendant, elle gardait seulement les mauvaises paies, les rouleuses, les femmes comme Mme Goudron, dont pas une blanchisseuse de la rue neuve ne voulait laver le linge, tant il puait. La boutique était perdue.\" p292

 

Coupeau termine sa vie entre l'Assommoir où il continue à boire et l'hôpital psychiatrique. Il y est soigné pour des syptomes inquiétants : des allucinations terrifiantes et des crises de spasmes. Après sa mort -peu pleurée, car Gervaise n'en a plus rien à faire- Gervaise a également des accès de folie. Elle meurt à petit feu, de faim, de froid, de misère. Elle mendie et tombe toujours plus bas, jusqu'à sa mort.

« Depuis ce jour [de la mort de Coupeau], comme Gervaise perdait la tête souvent, une des curiosités de la maison était de lui voir faire Coupeau. On n'avait plus besoin de la prier, elle donnait le tableau gratis, tremblant des pieds et des mains, lâchant de petits cris involontaires. Sans doute avait-elle pris ce tic-là à Saint-Anne, en regardant trop longtemps son homme. Mais elle n'était pas chanceuse, elle n'en crevait pas comme lui. Ça se bornait à des grimaces de singe échappé, qui lui faisaient jeter des trognons de choux par les gamins, dans les rues.

Gervaise dura ainsi pendant des mois. Elle dégringolait plus bas encore, acceptait les dernières avanies, mourait un peu de faim tous les jours. Dès qu'elle possédait quatre sous, elle buvait et battait les murs. On la chargeait des sales commissions du quartier. Un soir, on avait parié qu'elle ne mangerait pas quelque chose de dégoûtant; et elle l'avait mangé, pour gagner dix sous. M. Marescot s'était décidé à l'expulser de la chambre du sixième. Mais, comme on venait de trouver le père Bru mort dans son trou, sous l'escalier, le propriétaire avait bien voulu lui laisser cette niche. Maintenant, elle habitait la niche du père Bru.

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C'était là-dedans, sur de la vieille paille, qu'elle claquait du bec, le ventre vide et les os glacés. La terre ne voulait pas d'elle, apparemment.

Elle devenait idiote, elle ne songeait pas seulement à se jeter du sixième sur le pavé de la cour, pour en finir. La mort devait la prendre petit à petit, morceau par morceau, en la trainant ainsi jusqu'au bout dans la sacrée existence qu'elle s'était faite. Même on ne sut jamais de quoi elle était morte. On parla d'un froid et chaud. Mais la vérité est qu'elle s'en allait de misère, des ordures et des fatigues de sa vie gâtée. Elle creva d'avachissement, selon le mot des Lorilleux. Un matin, comme ça sentait mauvais dans le corridor, on se rappela qu'on en l'avait pas vue depuis deux jours ; et on la découvrit déjà verte, dans sa niche. »

 

C'est dans l'indifférence et la crasse qu'elle meurt, puisque sa mort permet à son entourage de se débarrasser d'elle. Gervaise qui était appréciée, douce et travailleuse finira donc sa vie comme une mendiante. Elle qui avait gravi peu à peu les échelons de sa profession les a redescendu très vite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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