Fischer von Erlach

Oeuvre de maturité de l'architecte autrichien Fischer von Erlach, l'église de Vienne dédiée à saint Charles Borromée, réalisée entre 1715 et 1737, représente non seulement l'apogée de ses conceptions architecturales, mais aussi un des ouvrages les plus importants et singuliers de l'architecture baroque autrichienne. A l'intérieur, comme dans le projet de la bibliothèque de cour de Vienne, datant de la même époque, l'architecte utilise un motif typiquement baroque : le plan elliptique, appliqué ici au vaisseau central, surmonté d'une très haute coupole, synthétisant la dilatation et la compression de l'espace architectural. Le net allongement de l'ensemble est à peine atténué par deux grandes chapelles latérales et par quatre autres chapelles, plus petites, situées sur les axes transversaux. La façade, très articulée dans son unité admirable, montre une variété de motifs stylistiques d'origines diverses : elle présente en effet un avant-corps hexastyle de facture classique, flanqué de deux colonnes colossales (citation des colonnes triomphales de la Rome impériale), en position avancée par rapport à la ligne de la façade, et bien plus élevées que les deux clochers bas et massifs qui la terminent. L'intérêt de Fischer von Erlach pour les solutions architecturales de Gian Lorenzo Bernini et de Francesco Borromini, admirées et étudiées au cours de ses longues années de séjour en Italie, est ici évident.

Dans le cadre d'un programme politique de rénovation architecturale et urbaniste de Vienne voulu par les Habsbourg, le projet pour un nouveau palais impérial, situé en dehors de la ville, aux environs de Schönbrunn, prend une signification particulière. La tâche est confiée en 1693 au jeune architecte autrichien Fischer von Erlach, rentré depuis peu d'un long séjour en Italie, et elle sera accomplie en 1711. Le modèle prédominant était alors le château de Versailles, auquel se plie effectivement le projet définitif de l'architecte. En effet, le palais est situé en terrain plat, au coeur d'un jardin; le pan central de la façade est en retrait par rapport aux deux corps de bâtiment latéraux, plus avancés, dont l'unité stylistique dérive des grandes fenêtres rythmées par d'immenses pilastres qui laissent entrer la lumière à l'intérieur. La vaste cour est délimitée sur les côtés par les bâtiments peu élevés des écuries et, vers l'entrée, par des bâtiments consacrés aux tâches administratives ou utilisés comme remises de véhicules. Mais ce que représente Schönbrunn dans l'histoire de l'architecture est toutefois lié au premier projet, de conception très différente, et jamais réalisé : le palais, situé sur une colline, aurait dû présenter une façade morphologiquement plus complexe, avec une exèdre centrale et deux ailes latérales interrompues au centre par un renfoncement. Au sommet du palais aurait dû s'élever le quadrige d'Apollon. Une série de vastes terrasses descendantes aurait relié le corps central à une entrée flanquée de deux colonnes triomphales, pour une évocation, riche en significations politiques, de l'architecture romaine impériale.