Devoir de Philosophie

GAUTIER (Théophile)

Publié le 17/01/2019

Extrait du document

gautier

GAUTIER (Théophile), écrivain français (Tarbes 1811-Neuilly 1872). Figure marquante de la vie littéraire du xixe s., associée à des images qui ont valeur de symbole (le gilet rouge d'Hemani, « le poète impeccable » dédicataire des Fleurs du Mal), Gautier est aujourd'hui souvent réduit à n'être plus qu'un romantique échevelé dont la carrière se termine en patriarche serein de l'art pour l'art. Il est vrai que la vie semble opposer le fougueux animateur du Doyenné toujours en quête d'un chahut au bibliothécaire particulier de la princesse Mathilde, personnage quasi officiel de l'intelligentsia impériale. Mais, à travers un tel parcours, l'analyse littéraire fait apparaître nombre de constantes dans une œuvre qui se situe moins par référence aux courants esthétiques que par une volonté de saisir l'essence de cette même esthétique.

 

Constance de l'inspiration, d'abord : admirateur d'Hoffmann, Gautier a débuté par un récit fantastique (la Cafetière, 1831), genre qu'il a cultivé tout au long de sa carrière, soit en de brefs contes (le Chevalier double, le Pied de Momie), soit dans des textes de plus d'ampleur (Avatar, Jettatura). Il ne serait pas difficile de trouver des traces de fantastique dans l'ensemble de l'œuvre, un fantastique moins hé aux sujets qu'à leur expression, un fantastique plus esthétique et ironique que gothique. Car, et c'est la seconde constante de Gautier, l'homme et son regard sont omniprésents : les récits de voyages (Tra los montes, 1843 ; Italia, 1852 ; Voyage en Russie, 1867), les essais (Histoire du romantisme, 1874, mais aussi déjà la « Préface » de Mademoiselle de Maupin, 1835), les textes esthétiques (les Beaux-Arts en Europe, 1856 ; l'Art moderne, 1856; Trésors d'art de la Russie ancienne et moderne, 1859) traduisent non seulement une position de principe mais encore et surtout un comportement. Il s'agit dans le même temps que l'on affirme le refus de l'utilité — et donc de l'engagement — de marquer la nature d'une relation inéluctable avec l'extérieur, relation qui s'établit par l'empathie du regard. Rien d'étonnant, dès lors, que l'art poétique de Gautier soit associé à la matière (l'argile, le marbre, le bronze, la couleur) : elle seule peut témoigner d'un

 

rapport subjectif à travers une permanence.

 

L'œuvre de Gautier s'attache surtout à fixer ce qui est : pas de spéculation métaphysique ni de vision surréaliste, mais une narration qui se donne pour seul but le plaisir de raconter, de bien raconter. Après le Roman de la momie (1858), le Capitaine Fracasse (1863) n'est pas, dans l'ordre du récit, différent du projet que traduisent les poèmes ciselés d'Émaux et Camées (1852) : ici et là, le sujet importe moins que les mots et leur agencement. D'où, parfois, une recherche formelle confinant à la préciosité. Fantaisie et esthétisme : le romantisme, même lorsqu'il a été conjuré (les Jeune-France, 1833), n'est jamais totalement absent de l'écriture de Gautier ; et, s'il ne flamboie plus, l'art pour l'art n'est jamais une doctrine de l'impassibilité. Au fond, Gautier pourrait bien être la conscience artistique d'un siècle dont il incarne en mineur (une grande partie de son œuvre s'élabore dans la presse) les multiples facettes, laissant à d'autres les premiers rôles.

Liens utiles