LUCOT (Hubert)

LUCOT (Hubert), écrivain français (Paris 1935). Après avoir publié dans diverses revues des « livres » brefs {Absolument, 1967 ; Jac Regrouper, 1968 ; Information, 1970), il semble renoncer au livre pour lui opposer le Graphe (1970-71), capable de faire coexister dans un espace synchronique les temps multiples de l'« acte écrivant » (action writing). Il compose cependant, en 1975, une version linéaire du Graphe. Effectuant des « coupes géologiques » croisées, il fait apparaître, sans les simplifier, les présences accumulées, stratifiées, éclatées, il rassemble lignes « infinies » et segments, pièces, sous-ensembles, sauvegardant leur complexité et leur aptitude à entretenir des relations : le réel est considéré dès l'origine comme un discours enchevêtré, non dit ou inaudible, qu'il faut décoder en permanence. Cette transcription linéaire d'un espace aussi foisonnant pose des problèmes syntaxiques particuliers, auxquels la phrase phanée (celle de Phanées les nuées} a donné une solution orchestrale. Dès lors, Lucot fait retour au livre avec Autobiogre d'A. M. 75 (1980), Phanées les nuées (1981). Le désir qui suscite son écriture n'a rien à voir avec un projet formaliste : il ne se complaît pas dans une machinerie de l'écriture qui fonctionnerait pour elle-même, donc à vide ; il voit dans l'œuvre qui s'écrit le seul lieu (multidimensionnel) où peut prendre sens et substance un réel qui n'en a plus, n'en avait ou n'en a pas encore, où scripteur et lecteurs peuvent vivre un vécu qui a tant de mal à l'être. Cette pratique se poursuit dans Langst (« la longue angoisse du langage »), publié en 1984 : Langst renonce à un certain appareil (ponctuation et typographie particulières, encadrés, schémas, tableaux récapitulatifs) que requéraient la polysémie et les « nombres » (rythmes) de Phanées les nuées ; l'utilisation répétée, répétitive, de techniques éprouvées bloquerait et un « nouveau vivre » et un « nouvel écrire » qui orientent et rendent possibles l’incessante attention au monde, l'interminable, provisoire et douloureuse coexistence avec le réel. Lucot a également publié de courts textes à tirage limité [Overdose, roman, 1976 ; Mê, 1979 ; le Dit des lacs, 1980).