MESLIER (Jean)

MESLIER (Jean), écrivain et philosophe français (Mazerny-en-Champagne 1664-Étrépigny 1729). Sur ce curé athée, les légendes ont longtemps couru, mais on commence à mieux connaître sa vie et son œuvre hors du commun. Fils d'un marchand, il entra au séminaire de Reims et devint curé de campagne, dans les Ardennes, alors ouvertes aux influences protestantes et foyer de jansénisme. Il prit la défense des paysans de sa paroisse contre le seigneur local et fut condamné pour ce fait par son évêque à un mois de retraite au séminaire. À l'exception de cette crise, la vie du curé d'Étrépigny semble calme et traditionnelle. En réalité, il consacra les loisirs que lui laissait sa charge à rédiger des œuvres philosophiquement radicales, que ce soit le Mémoire des pensées et sentiments de Jean Meslier ou l'annotation critique de la Démonstration de l'existence de Dieu de Fénelon. On ne connaît pas bien les sources et influences qui ont pu se trouver à l'origine de cette recherche qui pousse le cartésianisme dans le sens du matérialisme et mêle à la critique religieuse une vigoureuse remise en cause de l'ordre social. Meslier s'assura de la préservation et de la diffusion après sa mort de plusieurs copies de son mémoire. Des exemplaires circulèrent dans les milieux encyclopédiques et Voltaire publia un Extrait des sentiments de Jean Meslier, connu sous le titre de Testament de Meslier. Voltaire atténue l'athéisme de l'œuvre ainsi que son aspect social pour n'en retenir que le côté anticlérical. Cet extrait fut ensuite confondu avec le Bon Sens du baron d'Holbach, souvent réédité sous le nom de Meslier. D'autres œuvres polémiques lui furent attribuées par les milieux anticléricaux du xixe s. Le véritable mémoire fut publié à Amsterdam en 1864, par un libraire hollandais libre penseur, Rudolf Charles d'Ablaing Van Giessenberg, qui choisit de célébrer ainsi le bicentenaire de la naissance de l'auteur. Après le déiste diffusé par Voltaire, l'athée loué par les révolutionnaires et les anticléricaux, un troisième visage de Meslier apparaissait, le dénonciateur des injustices sociales dans lequel les militants socialistes et communistes ont trouvé un ancêtre.