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n'entend pas.

Publié le 31/10/2013

Extrait du document

n'entend pas. Il n'est pas indifférent. Pas absent. Et il donne des preuves, exubérantes parfois, qu'il est loin de ne prêter au monde qui l'entoure qu'une attention furtive. Car il lui arrive d'avoir de brusques accès d'expansivité. Alors plus tard, résigné devant les critiques que lui valait son impassibilité, il en fait un système; cela lui permet du moins de ne pas surprendre quand il en vient à cacher la spontanéité d'émotions qui sont à son honneur. « Louis, tu penses à autre chose «, lui disait souvent sa mère. Il lui répondra indirectement dans le cahier de réflexions et de maximes qu'il tenait, adolescent: « Vous ne dites pas ce que vous pensez, me dit-on. Veut-on dire par là que je sais me défendre? « On l'a présenté encore comme un velléitaire -- on l'a dit --, un rêveur, un utopiste. Peut-être, ou sans doute. Et le reproche lui est fait d'avoir poursuivi des chimères. Certaines chimères étant parfois de remarquables intuitions... Pourtant il est vrai qu'on observe souvent chez lui un décalage entre l'intention affichée et les moyens mis en oeuvre. Ce décalage ne sera pas toujours involontaire. Mieux que quiconque, il savait que la politique, c'est l'art de concilier le souhaitable et le possible. Et s'il était totalement maître de la vision, il était largement tributaire des autres pour en assurer l'exécution. Pour autant, il sait ce qu'il veut. Et généralement, rien ne le détourne de son objectif, même s'il sait donner du temps au temps. On a cru trouver une contradiction entre les surnoms dont l'affublait la reine Hortense qui parlait de lui, à la fois, comme d'un « doux entêté « et d'un grand dispensateur de « oui, oui «. En fait son « oui oui «, c'est un « oui, parle toujours, tu m'intéresses «... mais il n'abandonne jamais son idée. En réalité, c'est un tenace, un persévérant, ou même -- en apparence -- un besogneux, mais d'autant plus déterminé que rien ne paraît l'indiquer... C'est bien ainsi que le verra Renan: comme une « nature profonde, rêveuse, embarrassée, mais forte et obstinée, incapable d'être distraite de son idée fixe... Il avait la volonté inflexible du croyant, la gaucherie de l'obstiné renfermé à la manière d'un somnambule dans un monde fantastique, hanté dès lors de cette espèce d'hallucination du spectre napoléonien «. En tout cas, entre le fils et la mère, quelle complicité! Complicité à la mesure de la suspicion qui entourait la naissance de l'un, la conduite de l'autre, à la mesure des épreuves et des espérances partagées. Il l'adorait. Il la vénérait. Elle était tout pour lui. Il l'embrassait, la cajolait sans cesse. Jamais entre eux n'apparut le moindre nuage. Plus d'un demi-siècle après la mort d'Hortense, l'impératrice Eugénie en concevra encore comme une sorte de jalousie inavouée: « L'Empereur a toujours manifesté à l'égard de sa mère une dévotion extraordinaire. Je ne sais pas si elle la méritait à ce point «. Il est vrai qu'Eugénie n'eût probablement pas toujours apprécié la conversation et les idées de sa belle-mère. Politiquement, Hortense était assez éclectique, pour ne pas dire carrément syncrétiste. La France lui paraissait davantage compter que les régimes qui l'incarnaient. Et elle n'avait de prévention à l'égard de personne... C'est à elle sans doute que Louis Napoléon doit ce qualificatif d'« inclassable «, qui déplaît tant, à travers les siècles, à tous les microcosmes politiques. Spontanément, Hortense eût plutôt été légitimiste, de par son hérédité, de par sa formation, et parce que, tout compte fait, c'était dans ce milieu qu'elle trouvait le plus de ces gens bien élevés avec lesquels elle aimait vivre. Fille adoptive, en même temps que belle-soeur de Napoléon Ier, elle avait par la force des choses épousé la cause bonapartiste, qu'elle ne pouvait décemment pas renier. Mais sentimentale comme elle l'était, elle éprouvait aussi de la sympathie pour les républicains, proscrits comme elle. Ce n'est pas le moindre de ses paradoxes, mais c'est ainsi. Elle, la fille d'un guillotiné, avait des faiblesses pour les régicides... A Arenenberg, la liste des visiteurs est très révélatrice à cet égard, car peu à peu, une fois les passions apaisées, ce devint un lieu très fréquenté. On visitait Hortense. On la visitait comme on fait d'un musée, la maison recelant de surcroît quelques intéressants souvenirs. Et on la visitait avec une curiosité d'autant plus grande que son fils, s'il n'était pas encore le prétendant, pouvait -- sait-on jamais -- jouer ultérieurement un rôle. Auprès de l'ex-reine de Hollande se succédèrent ainsi les personnages les plus divers, dont les conversations ne purent qu'enrichir l'expérience et la culture du jeune prince: des bonapartistes, cela va sans dire, venus faire leurs dévotions. Mais des républicains aussi. Et des invités du meilleur monde légitimiste. Et puis des gens et des couples de toutes sortes, dont le mélange montre que les factions communiquaient assez bien entre elles: ainsi Chateaubriand et Mme Récamier firent-ils étape... De même la princesse de la Moskowa, la duchesse de Raguse, le comte Demidov, le baron Desportes, la comtesse Sermaise, Mme de Faverolles, le colonel Brade, Mme de Girardin, Casimir Delavigne, Alexandre Dumas, des peintres, des savants, des bannis... Les rencontres auxquelles pouvait donner lieu cette si large hospitalité paraissent, après coup, d'une assez irrésistible drôlerie. « Les princes du sang et les fils de régicides sont assis sur le même canapé, unis le plus obligeamment du monde dans les politesses estivales. Ainsi le fils de Michel Le Peletier va retrouver le fils du suicidé Le Bas et ces messieurs, sous le regard attendri d'Hortense de Beauharnais, parlent des immortels principes de 89 tandis que la grande-duchesse de Bade, un tricot à la main, sourit à la réunion des charmants jeunes gens qui pénètrent l'esprit du futur empereur de teintes révolutionnaires. « Dans ces lignes dues à Ferdinand Bac -- qui évoque une scène de 1827 dont fut probablement le témoin son père Charles Henri -- apparaît une nouvelle fois le nom de Philippe Le Bas qui, après Hortense, est robablement la personne qui aura le plus profondément marqué la formation de Louis Napoléon. C'était son précepteur depuis 1820. L'enfant bénéficiera ainsi de ses services de son douzième anniversaire jusqu'à a vingtième année. hoix inattendu s'il en est, et même stupéfiant. Et pourtant choix excellent, sinon franchement génial. ous les événements auxquels avait été mêlé le jeune prince, et ses pérégrinations, n'avaient pas eu, on s'en oute, les effets les plus heureux sur son éducation. Cette existence longtemps chaotique n'était guère propice l'étude, d'autant qu'on avait d'abord donné à l'enfant, en guise de précepteur, un homme, charmant au emeurant, l'abbé Bertrand, dont l'absence d'autodiscipline n'était pas du meilleur augure ni du plus édifiant xemple. Le roi Louis, tout éloigné qu'il fût, eut vent du climat de dissipation dans lequel on laissait s'ébattre son ejeton. Il menaça de le reprendre. Du coup, on se mit à chercher en toute hâte un remplaçant. Le général rouot -- auquel on avait d'abord songé -- ayant décliné l'offre, on se rabattit sur Le Bas. t avec Le Bas, effectivement, les choses allaient changer du tout au tout. ais quelle que fût l'ouverture d'esprit d'Hortense, il fallait quand même qu'il y eût urgence pour se satisfaire 'un éducateur doté d'un tel pedigree. hilippe Le Bas, né en 1794, n'est rien de moins que le fils d'un ami de Robespierre, qui s'était suicidé quelques eures après le 9 Thermidor pour lui-même échapper à la guillotine. Et comme si cela ne suffisait pas, sa mère 'était autre que la fille du menuisier Duplay, lui aussi fidèle de l'Incorruptible, et qui l'avait longtemps hébergé: lle-même fut enfermée, avant de vivre dans la misère. C'est, on peut le dire, d'un ménage de choc qu'est issu e nouveau précepteur. Philippe Le Bas avait tout pour devenir un républicain farouche. Il l'est. Franc-maçon, 'est de surcroît un homme austère, ombrageux, appliqué, jaloux dans ses convictions. e Bas a vingt-cinq ans en 1820. Il s'est engagé en 1813, a pris son congé au lendemain de Waterloo et, après voir enseigné à Sainte-Barbe, s'est retrouvé fonctionnaire à la préfecture de la Seine. Quel mobile a bien pu le ousser à accepter une telle mission, lui qui ne reniera jamais ses idées? Il va se charger pourtant d'assurer la ormation d'un prince exilé, sachant bien entendu qu'on nourrit pour son élève des ambitions de carrière fort peu ompatibles avec ses propres espérances. Sans doute y a-t-il là une illustration de l'ambiguïté des rapports entre la République et le bonapartisme, qui, face à un ennemi commun, éprouvent toujours beaucoup de mal à s'exclure l'un l'autre. Les temps étant ce qu'ils étaient, Le Bas se trouvait devant un dilemme: servir un Bourbon ou servir un Bonaparte. Ainsi s'explique sans doute sa décision. Le Bas sera congédié par la reine en 1827, non point parce que ses idées avaient fini par déplaire, mais tout simplement parce que son ménage était devenu encombrant, à un moment où les va-et-vient avec l'Italie s'étaient faits plus nombreux. Dans un âge où l'esprit se forme, où le comportement se dessine, où l'homme se bâtit, Louis Napoléon va être ainsi imprégné heure après heure, jour après jour, de l'idéal, de la philosophie, des thèses républicaines: jacobinisme, souveraineté du peuple, liberté, égalité, générosité, tels sont les principes qu'on lui inculque, sans parler d'une teinte d'athéisme. Il en sera profondément et durablement marqué. Hortense savait mieux que quiconque ce que Le Bas introduisait dans l'esprit de son fils. Cela n'était pas pour la gêner ou l'effaroucher. Elle était le témoin d'autant plus complaisant des emballements de Louis Napoléon qu'elle y était elle-même sujette. Encore que ce ne fût point toujours au même degré ou dans les mêmes omaines. Elle était probablement, par exemple, moins encline que lui à considérer Schiller comme une sorte e dieu, ayant subi trop d'épreuves pour ne pas avoir acquis une solide dose de réalisme... Et quand Louis apoléon rêvait tout haut de démocratie, se promettant de restituer le pouvoir au peuple, elle le mettait en arde ou, plus précisément, lui prédisait qu'il ne pourrait parvenir à ses fins. n tout état de cause, cette rencontre insensée avec Le Bas est, à n'en pas douter, une des clés de la ompréhension de cet esprit complexe qu'est Louis Napoléon. lus tard, l'ancien précepteur connaîtra une carrière exceptionnelle: professeur à l'École normale supérieure, il inira président de l'Institut. En dépit de l'amertume que lui avait causée son renvoi, il est patent qu'il continua de orter à son ancien élève un véritable amour paternel. Mais son engagement l'emporta sur ses sentiments. Il protesta publiquement contre le coup d'État et se mura dans une opposition résolue dont l'impératrice Eugénie ui fit davantage reproche que l'empereur lui-même. Le Bas devait paraître une dernière fois devant Louis Napoléon à une cérémonie de voeux où il conduisait une délégation es cinq Académies. Non seulement l'empereur lui fit bonne figure mais il parut bouleversé de ces retrouvailles. l avait aimé Le Bas et il ne faut pas prendre au pied de la lettre la plainte qui, un jour, lui échappa: « Ce que cet omme a pu m'ennuyer, c'est inimaginable! « e choix d'Hortense avait été un bon choix. Comme devait l'être quelques années plus tard celui d'Ernest avisse, retenu par le couple impérial pour enseigner l'histoire à leur enfant. Ce même Lavisse qui devait ltérieurement diriger une Histoire de France, où figurent des chapitres si cruels pour Louis Napoléon onaparte. Faut-il en conclure que la famille n'eut pas toujours de la chance avec ses précepteurs? On peut out aussi bien penser qu'elle avait plus d'ouverture d'esprit que certains d'entre eux n'avaient de econnaissance et de fidélité. e Bas parti, la phase d'éducation de Louis Napoléon sera terminée. Mais sa formation restera à parfaire. Ce ont les circonstances qui y pourvoiront. Les événements, mais aussi leurs conséquences... oujours est-il que lorsqu'on se penche sur toutes ces années, on perçoit combien vaine est la querelle sur la aissance de Louis Napoléon. Il est à l'évidence le fils d'Hortense... et de Philippe Le Bas, tant il est clair que ce ont là les deux personnes qui ont le plus contribué à en faire ce qu'il est devenu. ous la direction de Le Bas, Louis Napoléon aura accompli des progrès manifestes. Admis au Gymnasium « umanistique « d'Augsbourg -- ville où il résida, pendant la période scolaire, en compagnie du précepteur et de on épouse --, il ne cessera d'y améliorer son classement. Ce sont pour lui des années studieuses: 'adolescent s'éveille et s'accroche. Son professeur peut donner sa pleine mesure... Ses bons résultats scolaires e sont pas sans mérite, car il les obtient dans une langue qui n'est pas la sienne. Et même quand son classement n'est pas encore très flatteur, ses maîtres reconnaissent en lui de grandes qualités. Son bulletin de 1822 est éloquent: « N° 24; Prince Charles Louis Napoléon, fils de M. Le duc de Saint-Leu, né à Paris, appartenant à la religion catholique, âgé de 14 ans, cinq mois, doué de beaucoup de dispositions, au développement desquelles il a ravaillé avec zèle, de manière qu'il a fait des progrès très bons dans la langue allemande, bons dans la langue latine et l'arithmétique, assez bons dans la langue grecque et l'histoire, en général, donc, de bons rogrès. On doit louer beaucoup ses manières modestes vis-à-vis de ses condisciples, ainsi que le respect et la econnaissance avec lesquels il a accepté des leçons désagréables; il a le vingt-quatrième rang; ce qui l'a mpêché d'en obtenir un supérieur, ce sont les difficultés de la langue allemande dont il n'est pas encore aître. D'ailleurs, on le loue publiquement et il peut passer dans la classe supérieure. « es efforts lui seront, ultérieurement, très profitables. Certes, on le raillera pour son accent. Mais l'exil aura aissé aussi d'autres traces; Louis Napoléon parle quatre langues: le français, l'allemand, qu'il maîtrisera rogressivement, l'italien qu'il pourra entretenir lors des voyages répétés qu'il fait, adolescent, dans la éninsule, l'anglais dont l'exil aux Etats-Unis et cinq séjours en Angleterre lui donneront la familiarité. e Bas aura fait de Louis Napoléon un esprit méthodique, organisé, lui ayant inoculé la passion de l'étude et de a recherche, et le goût de l'écriture. Selon William Smith, Louis Napoléon disposait d'une tournure d'esprit et 'un sens critique qui auraient pu en faire un des plus grands historiens de son temps. Disons qu'il a de solides onnaissances scientifiques et techniques, servies par une bonne plume. Il est intelligent, cultivé, curieux, uvert. Le Bas a de quoi être fier de son oeuvre. uant à Hortense, Louis Napoléon lui doit tant -- et en est si visiblement conscient -- qu'on en arriverait à se emander si, tout au long de sa vie, il ne chercha pas moins à être fidèle à son oncle qu'à faire honneur à sa ère. e son côté, semble-t-il, Hortense éleva Louis Napoléon moins dans le culte de l'Empire que dans la conviction, la lumière de l'épopée impériale, qu'il avait une mission -- personnelle -- à assumer et accomplir. On veut ire par là qu'elle croyait sans doute moins à l'Empire, ou au bonapartisme, en tant que système politique, u'elle n'avait foi dans le destin de son fils. Sa propre destinée avait été exceptionnelle; il était normal qu'il en fût e même pour lui. a promiscuité des Bonaparte, l'Empire en général, ne lui avaient pas laissé que de bons souvenirs: « J'ai été rop malheureuse. Leur jalousie [celle des Bonaparte en face des Beauharnais] me faisait mourir de chagrin... « e Napoléon Ier, Hortense avait su discerner les limites. Dans les Mémoires qu'elle entreprend dix ans après la naissance de Louis et qui sont autant un recueil de souvenirs qu'une liste de préceptes estinés à son fils, ou plus exactement à ses deux fils, elle a ces lignes cruelles: « Napoléon, l'auteur de notre élébrité, a sans doute écrasé des peuples sous le poids de son ambition, mais il a suscité de magnifiques spérances chez tous les pauvres et d'étonnantes admirations partout. Je l'ai connu dans sa force et dans ses

« Les rencontres auxquelles pouvaitdonnerlieucette silarge hospitalité paraissent, aprèscoup,d'uneassez irrésistible drôlerie.«Les princes dusang etles filsderégicides sontassis surlemême canapé, unisleplus obligeamment dumonde danslespolitesses estivales.Ainsilefils deMichel LePeletier varetrouver lefils du suicidé LeBas etces messieurs, sousleregard attendri d'Hortense deBeauharnais, parlentdesimmortels principes de89tandis quelagrande-duchesse deBade, untricot àla main, souritàla réunion descharmants jeunes gensquipénètrent l'espritdufutur empereur deteintes révolutionnaires.

» Dans ceslignes duesàFerdinand Bac—qui évoque unescène de1827 dontfutprobablement letémoin son père Charles Henri—apparaît unenouvelle foislenom dePhilippe LeBas qui,après Hortense, est probablement lapersonne quiaura leplus profondément marquélaformation deLouis Napoléon.

C'était son précepteur depuis1820.L'enfant bénéficiera ainsideses services deson douzième anniversaire jusqu'à sa vingtième année. Choix inattendu s'ilenest, etmême stupéfiant.

Etpourtant choixexcellent, sinonfranchement génial. Tous lesévénements auxquelsavaitétémêlé lejeune prince, etses pérégrinations, n'avaientpaseu,ons'en doute, leseffets lesplus heureux surson éducation.

Cetteexistence longtemps chaotiquen'étaitguèrepropice à l'étude, d'autant qu'onavaitd'abord donnéàl'enfant, enguise deprécepteur, unhomme, charmant au demeurant, l'abbéBertrand, dontl'absence d'autodiscipline n'étaitpasdumeilleur augurenidu plus édifiant exemple.

LeroiLouis, toutéloigné qu'ilfût,eut vent duclimat dedissipation danslequel onlaissait s'ébattre son rejeton.

Ilmenaça delereprendre.

Ducoup, onsemit àchercher entoute hâteunremplaçant.

Legénéral Drouot —auquel onavait d'abord songé—ayant décliné l'offre,onserabattit surLeBas. Et avec LeBas, effectivement, leschoses allaient changer dutout autout. Mais quelle quefûtl'ouverture d'espritd'Hortense, ilfallait quand mêmequ'ilyeût urgence poursesatisfaire d'un éducateur dotéd'untelpedigree. Philippe LeBas, néen1794, n'estriendemoins quelefils d'un amideRobespierre, quis'était suicidé quelques heures aprèsle9Thermidor pourlui-même échapper àla guillotine.

Etcomme sicela nesuffisait pas,samère n'était autrequelafille dumenuisier Duplay,luiaussi fidèle del'Incorruptible, etqui l'avait longtemps hébergé: elle-même futenfermée, avantdevivre dans lamisère.

C'est,onpeut ledire, d'unménage dechoc qu'est issu le nouveau précepteur.

PhilippeLeBas avait toutpour devenir unrépublicain farouche.Ill'est.

Franc-maçon, c'est desurcroît unhomme austère, ombrageux, appliqué,jalouxdanssesconvictions. Le Bas avingt-cinq ansen1820.

Ils'est engagé en1813, apris son congé aulendemain deWaterloo et,après avoir enseigné àSainte-Barbe, s'estretrouvé fonctionnaire àla préfecture delaSeine.

Quelmobile abien pule pousser àaccepter unetelle mission, luiqui nereniera jamaissesidées? Ilva secharger pourtant d'assurer la formation d'unprince exilé,sachant bienentendu qu'onnourrit poursonélève desambitions decarrière fortpeu compatibles avecsespropres espérances.

Sansdoute y a-t-il làune illustration del'ambiguïté desrapports entrelaRépublique etlebonapartisme, qui,face àun ennemi commun, éprouvent toujoursbeaucoup demal às'exclure l'unl'autre.

Lestemps étantcequ'ils étaient, Le Bas setrouvait devantundilemme: servirunBourbon ouservir unBonaparte.

Ainsis'explique sansdoute sa décision.

LeBas sera congédié parlareine en1827, nonpoint parce quesesidées avaient finipar déplaire, mais toutsimplement parcequesonménage étaitdevenu encombrant, àun moment oùles va-et-vient avec l'Italie s'étaient faitsplus nombreux. Dans unâge oùl'esprit seforme, oùlecomportement sedessine, oùl'homme sebâtit, Louis Napoléon vaêtre ainsi imprégné heureaprèsheure, jouraprès jour,del'idéal, delaphilosophie, desthèses républicaines: jacobinisme, souveraineté dupeuple, liberté,égalité, générosité, telssont lesprincipes qu'onluiinculque, sans parler d'uneteinte d'athéisme.

Ilen sera profondément etdurablement marqué. Hortense savaitmieux quequiconque ceque LeBas introduisait dansl'esprit deson fils.Cela n'était paspour la gêner oul'effaroucher.

Elleétait letémoin d'autant pluscomplaisant desemballements deLouis Napoléon qu'elle yétait elle-même sujette.Encorequecene fûtpoint toujours aumême degréoudans lesmêmes domaines.

Elleétait probablement, parexemple, moinsencline queluiàconsidérer Schillercommeunesorte de dieu, ayant subitropd'épreuves pournepas avoir acquis unesolide dosederéalisme...

Etquand Louis Napoléon rêvaittouthaut dedémocratie, sepromettant derestituer lepouvoir aupeuple, ellelemettait en garde ou,plus précisément, luiprédisait qu'ilnepourrait parvenir àses fins. En tout étatdecause, cetterencontre insenséeavecLeBas est,àn'en pasdouter, unedesclés dela compréhension decet esprit complexe qu'estLouisNapoléon. Plus tard, l'ancien précepteur connaîtraunecarrière exceptionnelle: professeuràl'École normale supérieure, il finira président del'Institut.

Endépit del'amertume queluiavait causée sonrenvoi, ilest patent qu'ilcontinua de porter àson ancien élèveunvéritable amourpaternel.

Maissonengagement l'emportasurses sentiments.

Il. »

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