Devoir de Philosophie

Enfants terribles (les). Roman de Jean Cocteau (analyse détaillée)

Publié le 23/10/2018

Extrait du document

cocteau

Enfants terribles (les). Roman de Jean Cocteau (1889-1963), publié à Paris chez Grasset en 1929. Film de Jean-Pierre Melville en 1950.

 

Provocateurs, cruels, mais aussi empreints de sensibilité et de poésie, les Enfants terribles mêlent à la peinture de l'adolescence quelques-uns des thèmes récurrents de la mythologie personnelle de l'auteur. Au cours des années vingt, profondément affecté par la mort de Raymond Radiguet, Cocteau, qui a abusé de la drogue, puis subi une cure de désintoxication, aurait écrit son roman à la clinique en moins d'un mois. Voici pour la part

autobiographique qui se confond, comme toujours chez celui que la critique a appelé l'« enfant gâté du siècle », avec la légende.

 

Première partie. Les jeux du collège sont parfois violents, comme les sentiments. Gérard aime Paul, qui aime Dargelos. Un jour d'hiver, Paul -quatorze ans - reçoit en plein cœur une boule de neige (chap. I ). C'est le « chef », Dargelos, qui l’a lancée. Gérard ramène Paul chez lui. Sa sœur, Elisabeth - seize ans - le soigne avec un rare dévouement (2). On apprend que Dargelos a provoqué une véritable révolution à l’école en bravant le proviseur (3). Cependant, la mère d’Bisabeth et de Paul meurt (4). D’abord recueillis par un onde, les trois enfants sont emmenés au bord de la mer (5), puis livrés à eux-mêmes. Ils retrouvent leur appartement parisien, coupé du monde. Ils le peuplent de leurs rêves et de leurs souvenirs : c'est leur trésor (6-7). Paul a définitivement abandonné ses études (8) ; sa sœur, devenue modèle, a rencontré une jeune couturière, Agathe (9-10).

 

Deuxième partie. Trois ans ont passé. Les sentiments ont évolué. Les passions se sont déplacées. Bisabeth épouse Michaël, un jeune et riche sportif qui se tue accidentellement juste après la cérémonie du mariage (II). Le trio se reforme (12). Agathe le rejoint Elisabeth, qui veut continuer à régner sur son entourage, commet alors un triple mensonge. Elle fait croire à Paul, qui est maintenant amoureux d’Agathe, que celle-ci aime Gérard, et elle persuade ce dernier qu'Aga-the l’aime (13). La tragédie s’installe en même temps que se forment le couple bourgeois Gérard-Agathe et le couple incestueux Élisabeth-Paul (14). Dargelos reparaît et relance dans l'intrigue non une boule de neige mais une boule de poison (15). Cette fois-ci, Paul en meurt Bisabeth se suicide ( 16).

 

Le non-conformisme, qui a été l'arme à la fois mondaine et esthétique des diverses avant-gardes auxquelles l'auteur de Parade (1917) avait déjà largement participé, réapparaît en force dans le choix des thèmes : homosexualité, toxicomanie, vol, inceste. Comme dans les *Faux-Monnayeurs de Gide, toutes les perversions de la jeunesse

cocteau

« semb lent réunies à plaisir pour cho­ quer le lecteur adulte.

Dès le début du livre, l'élève Darge­ los apparaît auréolé d'insolence et de beauté.

C'est le «coq du collège ».

La métaphore n'est pas innocente .

On y reconnaît l'étymologie consonantique que l'auteur lui-même attribuait à son nom : Coc-teau.

C'est par lui que le scandale arrive.

C'est lui qui se révolte contre l'ordre petit-bourgeois, qui déclenche la fatalité dont la boule de neige puis la boule d'opium sont l'emblème funeste.

C'est lui encore qui annonce les jeux de l'amour et de la mort.

Mais pour Élisabet h, Paul et bientôt Agathe, la vie elle-m ême est­ elle autre chose qu'un jeu ? Oisifs, vivant en marge des réalités quotidien­ nes, à l'abri des soucis matériels - d'abord pauvres, ils sont entretenus par un médecin, un oncle lointain; puis le mariage d'Élisabeth les installe définitivement dans l'opulence-, ils ne se préoccupent que de leur "trésor».

Constitué d'objets fétiches apparem­ ment sans intérêt, celui-ci est à la fois le symbo le de .

leur moi le plus secret et du territoire sacré autou r duquel s'organise un autre univers, celui de l'imagination, de l'irréel, de la magie : sans qu'ils s'en doutent, la pièce (cham bre ou espace scénique?) qu'ils occupaient " se balanc[e] au bord du mythe"· Plus proches du conte fantastique que du roman d'analyse, les Enfants ter­ ribles mettent donc en scène une sorte de quête mystérieuse où s'accumulent des épreuves destinées à écarter les pro­ fanes et à assurer la cohésion des fidè­ les.

Le désordre, matériel et affectif, est érigé en règle absolue.

Le vol est un rite initiatique parmi d'autres.

La folie, sans laquelle il n'y a pas de féerie possi­ ble, devient l 'ob jet d'un culte dont Éli­ sabeth, vierge souveraine, est la prê­ tresse maudite.

Longtemps nié, repoussé par la magie de l'art ou du langage (la mort de la mère s'est inscrite dans la fable ; celle de Michaël, transp osition de la mort d'Isadora Duncan , semble n'être qu 'une allégo­ rie), le poids du destin demeure omni­ présent et donne au récit la structure classique d'une tragédie antique.

Malgré les lazzis, un e préciosité cer­ taine dans les mots d'auteur(« Cessant d'être une fille, et devenant une jeune fille , Élisabeth glissait de l' âge où les garçons se moquent des filles à l'âge où les jeunes filles émeuvent les gar­ çons "), ce cou rt roman témoigne du goût de Jean Cocteau pour une psycho­ logie symbolique dont les figures de la mythologie grecque fourniront , d 'Œdipe à Orphée, les plus beaux modèles.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles