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FABLES de Jean de La Fontaine (analyse détaillée)

Publié le 21/10/2018

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FABLES choisies mises en vers.
Recueils poétiques de Jean de La Fontaine (1621-1695), publiés à Paris chez Denis Thierry ou chez Claude Barbin de 1668 à 1693.
 
Le premier recueil de Fables paraît en 1668. Il contient les six premiers livres, et s'ouvre sur une Préface qui défend le genre de la fable « mise en vers », suivie d’une « Vie d'Ésope le Phrygien ». Le premier recueil offre bon nombre des fables les plus connues, en puisant largement dans le fonds d’Ésope et de Phèdre : on peut citer pour le seul premier livre, \"la Ggale et la Fourmi” (I, I ), \"le Corbeau et le Renard” (1. 2). \"La grenouille qui se veut faire aussi grosse que le bœuf (1, 3), \"le Rat de ville et le Rat des champs\" (I, 9), \"le Loup et l’Agneau\" (I, 10). \"le Renard et la Cigogne\" (I. 18) ou \"le Chêne et le Roseau\" (I. 22 et dernière). Il faudrait citer encore “le Renard et le Bouc\" (III. 5), “le Renard et les Raisins\" (III, 11), \"le Pot de terre et le Pot de fer\" (V, 2) ou \"le Laboureur et ses enfants\" (V, 9), sans oublier \"le Lièvre et la Tortue\" (VI, 10), \"le Soleil et les Grenouilles\" (VI. 12) ou \"la Jeune Veuve” (VI, 21) ; et ce ne sont que quelques titres sur les 124 fables de ce premier recueil. La structure de l'ensemble est équilibrée : chaque livre compte une vingtaine de fables en moyenne (22 pour I et IV, 20 pour II. 18 pour III, 21 pour V et VI). Les fables liminaires apportent souvent une réflexion sur l’apologue (\"Contre ceux qui ont le goût difficile”, II, I ; \"le Meunier, son Fils et l’Âne”, III, I : \"le Pitre et le Lion\", “le Lion et le Chasseur\", VI, I et 2) : une alternance est sensible entre les fables qui mettent en scène les animaux
et celles qui ont pour acteurs des hommes, avec parfois de longues séquences (par exemple, dans
 
I. I -10 pour les animaux et 11-17 pour les hommes) ; toutefois les fables animales sont deux fois plus nombreuses.
 
Le deuxième recueil paraît en 1678 chez Denis Thierry (t III, livres I et II, qui sont les actuels livres VII et VIII) et en 1679 chez le même (LIV, livres III, IV, V, qui sont les actuels livres IX X et XI). Dédié à Mme de Montespan, il semble nettement infléchir le ton : l’inspiration se diversifie, en puisant notamment dans la tradition orientale (Pilpay, le Livre des lumières, que Gaulmin avait tradurt en 1644). La Fontaine lui-même souligne ces inflexions dans un bref Avertissement où il défend la « diversité » dont il veut faire preuve. Les livres sont moins équilibrés, avec de larges écarts : 27 fables pour le livre VIII, 9 pour le livre XI, avec une fluctuation de 15 (livre X), 18 (livre VII) ou 20 (livre IX). La diversité est rendue sensible par l'alternance resserrée des fables animales et des fables humaines (jamais plus de trois à la suite) ; le livre X semble centré sur les rapports difficiles entre les hommes et les animaux, et sur leur ressemblance (qui est une clé essentielle de toute poétique de la fable) ; \"l'Homme et la Couleuvre\" (X I), \"le Loup et les Bergers\" (X, 5). \"Discours à M. le duc de La Rochefoucauld\" (X 14). Les tons sont eux aussi plus contrastés : le sombre récit des \"Animaux malades de la peste\" (VII, I ) est suivi, par exemple, du \"Mal marié\" (VII, 2), dont le ton amusé évoque plutôt les *Contes. On retrouve les fables réflexives, telles que \"le Pouvoir des fables\" (VIII, 4), “le Dépositaire infidèle” (IX, I) ; le propos s’éloigne même parfois de la simple fable, comme dans le fameux \"Discours à Mme de La

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« Sablière" (non numéroté, à la fin du livre IX), ou bien la fable elle-même tend à s'allonger (90 vers pour "l'Homme et la Couleuvre" ; 94 pour "le Paysan du Danube", Xl, 7).

Un certain lyrisme point plus souvent et plus nettement que dans le premier recueil : "Ti reis et Amarante" (VIII, 1 3), "les Deux Pigeons" (IX, 2), "le Songe d'un habi­ tant du Mogol" (Xl, 4).

L'épilogue du livre Xl semble fermer définitivement ce volet de l'inspi­ ration lafontainienne, en encourageant d'autres « favoris » des Muses à reprendre le flambeau et à suivre le « chemin » ouvert par le fabuliste.

Pourtant.

le livre Xli paraît bien quatorze ans plus tard, en 1693 (avec la date de 1694, alors qu'il est achevé d'imprimer au 1er septembre 1693) chez Claude Barbin : présenté à l'origine comme le « septième » livre des Fables, il est donc placé dans la continuité directe du premier recueil (refermant ainsi la parenthèse des fables « pour adultes» dédiées à l'ancienne favorite du roi).

De fait, il est adressé au duc de Bourgogne, qui n'est autre que le fils du Grand Dauphin, à qui était dédié le recueil de 1668.

La Fontaine y renoue donc apparemment avec la stricte tradi­ tion pédagogique de la fable.

Mais ce livre ultime apparaît en fait comme la synthèse de son art : les 29 fables qui le composent retrouvent à la fois la tradition du premier recueil ("le Loup et le Renard", Xli, 9, "l'Aigle et la Pie", 1 1, "la Forêt et le Bûcheron", 16) et l'inspiration du recueil de 1678 ("le Cerf malade", 6, "le Corbeau, la Gazelle, la Tortue et le Rat", 15, "le Renard anglais", 23).

Quatorze pièces avaient déjà été publiées dans les années précédentes ( 14-23 figuraient dans les Œuvres de Maucroix et de La Fontaine, 1 685 ; 1 , 3 et 4 avaient paru dans le Mercure galant, 12 avait été dédiée au prince de Conti en 1688).

La veine des Contes est illustrée par "Belphégor'' (27) et "la Matrone d'Éphèse" (26), et l'on retrouve le « style héroïque» d'Ado­ nis dans "Daphnis et Alcimadure" (24) ou "les Filles de Minée" (28).

Enfin deux fables présen­ tent· une somme de la réflexion poétique des Fables : la première ("les Compagnons d'Ulysse") rappelle les rapports ambigus de l'homme et de l'animal et la demière ("le juge arbitre, l'Hospita­ lier et le Solitaire") marque l'aboutissement d'une sagesse longuement mûrie par l'œuvre et la vie du poète.

Œuvre de la maturité du plus grand poète du xvne siècle, les Fables sont l'aboutissement d'un art et d'une culture ancrés en profondeur dans de multiples traditions issues de l'huma­ nisme.

L'humilité apparente de leur titre, qui signale une simple mise en forme métrique, est le premier hom­ mage du poète à la tradition qui nour­ rit le genre littéraire qu'il a choisi.

Le genre lui-même est le plus humble de la hiérarchie, situé aux confins de l'exercice scolaire des premières années d'apprentissage et de la technique des emblèmes : en aucun cas les options initiales du fabuliste ne laissaient pré­ sager le chef-d'œuvre qui allait naître de ces choix.

La tradition pédagogique réservait en effet une place de premier plan à la fable, qui est à la fois porteuse d'une morale pratique et exercice d'écriture.

On lisait Ésope pour apprendre les rudiments du grec, ainsi que Phèdre pour le latin.

L'érudit Nevelet avait recueilli les divers fabulistes en 1610, et son recueil était encore édité en 1660.

D'autre part, le canevas traditionnel offert par les situations des fables les plus connues pouvait servir de départ aux exercices scolaires d'amplification (la « chrie ») ; c'est à ce titre que "la Cigale et la Fourmi" figure en tête des Progymnasmata (exercices rhétoriques) du rhéteur grec Aphtonius.

L'élève y apprend à utiliser les figures de mots et de style, à amplifier et à particulariser les « circonstances >>, et la pédagogie jésuite des xvie et xvue siècles en fait encore grand usage : La Fontaine tra­ duit d'ailleurs une fable du père Commire ("l'Amour et la Folie", XII, 14), qui était un de ces grands pédago­ gues jésuites.

Fénelon proposera ce type d'exercice à son illustre élève, le duc de Bourgogne, qui est le dédica­ taire du livre XII des Fables.

La critique a aussi insisté sur la tradition de l'emblème (G.

Couton) qu'il faut rechercher derrière la fable ; l'illustra­ tion même des Fables (gravures de François Chauveau, qui avait déjà illus-. »

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