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FENELON - LETTRE A L'ACADÉMIE.

Publié le 05/03/2011

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Lettre a l'Académie. — Historique. — Analyse de la Lettre à l'Académie. — Étude littéraire : les théories et les jugements de Fénelon.

Historique. — Fénelon appartenait depuis vingt ans à l'Académie française lorsqu'il composa un charmant petit livre pour la savante compagnie. Les motifs qui l'amenèrent à récrire sont assez curieux, car cette Lettre fut une œuvre de circonstance. Le 9 novembre 1713, M. Dacier avait succédé à Régnier-Desmarais en qualité de secrétaire perpétuel. Cette élection était un véritable événement dans le monde de la littérature. En effet, le nouveau secrétaire et sa femme, absolument passionnés pour les anciens dont ils avaient traduit nombre d'ouvrages, brûlaient de renouveler avec les partisans des modernes la lutte fameuse des La Bruyère et des Boileau contre les Perrault, les Fontenelle et les Charpentier. Prêt à relever le défi, M. de La Motte tenait en réserve une traduction rivale de l'Iliade qu'il allait lancer dans le public deux mois plus tard. Et, de nouveau, chacun se disposait à batailler sur cette question, éternellement intéressante mais éternellement insoluble, de la supériorité des anciens ou des modernes.

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« ne sais quoi de court, de naïf, de hardi, de vif et de passionné ».

Il blâme en un mot, discrètement certes, maissans conteste, l'excès delà noblesse et du purisme qui fut si grand sous les règnes de Louis XIII et de Louis XIV.Pour remédier à cette pauvreté de notre langue, qu'on ressuscite des locutions anciennes; qu'on fasse desemprunts intelligents aux patois des provinces ou aux langues étrangères; qu'on forge des mots composés! Le toutsera d'agir avec discernement et d'être aussi « sobre » que « précautionné »: on parviendra, de la sorte, à rendrenotre idiome plus « abondant» (C.

3). S'élevant à des choses plus dignes d'intérêt et risquant des opinions moins discutables, l'auteur indique comment ilvoudrait que l'Académie composât un traité de Rhétorique.

On y résumerait « les plus beaux préceptes d'Aristote, deCicéron, de Quintilien, de Lucien, de Longin », et, ne cueillant qui « la fleur de la plus pure antiquité », on ferait « unouvrage court, exquis, délicieux ».

Fénelon ne se dissimule point que les Grecs ou les Romains furent favorisés parles circonstances en ce qui concerne l'art oratoire ; car chez eux « tout dépendait du peuple, et le peupledépendait de la parole ».

Néanmoins, les avocats et les prédicateurs modernes, dont il critique les défauts après LaBruyère, Racine et Boileau, pourraient avoir une éloquence plus « sérieuse » et plus «efficace ».

Qu'ils lisent saintAugustin et qu'ils apprennent de lui à parler avec familiarité, avec grâce, avec véhémence! Qu'ils se mettent àl'école de Démosthène bien supérieur à Cicéron, trop redondant et trop « fleuri » ; car, s'oubliant lui-même poursonger uniquement à la patrie, l'auteur* des Philippiques « ne cherche point le beau », mais « le fait sans y penser »! Dédaigneux de la déclamation et des pointes, l'orateur gravera dans son esprit cette maxime : « L'homme digned'être écouté est celui qui ne se sert de la parole que pour la pensée, et de la pensée que pour la vérité et la vertu.» Ainsi faisait l'adversaire de Philippe; ainsi firent également les Pères de l'Église, auxquels il n'a manqué qu'unelangue moins rude pour être des orateurs merveilleux (C.

4). « Une bonne Poétique ne me paraîtrait pas moins à désirer qu'une Rhétorique », dit ensuite Fénelon.

La poésie est,en effet, « plus sérieuse que le vulgaire ne le croit».

Elle a été, dès les premiers âges du monde, l'auxiliaire de lareligion, et, vainqueurs de la barbarie, les poètes méritèrent partout le titre de législateurs.

Il faut donc aimer lapoésie, qui est « la parole animée par les vives images, par les grandes figures, par le transport des passions et parle charme de l'harmonie ».

Il faut chérir l'homme inspiré qui pousse les hommes vers la sagesse, la vertu et lareligion.

Après ces réflexions générales, l'auteur aborde l'examen de la versification française.

Aucun de nos poètes,selon lui, ne peut être absolument parfait.

La cause en est cette tyrannie de la rime qu'il est malheureusementimpossible de secouer et qui contraint nos meilleurs écrivains à insérer dans leur « discours» soit des «tours forcés», soit des «épithètes décousues ».

Il est regrettable que Ronsard n'ait point su borner son ambition; car il n'avaitpas tort de vouloir « enhardir notre poésie » et « dénouer notre versification naissante ».

Les anciens, moins gênésque nous par des entraves, arrivaient plus facilement, grâce à « des inversions fréquentes », aux « belles cadences», à la « variété » et aux « expressions passionnées ».

Pour nous le faire sentir, Fénelon accumule des exemplestirés d'Homère, de Virgile et d'Horace.

Il nous montre chez eux la « naïveté » et « l'émotion » bien préférables aux «traits subtils et raffinés d'un bel esprit ».

Et il termine cet aperçu en définissant le but que doit se proposer unpoète : « Le beau, dit-il, qui n'est que beau, c'est-à-dire brillant, n'est beau qu'à demi : il faut qu'il exprime lespassions pour les inspirer; il faut qu'il s'empare du cœur pour le tourner vers le but légitime d'un poème.

» (C.

5). Fénelon n'hésite pas ensuite, quoique prélat, à parler du théâtre sans colère et sans mépris.

Il ne souhaite pas que« l'on perfectionne de tels spectacles » ; mais, cette restriction faite, il indique comment on pourrait lesperfectionner.

Dans la Tragédie, qui représente « les grands événements excitant de violentes passions », le tortdes poètes est d'accorder une trop large place à l'amour profane.

Racine et Corneille nous ont montré des «héroslangoureux» dont les « soupirs » sont « ornés de pointes » et dont la douleur s'exprime par « des espècesd'épigrammes ».

L'auteur n'admet point « ce désespoir ampoulé et fleuri» et prétend que jamais un hommesérieusement affligé « ne parla un langage si pompeux et si affecté ».

Il reproche aussi à nos tragiques « une vaineenflure », qui lui gâte le récit de Théramène dans Phèdre, le monologue d'Emilie dans Cinna.

Nous sommes tellementéloignés de la nature et delà vérité que Corneille a peint des Romains plus majestueux que dans l'histoire.

Revenir àla simplicité d un Sophocle, bannir l'amour profane, éviter les concetti et la fausse élégance, voilà le devoir d'un bonpoète tragique ainsi que l'idéal de Fénelon (C.

6). La Comédie « représente les mœurs des hommes dans une condition privée » : elle doit, en conséquence, n'avoirpoint le ton élevé de la tragédie.

Comme si le genre de Thalie méritait moins l'attention d'un évêque, notre critiquene s'attarde point beaucoup à son sujet.

Il laisse voir seulement ses préférences pour « la délicatesse, la naïvetéinimitable », « le dramatique vif et ingénu » du poète des Adelphes.

Selon lui, Aristophane écrivit des «farces » pouramuser le peuple; Plaute a des plaisanteries trop « basses »; Molière lui-même, malgré la force de ses peinturesmorales, « abandonne le vraisemblable » pour charmer les gens du parterre; imite « le badinage de la comédieitalienne », et donne « un tour gracieux au vice, avec une austérité ridicule et odieuse à la vertu ».

Point decomique puissant, mais parfois trivial ! Un comique délicat et tempéré! (C.

7). Sans transition d'aucune sorte, Fénelon passe à l'esquisse d'un traité sur l'Histoire.

Rien n'est plus important quecette science.

Elle « montre les grands exemples », « fait servir les vices mêmes- des méchants à l'instruction desbons », « débrouille les origines » et « explique par quel chemin les, peuples ont passé d'une forme de gouvernementà une autre ».

Instituteur de morale et de politique, le véritable historien « n'est d'aucun temps ni d'aucun pays ».Impartial, également éloigné de la satire et de la flatterie, dédaigneux des faits stériles qui sont « le squelette del'histoire », il se préoccupe avant tout de « l'ordre », non point chronologique, mais philosophique et moral; il décritexactement « le détail des mœurs » pour chaque siècle, qu'il s'agisse des Romains ou des Francs; il ne recherchedans sa manière ni « les épithètes superflues »,ni «les autres ornements du discours », et leur préfère « une nudité»de style « noble et majestueuse ».

Fénelon achève ce chapitre en montrant par une rapide revue des historiens. »

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