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Fiche de lecture: La Guerre des Enfants de Stéphane Audoin-Rouzeau

Publié le 16/08/2012

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En définitive, l’ouvrage de Stéphane Audoin-Rouzeau nous a permis de constater l’ampleur de la propagande mise en œuvre par le gouvernement pour encadrer l’enfance en temps de guerre. Un tel travail témoigne donc de l’importance qu’occupe l’enfant dans la société de guerre. De la même manière que des exemples de soldats ont été dressés pour influencer les hommes au front, l’image de l’enfant héroïque est destinée à encourager les enfants à agir de façon aussi exemplaire que lui. Le gigantisme de la propagande destinée aux enfants n’aura pas été sans effet, puisque la guerre reste omniprésente dans les consciences et le sentiment patriotique a pu atteindre son plus haut point à cette période. Enfin, l’ouvrage de Stéphane Audoin-Rouzeau constitue également une explication quant au passage à la Seconde Guerre Mondiale, puisque c’est cette génération formatée et habituée à la violence qui sera concernée par les événements des années 30-40. La Guerre des Enfants est un ouvrage complet qui informe très bien sur le sujet qu’il aborde, en l’occurrence celui de la culture de guerre pour les enfants. Il parvient à mettre en évidence deux mouvements contradictoires pendant la guerre, entre une exaltation du patriotisme et un sentiment de lassitude et de tristesse des enfants devant la guerre et sa banalisation. Cependant, on pourrait reprocher à l’ouvrage de devenir par moments une juxtaposition d’exemples et de citations qui peuvent parfois faire perdre le fil de l’argumentation.

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« autrichiens et allemands innocents, martyrisés par des brutes anglaises, russes, serbes, etc.

L'argument de la lutte contre la barbarie est récurrent en France.

Parexemple, selon Albert Sarraut, en 1914, il s'agit pour la France de combattre une civilisation sauvage, qui n'a pas évolué depuis des siècles et que la France se doitd'écraser.

La notion de liberté s'ajoute à la conception des Français en Grande-Bretagne, puisque sa propagande met en avant la menace d'invasion de son territoirepar l'Allemagne.Si la guerre se montre là comme une solution à la menace de la puissance allemande, elle n'en garde pas moins une dimension civilisatrice et spirituelle.

En France,elle est présentée comme la dernière étape pour atteindre un « âge d'or » de l'humanité.

La lutte contre l'Allemagne aurait en fait pour but d'en finir avec la barbarie etl'immoralité allemandes.

Le rôle des alliés est alors sacralisé, puisque ces pays sont représentés comme le bastion de la civilisation, la seule chance d'arriver àéradiquer la barbarie.

Dans la religion, la guerre a également une portée purificatrice.

Le bon croyant se bat pour sa patrie, et le mauvais a une révélation au front,comme le personnage J.Bardot, caricature du laïque, qui retrouve la foi lorsqu'il meurt aux côtés d'un catholique.La justification de la guerre s'accompagne d'une culture de la haine de l'ennemi.

Les histoires de gens mauvais, comme la famille Lefourbe, permettent d'entretenir lemépris de l'adversaire.

Il s'agit de briser tous liens entre les enfants de différents camps, par exemple, dans la revue Fillette, on conseille à une jeune Française de neplus être amie avec une petite fille d'Allemagne.

Rares sont les représentations humaines de l'Allemand, puisqu'il est important d'entretenir une image diabolique pourinfluencer l'enfant.

Pour mieux atteindre le jeune public, on dénonce massivement les assassinats d'enfants.

Les récits fictifs, eux, contribuent à renforcer l'imagepéjoratives de l'Allemand et donnent implicitement le conseil de violenter l'ennemi de la même manière que les Pieds-Nickelés qui « passent à tabac »leursprisonniers.

Ainsi la violence est-elle banalisée dans l'enfance.

Pour cela, la propagande a d'abord travaillé sur une dénonciation exagérée de l'ennemi pour en arriverà exhorter l'enfant à la même violence.

L'information des enfants au sujet de la guerre, bien que présente, reste cependant partielle et forgée de façon à révolterl'enfant contre l'ennemi et le pousser à devenir brutal envers lui. Chapitre III - L'enfant héroïque Comment l'héroïsme définit-il la vision idéale de l'enfant forgée par la culture de guerre ? Comment la transposition de la guerre dans l'enfance a-t-elle contribué àune banalisation de la mort dans la société ? Afin d'exalter le sentiment patriotique chez l'enfant, la culture de guerre cherche d'abord à véhiculer l'image de l'enfant courageux prêt à se battre pour la nationmalgré son jeune âge.

Ainsi Jean-Louis le petit français incarne-t-il l'image du courageux jeune patriote qui voit la guerre comme une issue aux tensionsinternationales et est décidé à tout pout défendre son pays.

Dans ces représentations d'enfants exemplaires, nous retrouvons l'idée de participation au combat, cettefois concrète, puisque la littérature s'attache à mettre en valeur des enfants qui veulent à tout prix se battre aux côtés des soldats, aussi bien chez les garçons que chezles filles, dans les Livres roses pour la jeunesse, qui deviennent infirmière pour secourir les hommes au front.

Pour parvenir à cette exaltation, la culture contribue àprovoquer une haine et un désir de vengeance envers l'ennemi, comme Léon Ville qui décrit l'Allemand comme un esclavagiste au « sourire de hyène », source de lahaine du petit Paul qui ne souhaite que le tuer.

L'héroïsme, en tant qu'action dans le combat pour le pays, ne concerne alors que les jeunes, alors que les enfants, tropjeunes pour être héros, ont plutôt un rôle patriotique à jouer dans le pays.En effet, l'enfant reste souvent à l'arrière dans les représentations héroïques.

Dans les récits fictifs dur les plus jeunes, les actions patriotiques sont en généraleffectuées à l'arrière, comme lorsque Lissele et Seppele Müller, habitant en zone occupée, s'adonnent aux sabotages et à l'expression de leur patriotisme.

Les plusjeunes sont donc ici concernés par la guerre en grande partie à cause des récits fictifs qui mettent en scène des enfants-héros et installent une obsession de l'enfant pourla guerre qui se déroule.

Bien que trop jeune pour porter le fusil, l'enfant participe de plus en plus à la guerre en désirant combattre au front , et son sentiment deculpabilité (cf.

Chapitre I) se trouve exacerbé du fait de son impossibilité à combattre au front.

La participation de l'enfant à la guerre s'affirme également en Grande-Bretagne avec l'importance du volontariat et son développement dans la nouvelle génération prête à répondre à l'appel de la nation : « The country calls ! ».

Malgrésa transposition dans le monde de l'enfance, la guerre ne perd pas sa violence mais contribue à une revendication de cette brutalité et une disparition des barrièresentre enfance et âge adulte.La propagande a donc cherché à incorporer la guerre dans l'enfance pour générer l'assimilation de l'état de guerre par l'enfant.

D'un autre côté, l'enfant a aussi ététransposé dans la guerre.

En effet, nombreuses sont les représentations de l'enfant héroïque dans la presse pour adultes en particulier.

Il ne s'agit pas de communiquerà l'enfant le monde de la guerre, mais plutôt de transporter l'enfant dans la guerre et de l'y faire participer.

Pour faire croire au mythe de l'enfant-héros, la propagandemultiplie ses images, comme en 1915 lorsque Mon journal soutient en 1915 le « Monument à l'enfance héroïque » à Paris.

Une telle virulence dans la création de ceseffigies peut témoigner de l'aspect mythique de l'enfant-héros, forgé afin de dresser l'enfance derrière des exemples de bravoure.

Nous pouvons le voir à travers lesfugues, bien que peu nombreuses, d'élèves partis s'engager malgré leur jeune âge.

A partir de rares cas d'enfants-héros, la propagande œuvre pour exagérer leurimportance numérique et symbolique et publie dans des revues pour enfants des exemples de bravoure.

Au terme de cette partie, nous en arrivons à établir le fait quel'enfant montre toute son importance dans le conflit à travers son image de héros.

Il s'agit, par de telles représentations, d'animer l'enfance en faveur de la patrie encréant une volonté de participation au conflit d'une part, et d'intégrer l'enfant à la réalité de la guerre dans le but de faire des enfants une réserve de futurs protecteursde la patrie.

Cependant, un tel rapprochement entre guerre et enfant est responsable avant tout de la « brutalization » de la société, puisque dès le plus jeune âge,l'enfant a accès à un monde adulte ou la mort est monnaie courante. Chapitre IV - Epilogue : Ce qu'enfant pense Quelles ont été les conséquences de la culture de guerre sur l'enfant ? Pendant la guerre, les conceptions exemplaires voire héroïques de l'enfant amènent à l'imagination d'une enfance plus valeureuse que les adultes.

Ayant été formépour la patrie et pour la défendre, l'enfant serait promis à un avenir plus glorieux que tout autre.

On en arrive dans certains cas à un véritable culte de l'enfant, àl'imagination d'une « enfance parfaite » prête à tout pour se battre aux côtés de la patrie.

On compte désormais sur l'enfant pour assurer l'avenir du pays, puisque,grâce à la société de guerre, « la plus sérieuse résistance viendrait de l'enfant » (Léon Peigné).Une telle conception de l'enfance amène naturellement à l'utiliser en vue de soutenir la guerre.

Il s'agit d'abord d'un soutien moral.

En effet, l'enfant, qui supporte laguerre et ses privations, est le mieux placé pour maintenir le moral des soldats au front.

Ainsi adoptions de soldats, envois de lettres et cadeaux par des enfants sont-ils courants et encouragés par la propagande.

L'utilisation de l'enfant s'opère financièrement également.

Il constitue effectivement une source assez importante,comme on peut le voir avec le « Noël du soldat » qui réunit plus de 500 000 francs.

Ici, l'encouragement au don, qui prend pour cible l'enfant, est en fait un moyend'appeler indirectement mais efficacement à la contribution financière des familles derrière l'enfant.

Ce dernier constitue enfin un réservoir de main-d'œuvre nonnégligeable.

Les garderies et l'école deviennent presque un lieu de travail, où les plus jeunes sont appelés à faire la charpie et les filles à confectionner des vêtementsd'hiver pour les soldats.Dans la réalité, il faut examiner la véracité de ces images d'enfants véhiculées par la propagande.

D'une part, on ne peut pas contester l'existence d'une « enfancedocile » qui souhaite, comme Anaïs Nin en 1914, la victoire de la France.

La haine de l'ennemi est aussi récurrente dans les déclarations d'enfants, comme dans cellede Françoise Marette qui tient à « tuer les sales boches ».

La présence accrue de la violence et du militaire dans les jeux d'enfants témoigne également de l'effetimportant de la propagande sur l'enfant.

D'autre part, la docilité de l'enfant n'est pas, dans la réalité, telle que la propagande tend à la montrer, c'est-à-direincroyablement héroïque et exemplaire.

Bien que l'enfant ait tendance à se conformer à son entourage, en l'occurrence une société patriotique en guerre, il ne sedétache pas entièrement des aspect négatifs de la guerre.

En effet, le thème de la tristesse ou l'absence du père fait surface dans les copies.

Il ne s'agit pas de devenirpacifiste pendant la guerre, mais de commencer à ressentir un dégoût croissant pour l'état de guerre.. »

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