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Fiche de lecture : ROI DES AULNES (Le) de Michel Tournier

Publié le 17/11/2018

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ROI DES AULNES (Le)

Michel Tournier. Roman, 1971.

 

L’incendie qui ravage le collège le jour même de son conseil de discipline, puis, des années plus tard, la mobilisation de 1939 qui lui vaut un non-lieu dans une grave affaire de mœurs ont convaincu Abel Tiffauges d’une solidarité mystérieuse entre le cours de l’His-toire et sa propre vie. Prisonnier de guerre en 1940, il a la révélation éblouie de l’Allemagne, terre de symboles, de personnages légendaires et de signes magiques. Là, à Kaltenbom, prytanée militaire des jeunes nazis, il va accéder pleinement à sa vérité d’Ogre tout-puissant. Mais dans sa vie qu’il voit marquée du signe privilégié de l’inversion, un renversement se produit. Il recueille Ephraïm, l’enfant juif, et découvre l’enfer d’Auschwitz et la face cachée du nazisme. Grâce à Ephraïm, le «sinistre» Tiffauges va retrouver le sens sacré de la « phorie > (le fait de porter), redécouvrir la dimension extatique et rédemptrice de saint Christophe. Pour le sauver plus que pour se sauver, il portera sur ses épaules l’enfant juif hors de Kaltenbom envahi, réalisant ainsi sa propre prophétie: «Ma fin triomphale ce sera, si Dieu le veut, de marcher sur la terre avec, posée sur ma nuque, une étoile plus radieuse et plus dorée que celle des Rois Mages. » En effet, si sa mort dans les tourbières lui fait rejoindre apparemment le personnage du «Roi des Aulnes», éponyme de l’œuvre, sa traversée du marécage, courbé sous le poids de l’enfant, reprend en fait mot pour mot la légende de saint Christophe. Ce roman tourmenté et sombre se conclut ainsi sur une dernière image toute de lumière et de paix.

 

♦ Par sa structure comme par ses thèmes symboliques, ce roman très long et très touffu de Tournier (né en 1924) apparaît sous le signe du double et de l’opposition. Le roman est, en effet, construit sur deux versants parfaitement symétriques: la première partie située en France annonce et préfigure ce que la

 

seconde réalise et accomplit en Allemagne. Dans toute la première partie du roman se mettent en place pour Tiffauges les rencontres et les signes qui, déchiffrés, vont lui permettre de saisir le sens de son destin. Un centre se dégage très vite: l’enfant; puis une perspective: l’inversion systématique des valeurs; un but, enfin, qui donne sens à tout: la phorie. Expression du bonheur d’Abel, elle est l’extase ressentie par le simple fait de porter un enfant, comme saint Christophe, dont la légende informe tout le roman, porta le Christ.

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