Illusion comique (L') de Pierre Corneille (résume et analyse complète)
Publié le 24/10/2018
Extrait du document
Illusion comique (L'). Comédie en cinq actes et en vers de Pierre Corneille (1606-1684), créée par la troupe du Marais durant la saison 1635-1636, et publiée à Paris chez Targa en 1639. Plusieurs fois révisée par l'auteur, la pièce s'intitule l’Illusion à partir de 1660.
L'Illusion comique s'intercale, dans la carrière de Corneille, entre Médée (1635) et le Cid. « Étrange monstre » (Dédicace), cette pièce constitue un défi à plusieurs titres, d'abord parce qu'elle diffère profondément des comédies antérieures de l'auteur ; là il innovait, ici il joue des stéréotypes. De fait, l’Illusion comique (c'est-à-dire l'« illusion théâtrale »), s'inscrivant dans la lignée de la Comédie des comé-
diens (1631) de Gougenot et plus encore de celle de Georges de Scudéry (1632), use de tous les genres pour mieux surprendre le spectateur et lui faire faire l'expérience des pouvoirs de l'art dramatique. Défense des comédiens et apologie du théâtre par le théâtre, l'Illusion comique connut un assez vif succès avant de subir une longue éclipse : cette pièce baroque ne fut vraiment redécouverte qu’au xxe siècle.
Voilà dix ans que Pndamant cherche son fils Clindor dont il a provoqué la fuite par son autoritarisme. Dorante le conduit en Touraine chez le magicien Alcandne, qui annonce à Pridamant qu’il reverra son fils. Alcandre éloigne Dorante et explique que Clindor, après avoir exercé divers métiers, est entré à Bordeaux au service d’un capitan, Matamore. Le magicien entraîne Pridamant dans sa grotte : il lui fera voir son fils en usant de « spectres pareils à des corps animés ». Pridamant devra garder le silence et ne pas sortir (Acte I).
Apparaissent Clindor et Matamore, qui lance force rodomontades et dit sa flamme pour Isabelle. Après s'être joués de lui. Isabelle et Clindor s'avouent leur amour. Mais Adraste. un soupirant auquel Gérante, le père d'Isabelle, veut donner sa fille, voit en Clindor un rival et le menace. Lyse, la servante d'Isabelle, amoureuse déçue de Clindor, veut se venger : elle aidera Adraste en attirant Clindor dans un guet-apens. Pridamant craint pour son fils ; Alcandre l'invite à rester confiant (Acte II).
Clindor tient des propos galants à Lyse, qui le renvoie auprès d’Isabelle. Matamore, caché, assiste au duo d'amour des jeunes gens ; il s'en prend à Clindor, mais ce dernier, l’imitant suscite sa frayeur : Matamore lui « donne » alors généreusement Isabelle. Mais Clindor tombe dans un piège : il tue Adraste avant d'être capturé. Pridamant tremble pour son fils ; Alcandre le rassure (Acte III).
Lyse. ne voulant pas être responsable de la mort de Clindor, prépare son évasion : elle a séduit son geôlier. Dans sa prison. Clindor comprend la force de son amour pour Isabelle. Le geôlier l'aide à fuir avec Lyse et sa maîtresse. Alcandre interrompt alors son «récit»; il va «évoquer des fantômes nouveaux» : deux années ont passé ; Clindor et Isabelle ont désor-
«
mais acquis un « haut degré d'honneur» (Acte IV).
Alcandre insiste : Pridamant ne doit pas quitter la grotte.
On retrouve Clindor et Isabelle mariés, en Angleterre.
Elle lui reproche son infidélité : il dit ne pouvoir résister à son attirance pour la princesse Rosine.
Isabelle craint pour lui les fou dres du prince Florilame, l'époux de Rosine; elle préfère mourir pour préserver son honneur.
Clindor, bouleversé, annonce qu'il n'aime plus que sa femme.
Lyse et Isabelle, cachées, le voient
repousser Rosine.
Mais l'écuyer de Florilame les tue tous deux et emmène Isabelle : le prince, «dès longtemps amoureux de [ses] charmes», l'attend.
Alcandre invite Pridamant, accablé, à voir les funérailles de son fils : il lui montre Clindor et ses compagnons se partageant la recette de la représentation qu'ils viennent de donner! Isa belle et Clindor, après avoir fui, sont en effet
devenus comédiens.
Pridamant se lamente de
savoir son fils réduit à cette profession ; Alcandre
défend alors les acteurs et l'art dramatique.
Converti, Pridamant part rejoindre son fils à Paris (Acte V, version de 1639 ; en 1660, le person nage de Rosine n'apparaît plus et Isabelle meurt avec Clindor).
La pièce superpose trois plans : celui
de Pridamant et d' Alcandre ; celui de
Clindor
et d'Isabelle, dont le magicien
fait revivre le passé (Actes
II à IV) ; celui
de Clindor
et d'Isabelle, acteurs jouant
une tragédie (V).
Le retour au premier
plan à la fin des actes rappelle le pre
mier
enchâssement et masque en
même temps le second (la scène 1 de
l'acte
V répète la scène 1 de l'acte Il,
comme pour signaler que l'on est
entraîné dans un nouvel enchâsse
ment ; mais le spectateur, habitué à
voir reparaître Alcandre et
Pridamant à
chaque fin d'acte,
ne l'aperçoit pas clai
rement).
Le premier enchâssement
manifeste le pouvoir d' Alcandre, capa
ble d'animer
des« spectres», mais seul
le second dit pleinement l'étendue de
ce pouvoir,
proprement dramaturgi
que,
qui consiste à illusionner.
Pour
que le spectateur, comme Pridamant,
soit trompé, une certaine continuité
relie les deux enchâssements.
Dès le
début de la pièce, Alcandre insiste sur
l'heureuse fortune de Clindor, ce
qui
rend vraisemblable le personnage qu'il
joue au dernier acte.
L'intrigue du
second enchâssement reprend celle du premier : les personnages qu'interprè
tent alors Isabelle et Clindor peuvent
tout à fait passer pour les « personnes
réelles
>> des actes II à IV ; ainsi Clindor,
pourtant touché par la révélation de la
force de
son sentiment pour Isabelle à
la fin de l'acte
IV, est de nouveau un
inconstant, et Isabelle garde la même
dignité, le même amour pour lui.
Le
spectateur est trompé et Corneille lui
ménage
un autre plaisir : relire la pièce
pour déceler les artifices de l'illusion et
les indices qu'il s'amuse à disposer,
notamment dans les propos souvent à
double sens d' Alcandre.
Le spectateur,
adoptant le regard que Pridamant
porte sur ce qu' Alcandre lui fait voir,
s'identifie à
Pridamant et tombe avec
lui dans l'illusion de l'acte
V, leurré par
la conscience qu'il
a, contrairement au
personnage, d'être
au théâtre.
Lorsque
l'acteur qui joue Pridamant viendra
saluer
à la fin du spectacle, il compren
dra enfin que cet acteur jouait
à être
victime de l'illusion
pour mieux l'y
faire succomber.
Corneille entraîne le public
dans
l'univers du théâtre, en un voyage
parmi les genres
où s'expose la diver
sité même de l'art
dramatique: Alcan
dre
et sa grotte sont empruntés à la
pastorale, l'intrigue
du premier enchâs
sement relève d'abord de la comédie,
puis
de la tragi-comédie, celle du
second de la tragédie.
Corneille mani
feste qu'il maîtrise
tout l'art du théâtre,
même cette comédie traditionnelle
qu'il
n'a quasiment pas pratiquée.
Il
prend un évident plaisir à jouer du sté
réotype que constitue Matamore : avec
lui
il peut exhiber la puissance du
verbe -et ses limites : le théâtre va au
delà
-, une puissance altérée par le fait
qu'aucun des « spectateurs » du capi-.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- ILLUSION COMIQUE (L’) de Pierre Corneille (résumé & analyse)
- L’Illusion comique de Pierre Corneille (analyse détaillée)
- Illusion comique, l' [Pierre Corneille] - résumé et analyse.
- L'Illusion comique de Pierre CORNEILLE (Résumé & Analyse)
- Le Jeu de l’amour et du hasard 1730 Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux (résume et analyse complète)