La Fin du politique de Pierre BIRNBAUM

« Pierre Birnbaum (né en 1940) est professeur à l'Université Paris I et à l'Institut d'études politiques de Paris.

Il a déjà publié de nombreux ouvrages de philosophie politique et de sociologie, sur l'État, les élites, le pouvoir, etc.

La Fin du politique, fournit des éléments de réflexion à une interrogation inquiète contemporaine.

Les «basses eaux mytho­ logiques» pour reprendre l'expression d'Edgar Morin-, dans lesquelles nous sommes entrés ou engloutis, se caractérisent par le déclin, voire la mort des idéologies et l'effondrement des utopies.

Sont-elles le milieu heureux de sociétés enfin parvenues à l'âge de raison, comme le pensent d'importants théoriciens américains (Talcott Parsons, Wright Mills, Peter Blau) et de démocraties désormais adultes, parce que purgées des faux conflits et confiées aux décisions des experts au lieu d'être fon­ dées sur la participation des citoyens? Ne sont-elles pas, tout au contraire, la source du malaise actuel, de l'impression du vide, de ce que Pascal Bruckner appelait, dans un brillant essai récemment paru, la «mélancolie démocratique » ? lA FIN DES IDÉOLOGIES? Peut-on d'abord parler de fin des idéologies? Raymond Aron (1905-1983) fut le premier à lancer le thème et le débat.

Dans le dernier chapitre de son livre, L'Opium des intellectuels (Paris, Calmann-Lévy, 1955), il avançait l'idée qu'au plus fort de la guerre froide, les conflits idéologiques n'étaient plus qu'à usage externe, car, dans les deux sociétés antagonistes, les pro­ grès de la technique et l'expansion industrielle, l'installation au pouvoir de ce que Galbraith appelle une techno-structure, imposaient une logique rebelle à tout prophétisme et ayant le culte de l'empirisme : «Par deux voies différentes, spontanément ou avec 1 'aide de la. »