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La Puissance et la Gloire

Publié le 12/04/2013

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Romancier anglais très prolifique, Graham Greene (1904-1991) a commencé par écrire des récits d'aventures (espionnage, guerre), puis des romans psychologiques, fortement influencés par sa foi catholique, souvent extrême mais non dénuée d' ironie et d'amertume. Il fut journaliste au Times et travailla pour le Foreign Office. Outre la Puissance et la Gloire ( 1940) et Le Troisième Homme (1950), citons Voyage avec ma tante (1969) et Le Dixième Homme (1985).

« EXTRAITS Graham Greene excelle à décrire la pauvreté et le sentiment d'ennui qu'exhalent les petites villes du Mexique Au sommet de la colline, la placette était éclairée par des globes attachés trois par trois et réunis par des fils aériens.

La Trésorerie, la Presidencia, un cabinet de dentiste, la prison ...

une construction basse et blanche, vieille de trois cents ans, et ensuite la rue descendant à pic , le mur de soutènement d'une église en ruine; partout où l'on allait, on rencontrait inévitablement l'eau, le fleuve.

La peinture rose des façades classiques s'écaillait et découvrait les murs de boue, et la boue lentement redevenait boue .

Autour de la plaza se déroulait la parade du soir: les femmes allaient d'un côté; les hommes de l'autre : des jeunes gens en chemise rouge tournaient, en parlant très fort, autour des comptoirs d'ea u minérale.

Poursuivi , le Père tente èncore de célébrer des messes clandestines dans les villages où il trouve refuge Une voix pressante murmura à son oreille : -Mon Pè re.

-Quoi? -Les gendarmes sont en route ; ils viennent par la forêt et ne sont plus qu'à un mille d'ici.

Il en avait l'habitude : les mots qui ne portent pas, la fin bâclée, l'attente du supplice qui s'interpose entre lui et sa foi.

Dans son entêtement, il dit encore : -Avant tout, souvene z-vous que le Ciel est ici.

Étaient-ils à cheval ou à pied ? S'ils étaient à pied, il lui restait vingt minutes pour terminer la messe et se cacher.

- Ici même , en cette minute, votre peur et ma peur appartiennent au Ciel, ou jamais plus il n'y aura de peur.

Il leur tourna le dos et se mit très vite à réciter le Credo.

Il lui était arrivé de voir venir le Canon de la messe avec une terreur vraiment physique, la première fois qu'il avait absorbé, en état de péché mortel, le corps et le sang de Dieu ; plus tard, la vie lui avait fourni des excuses ...

Au bout d'un certain temps, il avait cessé de penser qu'il importait beaucoup qu'il fût ou non damné , pourvu que ces autres ...

Se ul dans sa cellule, avant l'exécution, le Père mesure l'indignité de son existence Après tout, était-il vraiment digne de l 'Enfer ? Des larmes roulèrent sur son visage; à ce moment-là, il n'avait plus peur de la damnation , même la peur de la souffrance corporelle avait reculé au second plan.

Il ne ressentait qu'une immense déception de devoir se présenter devant Dieu les mains vides, parce qu'il n'a va it rien fait du tout.

Il lui sembla alors qu'il eût été très facile d'être un saint.

Il n'était besoin que d'un peu d'empire sur soi, d'un peu de courage .

Il avait le même sentiment qu'un homme qui a laissé fuir le bonheur en arrivant quelques minutes trop tard à un endroit fixé.

Traduit de l'anglai s par Marcelle Sibon .

Éditions Rob ert Laffont, 1948 «L' homme vertueux p eut douter de l'enfer : lu i portait l'enfer dans son cœur .

» NOTES DE L'ÉDITEUR La Puissanc e et la Gloire fut inspiré à Graham Greene par le voyage qu'il fit au Mexique en 1938 sous la dictature de Garrido Cannibal.

Depuis l'indépendance de 1820, le catholicisme a représenté une séquelle de l'oppression espagnole aux yeux des « libérateur s » successifs qui ont cherché à l'éradiquer.

Il est facile d'identifier la province de Tabasco et sa capitale Villahermosa.

De nombreux traits des personnages sont repris de rencontres réelles que l'auteur a faites à Tabasco au terme d'une vie d'échecs, qui soulignent, par leur impossibilité à en partir, l'isolement de cet État misérable au milieu du xxe siècle.

Les villages misérable s, et relatées dans Routes sans lois : le prêtre ivre qui s'entête à bapti ser un petit garçon d'un nom de fille, le dentiste britannique souffrant de l'estomac ...

Outre celui -ci apparaissent dans le roman d'autres Européens ou Américains échoués 1 Lipni tzki-Violl et 2 illustr a tion de Paul H oga rth, Pavilion B oo k.

1986 3 peintur e de José Clem ent e Or ozco les Indien s dont la religiosité touche à la superstition, les villes qui, au contraire, avec leurs églises ont perdu leur âme, t semblent tellement appartenir à une autre époque qu'on est surpris de voir évoqués un bateau à moteur ou un fauteuil de denti ste.

GREE NE03. »

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