La Sagesse du Père Brown

« « Assis au piano, le clown jouait...

» ~------- EXTRAITS Une description du Père Brown Après un « Entrez » un peu sec, mais poli, la porte de la pièces' ouvrit, livrant passage à un petit être informe qui paraissait aussi embarrassé de son chapeau et de son para­ pluie que s'il était porteur d'une quantité de bagages.

Le parapluie était un paquet noir et inélégant maintes fois ra­ piécé, le chapeau était noir et à larges bords rou­ lés, ecclésiastique sans aucun doute, mais d'un modèle peu courant en Angleterre ; l' hom­ me était l a person­ nifïcation de la simplicité et de la maladresse.

Le docteur regarda le nouveau venu avec un ahurissement à peine déguisé, comme s'il se fut trouvé en présen ce d'un monstre marin, bien sûr inoffensif.

Le nou­ veau venu, de son côté, regarda le docteur d'un air aimable avec la satisfaction d'une grosse femme de journée essoufflée qui vient à grand-peine de se hisser dans un omnibus, un mélange de conten temen t de soi et de désarroi physique .

Son chapeau tomba sur le tapis, son encombrant parapluie glissa entre ses genoux avec un bruit mat ; il par­ vint à reprendre le premier et suivit l'autre des yeux, puis, avec un indéfinissable sou­ rire, il dit : - Mon nom est Brown.

Je vous prie de m'excuser.

Je viens pour l'affaire Mac Nab.

J'ai entendu dire que vous aidez quelquefois des gens qui ont des ennuis de ce genre.

Je vous prie de m'excuser si je me suis trompé.

A l'issue d'une enquête en Cornouailles, le Père Brown donne une leçon de psychologie à ses amis Vous avez pensé que c'était une carte des élus du Pacifique, répondit B rown.

Mettez une plume avec un fossile et un bout de corail et tout le monde croira que c'es t un échanti ll on .

Mettez la même plume avec un ruban et une fleur artificielle et tout le monde croira que c'est une garniture pour un chapeau de dame .

Mette z la plume avec un flacon d'encre, un livre et une rame de papier et la plupart des hommes jureront qu ' ils ont vu une plume d'oie.

Cette car te se trouvait parmi des oiseaux et des co­ quillages tropicau x et vous avez cru que c'é tait une ca rte des îles du Pa c ifique.

C'était la car te de cette rivière.

- Comment le savez-vous ? demanda Fan­ shaw.

- J'ai vu le rocher auquel vous trouve z une forme de dragon et l'autre qui ressemb le à Merlin , et ...

-On dirait que vous avez remarqué un tas de choses pendant ce voyage, s'écria Fanshaw.

Nous qui croyions que vous étiez tout à fait distrait.

Traduit de l'anglais par Yves André, Gallimard, 1954 « Paul , princ e Sara din e, à vos ordres.

» NOTES DE L'ÉDITEUR Gilbert Keith Chesterton ( 1874-1936) : « De mère franco-écossaise, il se fit connaître comme critique d'art, critique littéraire et polémiste.

Partisan des Boers , libéral , puis radical, il invente , avec Belloc , le" distributisme ",alternative à la fois au capitalisme et à l'étatisme socialiste.

En 1922 , il devient catholique, à 1 '.a nglaise : l'homme du paradoxe et de la joie de vivre.

( ...

) Antifasciste convaincu, il plaide la nature humaine en attente de la grâce garde cette inspiration jusque dans le genre policier( ...

) inventant avec le Père Brown ( ...

) le Sherlock Holmes de la foi.

» Dictionnair e des Littératures, Laro usse, 1992 .

A l 'orig ine , le s nouvelles du Père Brown parurent individuellement dans des magazine s.

Elles furent ensuite regroupées en 5 volumes: L'innocence du Père Brown (1911), La Sagesse du Père Brown (19 14), L'in crédu lité du Père Brown (1926) , Chesterton aime à décrire son détective : «La figure du Père Brown était plutôt inexpressive, mais il était visiblement satisfait, peut-être de son ignorance , peut-être de ce qu'il savait.

Mais c'était toujours en l'espace d'un éclair que le masque d' insignifiance tombait pour faire face à celui de la sagesse, et Flambeau qui connaissait son ami, s'aperçut que son ami avait compris tout à coup.

Brown ne dit mot mais finit son plat de poisson .

» Le Secret du Père Brown (1927) , (une grâce codifiée par les dogmes) et Le Scandale du Père Brown ( 1935).

1 Roger-Vî oll et 2, 3, 4 , 5 illustrations de W .

F.

Foster.

John Lane Company.

New York.

1911 CHESTERTON 02. »