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Lamartine : Histoire des Girondins

Publié le 09/01/2019

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Histoire des Girondins

 

L'Histoire des Girondins paraît à Paris en 1847, chez Furne et Coquebert. Cet ouvrage monumental compte près de trois mille pages, réparties en soixante et un livres, eux-mêmes divisés en chapitres plus ou moins nombreux. Trente-six portraits-vignettes ornent l’ensemble. Des sommaires, très détaillés, aident le lecteur à trouver son chemin dans l’histoire des quarante mois qui forment le sujet de l'entreprise : la Révolution française, d’avril 1791 àjuillet 1794.

 

Tous les grands événements de la période y trouvent leur place : la fuite et l’arrestation du roi à Varennes en juin 1791 (livre II); la déclaration de guerre de la France «au roi de Hongrie et de Bohême» en avril 1792 (livre XIV); l'invasion des Tuileries par le peuple le 21 juin 1792 (livre XVI); la chute de la monarchie le 10 août 1792 (livre XXII); l'exécution du roi le 21 janvier 1793 (livre XXXV); la chute des Girondins le 12 juin 1793 (livres XLI, XLII); la Terreur (livres L, LUI...), jusqu’à la chute de Robespierre le 27 juillet 1794 (9 thermidor, livre LXI).

 

Mais ces éléments, qu'on pourrait trouver dans un manuel d’histoire, ne représentent pas l’essentiel de l'Histoire des Girondins : l’originalité et l’intérêt de cet ouvrage résident plutôt dans la méthode suivie par Lamartine et dans les intentions qui ont présidé à son entreprise.

 

Lamartine ne prétend pas à la « minutieuse servilité des annalistes », même s'il affirme ne s’être servi que de documents et de témoignages avérés et n’avoir écrit qu’après « une scrupuleuse investigation des faits et des caractères» (Avertissement de 1847). De fait, le cadre temporel est souvent très flou, et Lamartine fait toujours passer l’unité d'action et d’intérêt avant le strict respect de la chronologie : c’est ainsi qu’il mène le récit de la chute de la royauté jusqu’à la mort du roi le 21 janvier 1793 (livre XXXV), avant de reprendre (livre XXXVI) la narration des événements militaires qu’il avait menée précédemment jusqu’à la bataille de Valmy, en septembre 1792.

 

De même, il n'accorde pas la même place à tous les événements qu'il prend en considération. Il est vrai que la Révolution invite à cette démarche puisque ses journées de crise (juin, août, septembre 1792, par exemple) et ses moments d'hésitation correspondent à l’alternance des temps forts et des temps faibles du récit. On remarque notamment que le récit des événements du 10 août 1792 occupe à lui seul la majeure partie des livres XX à XXIII, alors que, pour les mois d’octobre, novembre, décembre 1791 et le début de janvier 1792, le lecteur doit se contenter des vingt pages du livre IX.

 

Enfin, Lamartine se borne à reproduire les discours prononcés par Danton, Vergniaud, Robespierre et les autres grands orateurs de la Convention, non sans accentuer le côté un peu bavard et théorique de ces discours révolutionnaires. On reste parfois indécis sur l’importance qu’il y a lieu d’accorder à toutes ces protestations de républicanisme exprimées dans un style grandiloquent. Lamartine, orateur politique lui-même, commente volontiers la valeur oratoire et littéraire de certains discours de la Révolution (ces manifestations parlementaires représentant, à tout prendre, les seules pièces justificatives du discours tenu par Lamartine sur la période girondine).

lamartine

« à Dieu le dernier mot des vicissitudes humaines.

De fait, il ne cesse de se référer à la Providence.

« L'Histoire est 1' éternel pilori des noms infâmes » (livre XXV, xvii), mais elle marche vers l'achèvement de l'idée chrétienne sur la terre, d'où la légitimité des appréciations morales portées sur les actes et les acteurs de la Révolution : «Idéal divin mille fois trahi par l'imperfection des ins­ truments et des institutions qui tentèrent de le réaliser, mille fois noyé dans le sang des martyrs du perfectionne­ ment social, mais qui traverse néanmoins toutes les déceptions.

toutes les tyrannies, toutes les époques, et que l'humanité revoit sans cesse briller devant elle, sinon comme un port, du moins comme un but>> (livre XXXI, XXIX).

On trouvera un exemple de mise en œuvre de cette conscience du genre humain lors du jugement sur l'exécution de Louis XVI (livre XXXV, xxm à xxvm).

Enfin, si Lamartine assume le rôle du Dieu du Juge­ ment dernier, ce n'est pas pour jouir scandaleusement de cette puissance usurpée (comme Chateaubriand le fait, dans ses Mémoires d'outre-tombe), mais bien pour pro­ mouvoir l'idée républicaine, en distinguant soigneuse­ ment les excès d'une populace sanguinaire et le peuple véritable, sur lequel et par lequel doit s'édifier la républi­ que.

A cette intention, avouée dès le début ( « Cette his­ toire pleine de sang et de larmes est pleine aussi d'ensei­ gnements pour les peuples>>, livre 1, I), fait écho la profession de foi de l'historien : «Jamais il n'y eut tant de sang sur la vérité.

L'œuvre de l'Histoire est de laver ces taches, et de ne pas rejeter la justice sociale parce que des flots de sang sont tombés sur les dogmes de la liberté, de la charité et de la raison >> (livre XXXIX, XXI).

La dernière instance de l'Histoire des Girondins n'est donc ni la littérature, ni l'Histoire, ni la morale, mais la politique, conçue comme un moyen emprunté par le bien pour se diffuser sur la terre.

Et, «si cette histoire est pleine de deuil, elle est pleine de foi».

Les rapproche­ ments incessants faits par Lamartine entre la période révolutionnaire et la monarchie de Juillet, bien avant J'appel solennel à la réconciliation des fils des victimes et des fils des combattants de la Révolution, bien avant l'invitation à poursuivre l'œuvre laissée en plan par les révolutionnaires (dernière page), montrent aux lecteurs d'aujourd'hui qu'une Histoire des Girondins, en 1847, est moins œuvre historique ou littéraire que témoignage polémique, politique, à la veille d'un nouveau sursaut révolutionnaire.

Et les contemporains ne s'y trompèrent pas.

Dès février 1848, Victor Hugo salue ainsi Lamartine :. »

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