Le Paysan de Paris
Publié le 04/04/2013
Extrait du document
A un style chatoyant s'ajoutent les illustrations les plus étonnantes: Aragon n'a pas hésité à introduire dans son oeuvre des affiches banales ou saugrenues : « Massages au second «,« Une rareté: Calvados 1893 ... « ou le tarif des consommations d'un grand café parisien. De nombreux passages de ce texte de 1925 annoncent le futur grand poète : « La femme est dans le feu , dans le fort, dans le faible, la femme est dans le fond des flots, dans la fuite des feuilles, dans la feinte solaire ... « On croirait ces lignes écrites pour Elsa Triolet, qu ' il rencontrera peu de temps après.
«
« Inégalité des tailles
des passants , inégalité
d'humeur et de matière,
tout change selon des
lois de div.ergence , et
je m'étonne grandement
de l'imagination de
Dieu.
»
EXTRAITS ----- ---
Dès les premières pages, la réalité la
plus banale suscite
un monde nouveau
Je me suis souvent arrêté au seuil de ces bou
tiques interdites aux hommes et
j'ai vu se dé
rouler les cheveux dans leurs grottes.
Serpents, serpents, vous
me
fascinez toujours.
Dans le pas
sage de l'
Opéra , je contem
plais ainsi un jour les anneaux
lents
et purs d'un python de
blondeur.
Et brusquement , pour
la première fois de ma vie,
j'étais saisi de cette idée que
les hommes n'ont trouvé qu'un
terme de comparaison à ce qui
est blond : comme les blés , et
l'on a cru tout dire.
Les blés,
malheureux, mais n'ave z-vous
jamais regardé les fougères
?
J'ai mordu tout un an des che
veux de
fougère.J'ai connu
des cheveux
de résine , des che
veux de topaze , des cheveux
d'hystérie.
Blond comme l'hystéri e, blond
comme le ciel, blond comme
la fatigue , blond
comme le baiser.
Sur la palette des blon
deurs,je mettrai l'élégance des automobiles,
l'odeur des sainfouins,
le silence des mati
nées, les perplexités
del' attente, les ravages
des frôlements .
Qu'il est blond
le bruit de la
pluie , qu'il est blond
le chant des miroirs !
Du parfum des gants au cri de la chouette,
des battements du cœur de l'assassin à la
jlammefleur des cytises, de la morsure à la
chanson, que
de blondeurs , que de paupières .
Le propos du narrateur devient
volontiers théorique et prend parfois
des allures de manifeste.
Cet extrait,
par l'attention portée à une redéfinition
de l'image chère, montre
par exemple
son attachement
à la pensée surréaliste
Je ne me sentais pas responsable de ce
fantastique où je vivais.
Le fantastiqu e ou
le
merveilleux.
C'est dans cette zone que ma
co nnaissance était proprement
la notion.
J'y
accédais
par un escalier dérobé, l' image .
La recherche abstraite me l'
afait tenir pour
un e illusion grossière, et voici
qu'à son
terme la notion, dans sa forme concrète,
avec son trésor de particularités , ne me
se mble plus en rien
diff érente de ce mode
méprisé de
la connaissance, l'image, qui est
la connaissance poétique, et les
formes
vulgaires de la connaissance ne sont, sous
le prétexte de la science ou de la logique ,
qu e les
étapes conscientes que brûle
mer ve illeus ement l'image, le buisson
ard ent .
Je sais ce qu'une telle conception choque,
et l
'objection qu'elle comporte.
Un certain
sentimen t du réel.
Pur sentiment.
Car où
prend-on que le concret soit le réel
? N'est
il pas au contraire tout ce qui est hors du
réel, le réel n'est-il pas le jugement abstrait,
que le concret ne présuppose que dans la
diale ctique
?
Et l' image n 'a-t-elle pas, en tant que telle,
sa réalité qui est son application , sa sub
stitution à la connaissance
? Sans doute
l
'ima ge n'est-elle pas le concret, mais la
co nscience possible, la plus grande cons
c ien ce possible
du
con cret.
Gallimard,
1953
« Voici le palais qu'il te
faut, grande mécanique
pensante, pour savoir
enfin qui tu es.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR «Nul n'aura été plus habile détracteur de
l 'insolite sous toutes ses formes , nul n'aura
été porté à des rêveries
si grisantes sur une
sorte de vie dérobée de la ville.(
...
) Aragon
était
en ce sens étourdissant -y compris
pour lui-même.(
...
) Le se ul danger qu'il
court est
le trop grand désir de plaire.
Étincelant...
» André Breton, Entretiens,
Gallimard, 1952.
révélations
inaccessibles à la conscience
en
état de veille .
( ...
)La conscience est au seuil
du surréel , au moment où s'opère la jonction
du réel et de l'irréel et où elle peut
s'at tendre à leur fusion.( ...
) L'observation
n 'est pas une fin en soi mais un instrument
de découverte.
(
...
)La sacralisation du
monde, par-delà la raison, est
l'abouti ssement suprême de la
métamorphose, le triomphe du pouvoir
visionnaire s
ur la connaissance
«La chasse miraculeuse au merveilleux n'a
pas pour seul objet de détruire l'en nui ; elle
est une
" queste " semblable à celle du
Graal ou de !'Oiseau bleu .
( ...
)Cette
insurrection contre le réel est la racine du
merveilleux, de la mythologie : les homme s
recherchent
« un ordre mystérieux , qui
n
'exprime qu'un désir qui est en eux .»
Roger Garaudy, L' Itinéraire d'Aragon,
Gallimard , 1961.
« Grâce à la nuit , force naturelle dont " le
pouvoir reconnu de tout temps res
te en tout
temps mystérieux", vont s'opérer des
1 Sipa-Press 2, 3, 4, 5 peintures d'Alexandre Deïneka, Galer ie Telryakov, Moscou/ Edimédia
rationnelle.
» Yvette Gindine, Aragon ,
prosateur surréaliste,
Droz, 1966.
ARAGON 03.
»
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