Le Paysan perverti
Publié le 12/04/2013
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Le Paysan perverti, paru en 1775, marque le début d' une série d'ouvrages qui développent le thème du frère et de la soeur provinciaux corrompus par le contact avec la ville : en 1784 paraît La Paysanne pervertie et, en 1786, Le Paysan et la Paysanne pervertis, qui réunit les deux textes antérieurs. Comme les auteurs de romans épistolaires avaient coutume de le faire, Restif, pour donner plus de véracité à son récit, insère au début du livre un avis du frère du protagoniste, où celui-ci précise qu ' il a luimême réuni la correspondance.
«
«J'ai touché son pied ; je l'ai remué ; (ah ! lAmi ! de ma vie je n'ai rien éprouvé de pareil à ce que je sentai s !) »
~------- EXTRAITS
Avis placé en début de recueil et rédigé
par Pierre R**, frère d'Edmond
Si j'ai rassemblé tant de lettre s de diffé
rentes
person nes, jointes à celles d'un
infortuné qui m'a coûté bien des larmes,
c'est dans la vue de mettre ma famille, et
tous les gens de campagne, au
fait des
dangers que la
jeunesse
court dans les villes.
Ô mes
enfants ! restons dans nos
hameaux, et ne cherchons
point à sortir de l'heureuse
ignorance des plaisirs des
grandes cités : le vice en
donne le goût, l'irréligion
excite à
s'y livrer, le crime
fournit les ressources ; et
la misère, l'infamie, le sup
plice des scélérats en sont
quelquefois les fruits.
Edmond prend goût au
monde citadin
Non , cher aîné, je ne
jouirai plus du bonheur
de vivre à la campagne : le
sort en est jeté; j'ai me tout
à la
fois la ville, et je la
déteste : mais ...
je sens que je ne puis la
quitter; ...
c'es t une chose impossible , à
présent, et j'y suis pour toujours.
En effet,
m'y voilà .retenu par mille liens, tous si forts,
que rien ne
peut les rompre.
Si je cherche la
cause de mon goût
pour la ville, je la trouve
dans la
polit esse, plus agréable que la
co rdialité; dans
la grâce des manières; nos
élégants de campagne ne sont ici que ridi
cules : il en résu lte de
là, qu'on s'accoutume
in sens iblement à se mettre au-dessus d'e
ux:
il y a plus , un homme de ville qui aura sé
journé quelque temps au village, semble, à
son retour, reconnaître cette supériorité des
citadins; il en paraît plus timide, moins as
suré,
jusqu'à ce qu 'il soit remis au courant.
Edmond se réjouit d'avoir
séduit une femme mariée,
puis
s'en désole
Enfin je suis heureux! aucun nuage
ne
voile plus mon bonheur! ...
Mon
cher
mentor! j'hésitais à t'en/aire
part ...
mais ce n'est que demi féli
cité, lorsqu'un ami sincère ignore
nos plaisirs.
Je suis heureux ...
et
dans cet instant même, je ne suis
pas content ...
Taise z-vous, chimères de mon ima
gination effarée ; vieux préjugés,
disparaisse z
pour jamais ; ou lais
se z-moi du moins quelques instants
d 'une joie
pure! Qui, moi! j'a i pos
sédé
...
Est-ce bien toi, Edmond ? et quand
dans ton village,
tu conduisais le troupeau
de
la maison paternelle , te serais-tu attendu
au degré de gloire où l'adorable marquise
t'a fait monter! ...
J'a i tantôt quitté la plume: mes efforts pour
m_' exagérer mon bonheur sont inutile s : il
devient un fardeau qui m'accable.
En quel
état me voilà réduit !
Ah ! dans mes jeunes
années, qui m'aurait dit : -
Tu corrompras
la femme d'un autre, et tu prostitueras ta
sœur à ce même homme, dont tu auras
co rrompu la femme ! ta propre
sœur !
Ursule ! cette aimable, cette
innocente
Ursule, dont les jeux
enfantins font aujourd'hui tant de
plaisir à ta mère ! Hélas ! si
je m'étais alors tracé l'idée du
bonheur,
ne l'aurais-je pas fondé
sur l'honnêteté ? je me serais peint
une union légitime avec une
fille
aimable et vertueuse ...
Non, je ne
suis pas heureux! non,
je ne le suis
pas! Ah! Gaudet ! vous m'ave z
perdu! ...
« Laure est venue
timidement prè s de
moi ; elle n 'osa it
lever les ye u x.
»
« Représent e-toi , mon
cher, une brune de seize
ans, entretenue par un homme de soixante,
qui ne l'a jamais perdue de vue que
depuis deux jours.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR «En 1775, Rest if rompt avec la tradition
en obtenant son premier vrai succès lors
de la parution du Pa ysan perverti.
L'originalité du roman, premier d'un long
cycle
qui s'étend jusqu 'en 1787, réside
dans son traitement épistolaire.
La Pa ysanne pervertif! », Europe, no 732,
avril 1990.
« Pour mon humble part, je mets chapeau
bas devant ce roman comme devant son
auteur.
11 ne s'ensuit pas que je m'en
di ssimule les point faibles , qui sont
pass im , les grands appels à la vert u, une
dramati sation parfois superflue, quelques
invrai semblance s encore dans le domaine de
la vie, non pas brute , mai s telle que Restif
prétend la synthétiser par son art.
» Henri
Bachelin , note s de
L'Œu vre de Restif de la
Br etonne (T.
VI) , Édition s du Trianon , 1931 .
1 Roger- Vi olleL 2.
3.
4 .
5.
6 g r av.
de Bin eL el L e R oy/ Edi111 edi a
La confrontation de toutes les couches
sociales de
1' Ancien Rég im e qui y figurent
en sou ligne la discontinuité .
Pour
la
première fois la parole est donnée en
propre
à un personnage romanesque issu
de milieux populaires.
» P.
Graille et
L.
Quileri é,
«Vision du peuple dans
« L' Anglais Milnes désapprouve le triple
axe-" viol, inceste , vérole"- sur lequel
tourne l'imagination réti vienne.
Mais
« certains chapitres du livre sont non
seu lement intelligent s
et bien écrits dans
· un style simp le et peu prétentieux, mais
sont pleins de bon sens, de raisonnemen ts
justes
et de sentiments vrais.
»
David Coward , «Re stif et 1' Angleterre »,
Europ e, no 732, avril 1990.
RESTIF DE LA BRETONNE 02.
»
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