Le Piéton de Paris
Publié le 05/04/2013
Extrait du document
Le plus souvent, Léon-Paul Fargue prend le prétexte d'une rencontre ou d'une anecdote pour nous faire découvrir les multiples facettes de la vie parisienne. Son oeuvre ne vise qu'à décrire une ambiance, elle ne cherche pas à dévoiler ce que nous révèle tout bon guide en matière de touri sme. Ce qui passionne le poète, ce ne sont pas tant les belles pierres et tous les monuments dont certains quartiers regorgent, mais plutôt l' invisible que seule une oeuvre d' art est capable de rendre. Le Piéton de Paris a été publié en 1939.
«
• t
« Tout autre est
l'atmosphère de
Montparnasse, quartier
minuscule et grouillant,
sans histoire et sans
légende
...
»
EXTRAITS ~~~~~~~~
L'auteur est avant tout sensible au
charme nocturne de son quartier.
Un
charme sinistre mais envoûtant
C'est aussi la Chapelle nocturne que je
connais le mieux et que je préfère.
Elle
a plus de chien, plus
d'âme et plus de
résonance.
Les rues en
sont vides et mornes, en
core que
le cri des trains
de luxe lui envoie des
vols de cigognes ...
La file
indienne des réverbères
ne remplace pas
la dispa
rition de cette accumu
lation de boutiques qui,
de jour, rend le quartier
comparable à des souks
africains.
L'arrondisse
ment tout entier trempe
dans l'encre.
C'est l'heure
des appels désespérés qui
font des hommes des
égaux et des poètes.
Rue
de la Charbonnière, les
prostituées en boutique, comme à Amster
dam, donnent à l'endroit
un spectacle de jeu
de cartes crasseuses.
Montmartre vit essentiellement
par ses cafés
Mais le vrai café de Montmartre a changé.
Il est parfois aussi accueillant qu'autrefois,
et l'atmosphère qui s'y respire est toujours
celle d'une vie de bohème.
Mais
le décor en
a subi
de profondes transformations.
Le café
de Montmartre avec ses grues-loteries à
jumelles
et à couteaux suisses, ses dixièmes
de
billets de la Loterie Nationale, ses
caramels, ses brioches, ses petits jeux, son
billard russe, ses briquets, tient à
la fois
du garage et du baz ar.
On y achète autant
qu 'on y boit,
et Boubouroche ne s'y trouve
rait plus à l'aise.
Léon-Paul Fargue est parfois saisi dans
son récit
par un petit air de nostalgie
Gracieuse époque.
Les quais traduisaient
pour nous, qui n'avions pas encore droit
aux salons, aux cabinets particuliers, aux
«boudoirs confidentiels », cette sorte d'ani
mation heureuse qui tremblotait dans
Paris,
et Paris se réduisait alors pour nous à une
synthèse où nous voyions une jolie femme ,
un fiacre, un trottin, un vieux général, une
bouquetière ou
un jeune officier à cheval.
La rue de Paris n'était pas autre chose.
Sur
les quais, aux abords de l'Académie, c'était
une rumeur de
jupes et de murmures qui
donnait à l'avenir
un goût violent et nous
faisait grogner contre notre jeune âge.
L'auteur trahit
parfois une cer
taine inquiétude
quant
à l'avenir
de Paris
Paris file à toute
allure vers un avenir
plus sec et certaine
ment moins nuancé.
Déjà le contraste
entre la décoration
« art nouveau » du
Maxim's
et la phy
sionomie des dîneurs
apparaît à ce lui qui
le veut bien.
On n'y
entend plus parler
que de pactes, de
plans (avez-vous
re
marqué, tout le mon
de a le sien), de
~ ·
l
records ; on expliqu e la sexualité par
la biologie, la biologie par la sauce mayon-
naise
...
Éditions Gallimard, 1939
« Lipp reste pour moi l'établi ssement public
num éro 1 du carrefour
et évoque
par instants
l 'autorit é de l'État.
..
»
NOTES DE L'ÉDITEUR prose (D'après Paris, 1932, Le Piéton de
Paris, 1939) où il traduit avec beaucoup café,
à des silhou ettes amica les ou
mystérieuses, qu'il suit, perd des yeux,
retrouve .
Ainsi cette fantasmagorie est
comme l'envers épique et lyrique des beaux
livre s où, vers
la fin de sa vie, Fargue s'est
promené dans ses souvenirs et dans les rues
de sa ville
natale( ...
).
La poésie s'y est
assagie, mais elle y demeure présente, bien
qu'à la portée d'un plus grand nombre de
lecteurs .
» Jacques Robichez, Précis de
Quelques dates
1876: naissance de Léon-Paul Fargue à
Paris; 1939: publication du Piéton de
Paris; 1946: Léon-Paul Fargue reçoit le
grand prix de la Ville de
Paris ; 1947:
Léon-Paul Fargue meurt chez lui, boulevard
Montparnasse .
Léon-Pau l Fargue est avant tout poète
et
« la simplicité, la facilité même de sa
poésie est le résultat d'un savant travail qui
apparaît plus nettement dans ses œuvres en de
verve et d'émotion les mystères de la
grande cité.
Aux évasions dans l'es pace ou
dans
le" surréel", Fargue préfère, et c'est
son originalité, le voyage dans une rêverie
que la vie intérieure ou les faits les plus
familiers su ffisent à cimenter.
» Hi stoire de
la littérature française, xrxe et xxe siècles,
éditions Bordas, 1972.
A propos de Léon-Paul Fargue, Jacques
Robichez dit que
« le poète accommode
soudain sa vision à un e rue de
Paris, à un
1 R oger- V iollet 2, 3, 4 lithogra phies de Josy R aynaJ.
Pharmac ie ns Bibli ophil es, P a ris.
1989 / B .N.
la littérature française du xx e siècle, PUF,
1985.
FARGUE0 2.
»
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