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Le Rideau de Milan Kundera

Publié le 26/08/2012

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« Le reproche que je fais à son livre ; c’est que le bien est trop absent «, dit Sainte-Beuve de Madame Bovary. Pq demande-t-il, n’y a-t-il pas dans ce roman « un seul personnage qui soit de nature à consoler, à reposer le lecteur par un bon spectacle ? «. Vingt ans plus tard, dans une lettre, Sand dit à Flaubert à peu près la même chose : pq apporte-t-il au lecteur la « désolation « tandis qu’elle préfère les « consoler « ? Amicalement, elle l’admoneste : « l’art n’est pas slmt de la critique et de la satire «. Flaubert lui répond qu’il n’a jamais voulu faire de la critique ni de la satire. Il n’écrit pas ses romans pour communiquer ses jugements aux lecteurs. Une toute autre chose lui tient à cœur : « Je me suis toujours efforcé d’aller vers l’âme des choses «. Pdt des siècles, la peinture et la musique ont été au service de l’Eglise, ce qui ne les a nullement privées de leur beauté. Mais mettre un roman au service d’une autorité, si noble soit-elle, serait impossible pour un véritable romancier. Le roman a sa morale propre : la seule morale du roman est la connaissance. Le roman qui ne découvre aucune parcelle de jusqu’alors inconnue de l’existence est immoral.    Situations    Comme il y a un théâtre de caractère et un théâtre de situation, il y a un roman de caractère (roman de la fascination psychologique) et un roman de situation (roman de l’analyse existentielle). Les trois romans de Kafka sont trois variantes de la même situation : l’homme entre en conflit non pas avec un autre homme mais avec un monde transformé en une immense administration. Kafka se détourne de la psychologie pour se concentrer sur l’examen d’une situation.

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« de temps en temps, une voix d’homme qui demande au cocher de prendre une direction toujours nouvelle pour que le voyage continue et que la séance d’amour nefinisse jamais.

L’une des plus fameuses scènes érotiques de la littérature a été déclenchée par une banalité totale : un innofensif emmerdeur et l’obstination de sonbavardage.

Au théâtre une grande action ne peut naître que d’une grande action.

Seul le roman a su décourvir l’immense et mystérieux pouvoir du futile. TROISIÈME PARTIEALLER DANS L’ÂME DES CHOSES Aller dans l’âme des choses « Le reproche que je fais à son livre ; c’est que le bien est trop absent », dit Sainte-Beuve de Madame Bovary.

Pq demande-t-il, n’y a-t-il pas dans ce roman « un seulpersonnage qui soit de nature à consoler, à reposer le lecteur par un bon spectacle ? ».

Vingt ans plus tard, dans une lettre, Sand dit à Flaubert à peu près la mêmechose : pq apporte-t-il au lecteur la « désolation » tandis qu’elle préfère les « consoler » ? Amicalement, elle l’admoneste : « l’art n’est pas slmt de la critique et de lasatire ».

Flaubert lui répond qu’il n’a jamais voulu faire de la critique ni de la satire.

Il n’écrit pas ses romans pour communiquer ses jugements aux lecteurs.

Unetoute autre chose lui tient à cœur : « Je me suis toujours efforcé d’aller vers l’âme des choses ».

Pdt des siècles, la peinture et la musique ont été au service del’Eglise, ce qui ne les a nullement privées de leur beauté.

Mais mettre un roman au service d’une autorité, si noble soit-elle, serait impossible pour un véritableromancier.

Le roman a sa morale propre : la seule morale du roman est la connaissance.

Le roman qui ne découvre aucune parcelle de jusqu’alors inconnue del’existence est immoral. Situations Comme il y a un théâtre de caractère et un théâtre de situation, il y a un roman de caractère (roman de la fascination psychologique) et un roman de situation (romande l’analyse existentielle).

Les trois romans de Kafka sont trois variantes de la même situation : l’homme entre en conflit non pas avec un autre homme mais avec unmonde transformé en une immense administration.

Kafka se détourne de la psychologie pour se concentrer sur l’examen d’une situation. QUATRIÈME PARTIEQU’EST-CE QU’UN ROMANCIER ? Le poète et le romancier Pour comprendre, il faut comparer dit Broch.

Le contenu de la poésie lyrique, dit Hegel, est le poète lui-même ; il prête la parole à son monde intérieur pour éveillerchez ses auditeurs les états d’âme qu’il ressent.

Le romancier naît sur les ruines du monde lyrique.

Dans l’édition de poche de 1972 de Madame Bovary, il y a deuxpréfaces, l’une d’un écrivain, Montherlant, et l’une d’un critique littéraire, Maurice Bardèche.

Montherlant écrit : « Ni esprit, ni nouveauté de pensée, ni alacritéd’écriture, ni coups de sonde imprévus et profonds dans le cœur humain, ni trouvailles d’expression, ni drôlerie : Flaubert manque de génie à un point qui n’est pascroyable ».

Il faut savoir, continue-t-il qu’il n’est pas « de la même pâte qu’un Racine, un Saint-Simon, un Chateabriand, un Michelet ».

Bardèche confirme ceverdict et raconte la genèse de Flaubert romancier.

Conversion de Flaubert : il lit la Tentation de Saint-Antoine à un petit cercle d’amis qui lui conseillent de sedébarasser de ses « envolées romantiques », de ses « grands mouvements lyriques ».

Flaubert obéit et entreprend trois ans plus tard l’écriture de Madame Bovary.

Ceque raconte Bardèche, c’est l’histoire d’une conversion : Flaubert a 30 ans, le juste moment pour déchirer la chrysalide lyrique. La douceur du comique Après une soirée mondaine passée en la compagnie de madame Arnoux, Frédéric, enivré de son avenir, rentre chez lui et s’arrête devant un miroir : « Il se trouvabeau – et resta un minute à se regarder ».

« Une mintute » : ds cette mesure précise du temps, il y a toute l’énormité de la scène.

Il est enfermé dans son moi lyrique etil ne sait pas que la douce lueur du comique s’est posée sur lui.

La conversion anti-lyrique est une expérience fondamentale pour le romancier ; éloigné de lui-même,il se voit soudain à distance, étonné de ne pas être celui pour qui il se prenait.

Après cette expérience, il saura qu’aucun homme n’est celui pour qui il se prend et quece malentendu est élémentaire et qu’il projette sur les gens, par ex Frédéric, la douce lueur du comique.

Cette lueur du comique, soudain découverte, est larécompense, discrète et précieuse de sa conversion.

Emma Bovary, vers la fin de son histoire, après avoir été éconduite par les banquiers et abandonnée par Léon,monte dans la diligence.

Devant la portière ouverte, un mendiant poussait « une sorte de hurlement sourd ».

A ce moment, « elle lui envoya, par-dessus l’épaule, unepièce de cinq francs.

C’était toute sa fortune.

Il lui semblait beau de la jeter ainsi ».

La dernière phrase révèle ce que Flaubert a bien vu mais ce dont Emma n’est pasconsciente : elle n’a pa slmt fait un geste généreux, elle s’est plu à le faire ; même dans ce moment d’authentique désespoir, elle n’a pas manqué d’exiber son geste,pou elle-même, voulant paraître belle. La gloire Dans Hugoliade, pamphlet contre Victor Hugo, Ionesco écrit : « La caractéristique de la biographie des hommes célébres est qu’ils ont voulu être célèbres.

Lacaractéristique de la biographie de tous les hommes est qu’ils n’ont pas pensé ou voulu être des hommes célèbres.

Un homme célèbre est dégoûtant ».

La gloire est undéséquilibre : l’homme devient célèbre qd le nb de ceux qui le connaissent dépassent nettement le nb de ceux qu’il connaît lui-même. Le verdict de Marcel Proust Proust n’a pas écrit La Recherche pour raconter sa vie mais pour éclairer aux yeux des lecteurs leur vie à eux : « chaque lecteur est, qd il lit, le propre lecteur de soi-même.

L’ouvrage de l’écrivain n’est qu’une espèce d’instrument optique qu’il offre au lecteur afin de lui permettre de discerner ce que, sans ce livre, il n’eût peut-être pas vu en soi-même.

La reconnaissance en soi-même de ce que dit le livre est la preuve de la vérité de celui-ci ».

Ces phrases de Proust ne définissent pas que lesens du roman proustien, elles définissent le sens de l’art du roman tout court.. »

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