Le Voleur de Darien
Publié le 27/03/2013
Extrait du document
Le Voleur, publié en 1896, appartient à une époque marquée par le sentiment de la décadence. Le roman fut rapidement oublié après sa publication, mais redécouvert - et cela n'est pas étonnant, car il annonce Alphonse Allais, Jarry et Roussel - par les surréalistes et André Breton, qui voyait en son auteur un « coeur bien trop battant pour ne pas heurter en tous sens les parois de la cage«.
«
« Un geste de fauve,
t errible et mue t, le bond du tigre, pareil à l'essor d' un oiseau
tragique ...
» (id.)
EXTRAITS ~~~ ~~~~-
La morale ne saurait être publique
-Le repentir, dit l'abbé, une des colonnes du
christianisme, qui semble faire des amours
à /'homme et lui dire :
« Tu peux mal agir, à
condition que
tu fasses semblant de regret
ter tes
méfaits», est une excellente invention,
merveille de lâcheté et
d'hypocrisie, admira
blement adaptée aux
besoins modernes.
( ...
)
Quant à
la morale, il n'y
en a jamais eu qu'une.
Ce
n'est pas celle qui
dit à l'homme :
« Sois
bon», ou« sois pur», ou
« sois ceci, ou cela »;
c'est celle qui lui dit sim
plement :
« Sois ! » Voilà
la morale.
Ellen' a rien à
voir avec la Société ac
tuelle.
La morale ne sau
rait être publique, quoi
qu'en dise
le Code.
Vous
voulez peut-être parler
de
la moralité ? C'est un
succédané pitoyable.
Il y a ceux qui volent
avec une fausse clef,
et ceux qui volent avec la loi
C'est le seul moyen de les jeter à bas, dis
je.
Lorsque les voleurs se seront multipliés
à tel
point que la gueule de la prison de
pourra plus se fermer, les gens qui ne sont
ni législateurs ni criminels finiront bien
par
s'apercevoir qu'on pourchasse et qu'on in
carcère ceux qui volent avec une fausse
clef
parce qu'ils font les choses mêmes pour les
quelles on craint, on obéit
et on respecte
ceux qui volent avec un décret.
Ils com
prendront que ces deux espèces
de voleurs
n'existent que /'une par /'autre; et, quand
ils se seront débarrassés des bandits qui légifèrent,
les bandits qui coupent les
bourses auront aussi disparu.
L'art contre la servitude
-Je ne sais pas si tut' en es aperçu, conti
nue
Roger; mais les toiles des grands
maîtres qui illuminent les murs des mu
sées, les poèmes de pierre ou de marbres
qui resplendissent sous leurs voûtes, sont
des appels
à/' indépendance.
Ce sont des
cris vibrants vers la vie belle et libre, des
cris pleins de haine et de dégoût
pour les
moralités esclavagistes
et les légalités
meurtrières.
-Non, dis-je,je ne m'en étais pas aperçu
complètement; mais
j'en avais le senti
ment vague.
Je le vois maintenant :
c'est
vrai.
Et le chef-d'oeuvre( ...
) est une pro
testation véhémente
et
superbe de la Liberté et
de la
Beauté contre la
Laideur et la Servitude;
et/' homme, quelles que
soient la hideur qui le
défigure et la servitude
qui pèse sur lui, peut
entendre, s'il le veut,
comme il faut
qu'il/' en
tende, cette
voix qui
chante la grandeur de
/'Individu et la haute
majesté de la Nature :
cette
voix fière qui
étouffe les bégaiements
honteux des bandes de
pleutres qui font les
lois, et des troupeaux de
couards qui leur obéis
sent.
Voilà pourquoi, sans doute, les gou
vernements nés de capital et du monopole
font tout ce qu'ils peuvent pour écraser
/'Art qui les terrorise, et ont une telle
haine du chef-d' œuvre.
Pour sauver l'enfant
de Charlotte, Randal
sera poussé malgré lui
à commettre un crime
(id.)
N OTES DE L'ÉDITEUR souci : être lui-même, rien que lui-même.
bout,
il nous tient par une alliance
« Peu importe à Darien la poésie, et que
l'intrigue de son roman soit insoutenable :
à travers
Le Voleur, il est visible que rien ne l'a
tant passionné que de s'inscrire en faux contre
toutes les raisons que la société
développe pour convaincre l'individu qu'il
n'a
pas à broncher et, s'il n'est pas satisfait, qu'il
ne lui reste
qu'à s'en remettre à quelque Église
ou à quelque parti du soin de son salut.
»
Pascal Pia, Les Lettres nouvelles, sept.
1955.
« Ni révolté, ni insurgé, ni socialiste, ni
anarchiste, ni libertaire, il
n'a qu'un seul (
...
)C'est Zarthoustra en action,
Zarathoustra qui serait descendu de son
abrupte montagne pour se mêler aux
humains afin de les éclairer, de les exhorter
à devenir des hommes, de vrais hommes, et
qui, au milieu des multitudes abruties, se
serait senti plus affreusement solitaire que
là-haut, sur les sommets battus des vents.
»
Auriant, Darien et l'inhumaine comédie,
Jérôme Martineau éditeur.
« Randal parle, parle beaucoup, mais nous
refuse toujours le dernier mot.
Jusqu'au
1 coll.
Viollet 2.
3, 4 dessins de Seyer, éd.
Les Humanoïdes associés, SENHA,1986 /cliché Sipa Jcono
imprévue : la révolte totale avec un ton tout
de distance
et d'humour.
Ce désespéré
s'amuse.( ...
) Son monologue agressif et
brillant s'achève sur le silence et la mort et
nous comprenons alors : son rôle est surtout
de nous inquiéter.
Ce qui effraie en lui
n'est
pas qu'il vole, mais qu'il pense, et nous
pousse à penser, c'est-à-dire à exercer notre
liberté.
En dépit des apparences, ce voleur
là est plus proche de Prométhée que
d'Arsène
Lupin.» Patrick Besnier, préface
du
Voleur, Gallimard, 1987.
DARIEN02.
»
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