Lettre sur la tolérance
Publié le 12/04/2013
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Le philosophe anglais John Locke est né à Wrington en 1632. Il a été médecin du comte de Shaftesbury, puis il a séjourné en France de 1672 à 1679. Suspect politiquement, il reste sur le continent et s'installe en Hollande. Après la-révolution de 1688, il devint commissaire royal au Commerce et aux Colonies. Son œuvre majeure est libéralisme, en affirmant que le pacte social n'annihile pas les droits naturels des individus (Traité sur le Gouvernement civil, 1690). Il meurt à Oates enl 704. En posant ce principe que la foi est sans commune mesure avec la politique et que l'Église doit garantir, en vertu de leur extériorité réciproque, le respect de la foi de l'individu par l'État. C'est pourquoi le problème de la tolérance n'est pas un problème religieux, ni même un problème de conscience, pour Locke, mais exclusivement un problème politique. Il faut d'ailleurs donner au mot de politique son sens plein et se garder d'oublier ici que Locke n'a jamais conçu la politique autrement que comme l'expression et l'application d'une philosophie et, autant que faire se peut, comme l'effort entrepris pour prolonger et parachever une morale. Or, on peut dire que sa philosophie a eu pour moyen et pour but d'assurer, dans l'homme, la liberté du jugement, principe l' Essai sur l'entendement humain, qui pose le problème de l'origine et des limites de la connaissance. Philosophe empiriste, il se présente aussi comme le défenseur du
Lorsque Locke rédige la Lettre, il se trouve en exil, car ses positions politiques étaient suspectes aux Stuarts. Il a trouvé refuge auprès d'une communauté religieuse en Hollande. Cette Lettre en latin est d'abord publiée de manière anonyme à Amsterdam, alors que Locke a pu retourner en Angleterre. Elle est aussitôt traduite en français et en anglais.
«
Voltaire connaissait
parfaitement la .
philosophie de Locke
et, reprenant certains de
ses arguments,
il sera
l 'un de ses plus
illustres héritiers.
Il a
été considéré comme
le champion de la
tolérance à l'époque
des Lumières.
~ ----- --EXTRAITS
Avant d'examiner la fonction de l'État,
Locke explique pourquoi il s'agit
de
le séparer clairement de l'Église
La tolérance à l'égard de ceux qui ont
des opinions religieuses différentes est si
conforme à l'Évangile et à
la raison qu'il
semble monstrueux que des hommes puis
sent
n'y point voir dans une si claire lu
mière.
Quant à moi,
je ne veux pas accuser
ici l'orgueil ou l'ambition des autres, leurs
excès et leur fanatisme privé de charité et
de mansuétude ; ce sont
là des vices qui ne
peuvent peut-être pas être extirpés des
choses humaines.
Mais ils sont néanmoins
d'une telle nature que personne ne veut en
subir ouvertement le reproche ; il n'y a
quasiment personne qui, dévoyé
par ces
vices, ne recherche la louange après les
avoir cachés sous une honnête apparence.
Mais, afin que personne ne donne
pour
prétexte à une persécution et à une cruauté
peu chrétiennes le souci de l'État et le
respect des lois ; et afin, au contraire, que
d'autres, sous le couvert de la religion, ne
cherchent
pas la licence des mœurs et
l'impunité de leurs crimes; afin, dis-je, que
personne, soit comme sujet fidèle du prince,
soit comme croyant sincère, n'en impose ni
à lui-même, ni
aux autres; j'estime qu'il
faut avant tout distinguer entre les affaires
de
la cité et celles de la religion et que de
justes limites doivent être définies entre
l'Église et l'État.
Locke présente sa conception
de l'Église
L'Église me semble être une société libre
d'hommes volontairement réunis pour
adorer publiquement Dieu de lafaçon qu'ils
jugent lui être agréable et propre à leur faire
obtenir
le salut.
Je dis que c'est une société
libre
et volontaire.
Nul ne naît membre
d'une Église quelconque, sinon la religion du
père et des grands-parents passerait aux
enfants
par droit héréditaire, en même
temps que les terres, et chacun devrait sa foi
à sa naissance : on ne peut rien penser de
plus absurde.
Voici donc comment il faut
concevoir les choses; L'homme n'est pas
par nature astreint à faire partie d'une
Église, à être lié à une secte ; il se joint spon
tanément à la société au sein de laquelle il
croit que l'on pratique
la vraie religion et
un culte agréable à Dieu.
L'espérance du
salut qu'il y trouve ayant été la seule cause
de son entrée dans l'Église, elle sera de
même
la seule raison d'y demeurer.
Que s'il
découvre ensuite quelque erreur dans la
doctrine ou quelque incongruité dans le
culte, il est nécessaire que
la même liberté
avec laquelle il est entré lui ouvre toujours
la sortie ; aucun lien, en effet, ne peut être
indissoluble, sinon ceux qui sont attachés à
l'attente certaine de la
Vie éternelle.
Une
Église rassemble des membres spontané
ment unis en elle, en vue de cette fin.
Traduction de Raymond Palin, PUF, 1965
Caricature de 1686
critiquant les jésuites et
la persécution contre
les réformés
NOTES DE L'ÉDITEUR
Le .
philosophe anglais John Locke est né à
Wrington en 1632.
Il a été médecin du
comte de Shaftesbury, puis
il a séjourné en
France de 1672
à 1679.
Suspect politique
ment, il reste sur le continent et s'installe en
Hollande.
Après
la-révolution de 1688, il
devint commissaire royal au Commerce et
aux Colonies.
Son œuvre majeure est libéralisme,
en affirmant que le pacte social
n'annihile pas les droits naturels des
individus
(Traité sur le Gouvernement civil,
1690).
Il meurt à Oates enl 704.
En posant
ce principe que la foi est sans commune
mesure avec la politique et que l'Église doit
garantir, en vertu de leur extériorité
réciproque, le respect de la foi de l'individu
par l'État.
C'est pourquoi le problème de la
tolérance
n'est pas un problème religieux, ni
même un problème de conscience, pour
Locke, mais exclusivement un problème
politique.
Il faut d'ailleurs donner au mot de
politique son sens plein et se garder d'oublier
ici que Locke
n'a jamais conçu la
politique autrement que comme l'expression
et l'application
d'une philosophie et, autant
que faire se peut, comme l'effort entrepris
pour prolonger et parachever une morale.
Or, on peut dire que sa philosophie a eu
pour moyen et pour but d'assurer, dans
l'homme, la liberté du jugement, principe
l' Essai sur l'entendement humain, qui pose
le problème de l'origine et des limites de la
connaissance.
Philosophe empiriste,
il se
présente aussi comme le défenseur du
1 Ediméd ia 2 B .N.
3 Gira udon I Nico las Bouv ie r
de toutes les autres libertés.
D'après
Raymond
Palin, introduction à la Lettre
sur
la tolérance, Institut International de
Philosophie,
Presses Universitaires de
France,
Paris, 1965.
LOCKE 02.
»
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