L'homme qui rit. Roman de Victor Hugo (analyse détaillée)
Publié le 22/10/2018
                             
                        
Extrait du document
 
                                L'homme qui rit. Roman de Victor Hugo (1802-1885), publié simultanément à Bruxelles chez Lacroix, Verboeckhoven et Cie, et à Paris à la Librairie internationale en 1869.
Écrit à Bruxelles et à Guernesey entre 1866 et 1868, ce roman foisonnant rencontra l'incompréhension. L'homme qui rit, œuvre métaphysique et politique, fondée sur l'antithèse, développe à travers une écriture superbement baroque un mythe de l'humanité, où se retrouvent Job et Prométhée.
Première partie. « La Mer et la Nuit ». En Angleterre, sous le règne de la reine Anne, un vagabond, le saltimbanque Ursus, accompagné du loup Homo, recueille deux enfants abandonnés : l'un, qui arbore un « rire » perpétuel -infirmité que lui ont infligée ses ravisseurs, les Comprachicos -, a pu échapper au naufrage de l'ourque Matutina, leur bateau ; l'autre est une petite aveugle trouvée près de sa mère morte.
Deuxième partie. « Par ordre du roi ». Ces misérables forment un trio de mimes itinérants dans leur « Green-Box », trio auquel la laideur de Gwynplaine, le garçon, a apporté une certaine renommée. Gwynplaine et Dea, les deux jeunes gens, s'aiment tendrement Durant l’hiver 1704-
1705, ils arrivent à Londres, où ils jouent leur pantomime, Chaos vaincu. La chamelle lady Josiane. épouse de lord David Dirry-Moir, héritier des biens de la famille Qanchariie, assiste à une représentation, et fascine Gwynplaine. Au sein d'une intrigue compliquée menée par le sournois Barkipheldro, âme damnée de Josiane, Gwynplaine, arrêté, est reconnu pour être le baron Clanchariie, pair du royaume, jadis enlevé à sa famille. Ursus croit Gwynplaine mort et tente vainement de cacher sa disparition à Dea. Le mariage de Josiane étant annulé, la reine lui donne alors Gwynplaine pour époux Josiane le chasse de sa chambre, réservée à l'amant et interdite au mari. À la Chambre des lords, Gwynplaine déclenche l'hilarité générale en défendant la cause des misérables, discours à l'issue duquel il éclate en sanglots qui ne font qu’accentuer son rictus. Il prend la fuite, alors que David, son frère, le provoque en duel. De retour vers la « Green-Box », il ne trouve qu'Homo, qu'il entraîne à sa suite.
Conclusion. « La Mer et la Nuit ». Gwynplaine rejoint un bateau qui emmène ses compagnons. Dea meurt entre ses bras après avoir retrouvé la vue. Brisé par la douleur, mais ayant enfin un sourire sur ses lèvres mutilées, Gwynplaine se jette à l'eau. Homo hurle « dans l’ombre en regardant la mer ».
Comme les Travailleurs de la mer (1866), le roman s'ouvre et se clôt sur un engloutissement. Comme Gilliatt, Gwynplaine éprouve un amour sublime pour Dea, et achève sa vie dans le sacrifice. Mais le roman, s'il consacre,comme Quatrevingt-Treize, l'assomption des âmes, ne laisse en place ni un couple heureux ni l'amorce d'un progrès. Tout est reporté vers un avenir hypothétique. C'est que la seconde partie, sous couvert d'une description de la société anglaise du début du xviiie siècle, dévoile le principe de toute société humaine historique, et d'abord de la France du second Empire : exploitation, dénaturation, perversion.
 
                                «
                                                                                                                            comme 	*Quatrevingt-Treize, 	l'assomp
tion  des âmes, 	
ne 	laisse 	en 	place 	ni 	un 	
couple  heureux 	ni 	l'amorce 	d'un 	pro
grès.
                                                            
                                                                                
                                                                     Tout  est reporté  vers 	
un 	avenir 
hypothétique.
                                                            
                                                                                
                                                                     C'est que la seconde 
partie,  sous couvert 	
d'une 	description 
de  la société  anglaise 	
du 	début 	du 	
xvme 	siècle, dévoile  le principe  de toute 
société  humaine  historique , 	
et 	d'abord 
de  la France  du second  Empire : exploi
tation,  dénaturation,  perversion.
                                                            
                                                                                
                                                                    
L'Angleterre  n'apparaît pas comme 
libre  nation,  mais comme  terre de 
cohabitation  entre la liberté  parlemen
taire 	
et 	les  survivances  féodales.
                                                            
                                                                                
                                                                    	Ananké 	
[fatalité] des lois,  celle-ci  y est 	bien 	
sociale,  comme dans 	les 	"Misérables.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
Gwynplaine, 	qui 	veut se faire 	« le 
Verbe 	
du 	Peuple» , 	annonce  l'illumina	
tion 	de la vérité,  le passage  du faux 
paradis  des richesses  matérielles 
confisquées  par 	
une 	aristocratie tyran-	.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
nique au véritable  éden 	du 	bonheur 	partagé, utopie d'	un 	âge 	d'or 	à venir.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Gwynplaine,  cet héritier 	
du 	Quasi	
modo 	de 	*Notre-Dame  de Paris 	et 	du 	Satyre  de 	la 	*Légend e des  siècles, 	se 
définit 	
par 	sa  dualité.
                                                            
                                                                                
                                                                    · Saltimbanque 	et 	
lord,  déchiré  entre la tentation  de la 
chair 	
et 	l'appel  de l'idéal,  ténèbres  et 
lumière , âme  sublime  dans 	
un 	corps 
grotesquement  laid, 	
il ne peut  réconci
lier  sur terre  l'aspiration  au ciel  et le 
vertige  de l'abîme.
                                                            
                                                                                
                                                                     Être monstrueux, 
issu  du gouffre, 	
il est 	un 	condensé  de 
l'humanité, 	
dont 	la 	grimace  dit 
l'oppression.
                                                            
                                                                                
                                                                     Exemplaire et difforme, 	
«Abel 	et 	Caïn  dans le même 	homme», 	
il inverse  le mythe  de 	job 	puisque  la 
fortune 	
ne 	lui  vaut  que malheur, 
s'élève  à la  grandeur  prométhéenne 
devant  les Lords,  pour finir 	
en 	Titan 
abattu.
                                                            
                                                                                
                                                                     Auprès  de ce héros,  Dea, 	
qui 	voit par 
le  cœur,  incarne  la cécité 	
du 	voyant, 	et 	
possède  la connaissance  intuitive des 
mystères  de la création.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
À l'inters ection 	
du 	réel 	et 	du surnaturel,  elle figure 
l'innocence,  et 	
stella maris, 	guide 	en 	
vierge  prêtresse  Gwynplaine.
                                                            
                                                                        
                                                                    	À 	sa 
lumière  astrale s'oppose  l'éclat 
de 	josiane, perverse 	et 	divinement  belle, 	
toute 	flamboyante  de désir.
                                                            
                                                                                
                                                                    	Ève, 	
«Titane,., 	ange  noir,  elle représente  les 
troubles  séductions 	
du 	sexe.
                                                            
                                                                                
                                                                    Gwyn
plaïne,  ce monstre  d'apparence,  ne 	
peut 	que séduire  le monstre  intérieur.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
Ursus, 	l'homme, 	et 	Homo, le loup, 	
dont 	les  noms  inversent  symbolique	
ment 	la 	nature 	et 	les constituent 	en 	
couple,  unis par l'amitié  et le dévoue
ment, 	s'opposent  aux produits  de la 
corruption  générale, les maléfiques 
Comprachicos  et le  méchant  Barld
pheldro,  l'être démoniaque  des 
complots, 	
tout 	entier 	du 	côté  de la des
truction.
                                                            
                                                                                
                                                                     Figure de l'éloquence  déré
glée,  bavard  impénitent,  Ursus, adepte 
du  soliloque  et de  la ventriloquie,  phi
losophe  et poète,  est 
un 	créate.ur 	
dégradé.
                                                            
                                                                                
                                                                     Conjurant  sa misanthropie 
par  l'illusion  du verbe, 	
il .incarne 	la 
bonté.
                                                            
                                                                                
                                                                     Tous  ces personnages  se trouvent 
mis 	
en 	scène 	par 	un 	narrateur  qui 
manifeste 	
son 	omniprésence  dans le 
commentaire  ou la digression.
                                                            
                                                                                
                                                                     Comme 
Ursus 	
et 	Gwynplaine, 	il 	pratique  la 
parole  intérieure,  dialogue avec soi ou 
avec  le cosmos,  invitant  le lecteur 	
à 	
une 	lecture  initiatique 	du 	monde	.
                                                            
                                                                                
                                                                    Le 	
noir 	et la blancheur  lumineuse  se.
                                                            
                                                                                
                                                                    
répondent 	
et 	s'impliquent  mutuelle	
ment.
                                                            
                                                                                
                                                                    	La 	nuit 	se définit  comme  pré
sence  de l'inconnu,  figuration méta
phorique 	
et 	symbolique 	du 	chaos,  de 
l'obscurantisme,  de la fatalité,  de la 
mort, 	
de.s 	pulsions  inconscientes,  de 
l 'é ros  charnel.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
La 	lumière  dissipatrice 
renvoie 	
à l'amour  mals aussi 	à la 	mort 	
libératrice, 	à la justice  et l'intégrité.
                                                            
                                                                                
                                                                    	Le 	
roman  chemine  des ténèbres 	vers 	la 
clarté , comme  le montre 	
Chaos 	vaincu.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
Mis 	en 	abyme  au centre 	d'un 	roman 
où  la fin  répond  au début, 
Chaos 	
vaincu, 	drame  allégorique  où se joue  la 	lutte 	du Bien  et du  Mal, 	ne 	provoque 
que  le rire 	
d'un 	peuple  aveuglé  par 	son.
                                                                                                                    »
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