Lucien Leuwen
Publié le 05/04/2013
Extrait du document
Lucien Leuwen, chassé de !'École polytechnique pour ses idées républicaines, découvre la société provinciale elle milieu militaire. Après l'échec de son amour pour Mme de Chasteller, il regagnera Paris et ses intrigues politiques.
Stendhal hésita entre plusieurs titres : L'Orange de Malte, Le Chasseur vert, Les Bois de Prémol et même Le Rouge et le Blanc, le Rouge représentant les idées républicaines et le Blanc les opinions royalistes. Premières éditions complètes, 1894, 1927.
«
Stendhal refusa de
publier
Lu cie n Leuwen
lorsqu'il était consul en
Italie .
En effet, il avait
peur que sa description
du régime de Louis
Philippe ne lui coûte
son poste .
«L'essentiel, pour un
unifo rme, c'est d 'être
joli au bal, et Je jaune jonquille est plus gai .• .
»
EXTRA ITS ~~~~~~~~
La carrière de Lucien Leuwen est due
aux relations de M.
Leuwen père
Comme M.
Leuwen, ce banquier célèbre,
donnait des dîners de
la plus haute distinc
tion,
à peu près parfaits , et cependant
n'était ni moral, ni ennuyeux, ni ambitieux ,
mais seulement fantasque
et singulier, il
avait beaucoup d'amis.
Toutefois,
par une
grave erreur, ces amis n'étaient pas choisis
de façon
à augmenter la considération dont
il jouissait et son ampleur dans le monde.
C'étaient, avant tout, de ces hommes d' es
prit et de plaisir , qui , peut-être,
le matin ,
s 'occupent sérieusement de leur fortune ,
mais,
le soir , se moquent de tout le monde ,
vont
à l' Opéra et surtout ne chicanent pas
le pouvoir sur son origine ; car pour cela,
il faudrait se fâcher , blâmer , être triste.
L'ennui de Lucien, en garnison
à Nancy, s'estompe grâce à sa rencontre
avec Mme de Chasteller
Lucien n'avait jamais rencontré dans la
société cette madame de Chasteller qui,
autre/ ois, l'avait vu
tomber de cheval
à
son arrivée à Nancy ;
il
l'avait oubliée ;
mais
par habitude, il
passait presque tous
les jours dans la rue
de la Pompe.
Il est
vrai
qu'il regardait
plus souvent l'officier
libéral , espion atta
ché au cabinet litté
raire de Schmidt, que
les persiennes vert
perroquet.
Une après-midi , les persiennes étaient ou
vertes ; Lucien vit un
joli petit rideau de
croisée
en mousseline brodée ; il se mit aus
sitôt, sans presque y songer,
à faire briller son
cheval .
Ce n'était point le cheval an
glais
du préfet, mais un petit bidet hongrois
qui prit fort mal la chose .
Le Hongrois se
mit tellement
en colère et
fit des sauts si extraordi
naires, que deux ou trois
fois Lucien
fut sur le
point d'être désarçonné .
« Quoi, à la même pla
ce !
» se disait-il en rou
gissant de colère ; et ,
pour comble de misère ,
dans les moments les
plus critiques, il vit le
petit rideau s'écarter
un
peu du bois de la croi
sée.
Il était évident que
quelqu'un regardait.
C'était , en effet , ma
dame de Chasteller qui
se disait :
« Ah ! voilà
mon jeune officier qui va
encore tomber!
»Elle le
remarquait souvent, comme il passait : sa
toilette était paifaitement élégante et pour
tant
il n'avait rien de gourmé.
Lucien n' arri vera pas à oublier
son
« a venture de Nanc y »
Le véritable caractère de Lucien ne pa
raissait
point encore .
Cela est drôle à
vingt-quatre ans.
Sous un extérieur qui
avait quelque chose de singulier et de
paifaitement noble, ce caractère était na
turellement gai et insouciant.
Tel il avait
été
pendant deux ans après avoir été
chassé de /'École, mais cette gaieté souf
frait actuellement une éclipse totale depuis
l'aventure de Nancy .
Son esprit admirait
la viva cité et les grâces de mademoiselle
Raimonde , mais il ne
pensait à elle que
lorsqu'il voulait tuer la partie la plus
noble de son âme.
« Son esprit admirait
la vivaci té et les grâces
de mademoiselle
Raimond e ...
»
N O TES DE L'ÉD ITEUR
Il y a plusieurs façons de lire Lucien
Leuwen.
O n peut mettre l'accent, comme le
fait
P aul Valéry, sur le roman d'amour:
«Jusque-là, je n 'avais rien lu sur l'amour
qui ne
m'eût excessivement ennuyé, paru
absurde ou inutile.
Ma jeunesse plaçait
l'amour si haut et si bas, que je ne trouvais
rien d'assez fort, ni d'assez vrai, ni d'assez
dur, ni d'assez tendre dans les œuvres les
plus illustres.
Mais dans
Leuwen, la
délicatesse extraordinaire du dessin de la
figure de Mme de Chasteller , l'espèce noble et
profonde du sentiment chez les héros, le
progrès
d'un attachement qui se fait tout
puissant dans une sorte de silence : et cet
art
eX:trême de le contenir, de le garder à l'état
incertain de soi-même, tout ceci me séduisit
et se
fit relire.
» Pa ul Valéry ,« Variété II»,
Stendhal, Gallimard, 1938.
courant.
Charles Maurras disait :
" Chef
d' œuvre de coquinologie politique".»
Pierre Barberis, Sur Stendhal, Éditions
Sociales/Messidor, 1982.
« Lucien Leuwen devrait être l'un des
romans français du
x1xe siècle les plus
populaires pour cette raison que
c'est sans
doute le plus grand roman français
politique.
Directement politique.
Intégralement politique.
Ce qui n'est pas si
« Pour bien comprendre la structure du
roman, il faut voir d'abord à quel point
il est imprégné de soucis moraux.
Si
Le Rouge développait la morale de
l 'énergie,
Lucien Leuwen développe une
morale de la conscience : Que faire pour
s'estimer
soi-même?» J.
Prévost, La
Création chez Stendhal, Gallimard, 1951.
1 Go ldne r / Sipa·lcono 2 peini ure de A.
Sche ffer , musée Renan, Paris/ Lauros-Oiraudon 3 dessin de L.
Rousselot, musée de I' Armée, Paris/ Lauros-Giraudon 4 musée Carnavalet/ Lauros-Giraudo n STENDHAL OS.
»
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