Mon oncle Benjamin
Publié le 05/04/2013
Extrait du document
Benjamin Rathery, médecin qui ne croit pas à la médecine, épousera-t·il Mlle Arabelle, fille et unique héritière du docteur Minxit, comme le veulent sa soeur et son beau-frère?
Mon oncle Benjamin (1843) a connu à ce jour trois adaptations cinématographiques : une adaptation française par René Le Prince (1923); une adaptation soviétique (Ne Pleure pas, titre français) de Gueorgui Daniela (1969) ; une adaptation francoitalienne plus connue, due à Édouard
Molinaro (1969).
«
« A quelque distance de là, Benja min et
Gaspar d renc on trèrent
un e troup e de p aysans
qu i re venaie nt de vêpres.,.
- ---- ---EXTRAITS
Tout le pittoresque de l'oncle
Benjamin apparaît dans
ce portrait
tracé
par le narrateur
Mon oncle Benjamin était domicilié chez sa
sœur ;
il avait cinq pieds dix pouces, portait
une grande épée au côté, avait un habit
de ratine écarlate, une
culotte de même cou
leur et de même étoffe,
des bas de soie gris de
perle, et des souliers à
'·- boucles d'argent ; sur
son habit frétillait une
grande queue noire
presque aussi longue
que son épée, qui, al
lant et venant sans
cesse,
l'avait badi
geonné de poudre, de
sorte
que l'habit de
mon oncle ressem
blait, avec ses teintes
roses
et blanches, à
une brique sur champ
écaillée .
Mon oncle
était médecin, voilà
pourquoi
il avait une
épée.
Je ne sais
si les malades avaient
grande confiance en lui, mais lui, Benjamin,
avait fort peu de confiance dans
la méde
cine ; il disait souvent qu'un médecin avait
assez fait quand
il n'avait pas tué son
malade .
Quand mon oncle Benjamin avait
reçu quelque pièce de trente sous, il allait
acheter une grosse carpe et la donnait à
sa sœur pour lui faire une matelote , dont
se régalait toute sa famille .
Mon oncle
Benjamin, au dire de tous ceux qui
l'ont
connu, était l'homme le plus gai, le plus
drôle,
le plus spirituel du pays, et il en eût
été le plus
...
comment dirai-je pour ne pas
manquer de respect à la mémoire de mon
grand-oncle
? ...
il en eût été le moins sobre,
si le tambour de
la ville, le nommé Cicéron,
n'eût partagé sa gloire .
Après avoir persuadé les habitants
de Moulot
qu 'il était le Juif errant
et que sa sœur était la Sainte Vierge,
Benjamin fait un miracle.
Un père
de famille de Moulot
s'est brisé la
mâchoire en
v·oulant casser une noix.
L e docteur Arnaut a diagnostiqué
une attaque de paralysie
-Je vois bien, Monsieur le Juif, dit la bonne
femme, que vous êtes capable de faire le
miracle que nous vous demandons.
- Des miracles comme celui-là, répondit
Benjamin,
j'en ferais cent par jour si j'en
étais fourni.
Il se
fit apporter une cuiller de fer et en
enveloppa l'extrémité de plusieurs bandes
de linge fin ;
il introduisit cet instrument im
provisé dans
la bouche
du patient, souleva la
mâchoire supérieure qui
avait enjambé sur la
mâchoire inférieure, et
la remit en son lieu
et
place; car ce Moulotat
n'avait pour toute mala
die que la mâchoire dé
traquée, ce que
mon
oncle , avec son coup
d' œil gris qui s' enfon
cait comme
un clou dans
chaque chose, avait
re
connu de suite.
Le para
lysé du matin déclara
qu'il était complètement
guéri, et il se mit à man
ger comme un forcené
d'une soupe aux choux
préparée
pour le dîner
de
la famille.
Le bruit se répandit dans la
fou le, avec
la rapidité de l'éclair, que le père Pintot
mangeait
la soupe aux choux.
Les malades
et tous ceux dont la nature avait un tant
soit peu altéré les formes imploraient la
protection de mon oncle.
«Vous avez b ien fai t
d e vous a dresser à moi,
m on bon Monsieur,
car je sai s mieu x
qu'elles l es déta ils
d e l'h istoire .
"
NOTES DE L'ÉDITEUR rien au charme et à la vivacité de ce
roman qui apparaît aujourd'hui encore
comme un petit chef-d'œuvre
d'humour.
»
Dictionnaire des œuvres de tous les temps
et
de tous les pays , Laffont-Bompiani.
mystificateur,
orgueilleux devant le riche
«Le livre est une sorte de roman picaresque
fort réussi, qui se rattache directement à la
tradition du
xvrne siècle, tant par les
évidentes intentions de satire sociale que
par les inventions plaisantes et le souriant
épicurisme qui l'anime de page en page.
Avec
soq style , simple et bon enfant, ses
digressidns complaisantes, sa frivolité
savoureuse, Tillier, en plein romantisme,
fait figure
d'attardé; mais cela n'enlève
« Dans la littérature française si riche
en créations de types originaux, conçus
comme l'expression générale des
tendances, des vertus et des vices humains,
Benjamin prend place comme représentatif
du Français discuteur, raisonneur,
1 détail du mo nument de C la ude Till ier par Émil e André Boissea u/ ND-V iollet 2.
3.
4.
S ill.
de D .
H.
Po nch on / éd.
La Tradition, Paris, 1937
et le puissant, humble envers le pauvre et
le misérable qui souffre.
Le personnage est
digne de sa réputation.
Le roman dont il
est le centre, en dépit des digressions et
des longueurs, a une délicate fraîcheur, une
verve éblouissante et présente deux qualités
aussi rares que précieuses : l'humour et
l 'amour de
l'humanité.» Francis P.
O'Hara,
Claude Tillier, sa vie et ses œuvres, thèse,
Paris, 1939.
TILLI ER 02.
»
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