RONSARD : Sonnets our Hélène
Publié le 22/02/2013
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Mais Ronsard sublime l'hostilité de son inspiratrice et célèbre l'insensible, utilisant les conceui (traits d' esprit) qui étaient alors à la mode, tout en y mêlant des exhortations ; c'est cette réalité terriblement quotidienne qui a valu à certains sonnets une célébrité méritée - quel écolier n'a appris celui qui commence ainsi: ...

«
Hélène l'insensible
Puisqu 'elle est tout hiver, toute la même glace,
Toute neige, et son cœur tout armé de glaçons,
Qui ne m'aime sinon pour avoir mes chansons,
Pourquoi suis-je si fol que
je ne m'en délace ?
De quoi me sert son nom, sa grandeur et sa race,
Que d'honnête servage et de belles prisons
?
Maîtresse , je n'ai pas les cheveux si grisons,
Qu'une autre de bon cœur ne prenne votre place .
Amour, qui est enfant, ne cèle vérité.
Vous n'êtes si superbe, ou si riche en beauté,
Qu
'il faill e dédaigner un bon cœur qui vous aime.
Rentrer en mon avril désormais
je ne puis :
Aimez-moi, s'il vous plaît, grison comme
je suis,
Et je vous aimerai quand vous serez de même .
« J'adorai vos beautés ; mais votre fier orgueil Ne s'amollit jamais pour larmes ni pour deuil.
»
EXTRAITS ----- -
«Je consacre à ton nom cette belle fontaine ...
»
La beauté n'est que vent
Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Dire z chantant mes vers, en vous émerveillant :
«Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle.
»
Lors vous n'aurez servante oyant telle nouvelle ,
Déjà sous
le labeur à demi sommeillant,
Qui au bruit de mon nom ne s' aille réveillant ,
Bénissant votre nom de louange immortelle.
Je serai sous la terre, et fantôme sans os
Par les ombres myrteuxje prendrai mon repos ;
Vous serez au foyer une vieille accroupie,
Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m
'en croyez, n'attendez à demain :
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie .
L'automne d'un poète
Adieu, belle Cassandre, et vous, belle Marie,
Pour qui je fus trois ans en servage à Bourgueil :
L 'une vit, l'autre est morte, et ores de son œil
Le Ciel se réjouit dont la terre est marrie.
Sur mon premier avril, d'une amoureuse envie
J'adorai vos beautés ; mais votre fier orgueil
Ne s'amollit jamais pour larmes ni pour deuil,
Tant d'une gauche main la
Parque ourdit ma vie.
Maintenant en Automne encore malheureux,
Je vis comme au Printemps de nature
amoureux,
Afin que tout mon âge aille au gré de la peine .
Ores que je dusse être affranchi du harnois,
Mon maître Amour m'envoie à grands coups de carquois
Rassiéger Ilion pour conquérir Hélène.
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Ces différents visages de femmes
[Cassandre , Marie, Hélène] n'ont
d'individualité que littéraire
.( ...
) Toutes,
elles furent
au service de la poésie , et
Ronsard sans vergogne les traite en sujets
littéraires :
" Quel sujet plus fertile saurai-je
mieux choisir/ Que le sujet qui fut
d'Homère le plaisir,/ Cette toute divine et
vertueuse
Hélène?" N 'en concluons pas
qu
'elles ne furent que des prétextes.
Chaque fois,
le miracle poétique semble avoir
confondu la jeune vivante et le halo de
mythes dont l'imagination de Ronsard
l'entourait.
Rêve et réalité , elles sont la vie,
recréée par la poésie, de même qu'il est
poète et amoureux, au-delà de la banale
sincérité.
» Françoise Joukovski, Les
Amours, préface, Gallimard, 1974.
Cassandre,
Marie la paysanne , ingénue et
rouée, Hélène l'insensible, qui méprise
l'amour, sont toutes des inhumaines, au
"cœur nonchalant, revêche et rigoureux".
Ronsard en effet chante l'amour impossible,
le seul possible en littérature.
Dotées de
dangereux pouvoirs, ces cruelles mêlent la
flamme et la glace, l'obscur et la lumière, et
entraînent le malheureux poète au-delà des
contraires, dans une totale révolution.
»
Ibid.
« Contrainte plutôt que joie, cet amour ne
rompt pas la solitude.
La dame est une
Méduse, une Sirène,
un rocher .
L'altière
1 co ll.
Yiollet 2, 3, 4 bois gravés de Léo n Zack, éditi ons A l a Vo ile Lat ine, Pari s.
19 4 6 / B .N.
RONSARD03.
»
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