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ROUSSEAU: Julie ou La Nouvelle Héloïse (Fiche de lecture)

Publié le 21/11/2010

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rousseau

«L'impossibilité d'atteindre aux êtres réels me jeta dans le pays des chimères, et ne voyant rien d'existant qui fût digne de mon délire, je le nourris dans un monde idéal, que mon imagination créatrice eut bientôt peuplé d'êtres selon mon coeur [...] Je me figurai l'amour, l'amitié, les deux idoles de mon coeur, sous les plus ravissantes images. Je me plus à les orner de tous les charmes du sexe que j'avais toujours adoré [...] Épris de mes deux charmants modèles, je m'identifiais avec l'amant et l'ami le plus qu'il m'était possible ; mais je le fis aimable et jeune, lui donnant au surplus les vertus et les défauts que je me sentais.«

 

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« Avec Les Confessions, dont il entreprend la rédaction en 1765, Rousseau donne naissance à un genre nouveau : l'autobiographie.

C'est sa propre histoire qu'il déroule devant les yeux du lecteur : «Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple et dont l'exécution n'aura point d'imitateur.

Je veuxmontrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme ce sera moi.» (Livre I) Publiées après la mort de Rousseau, 1782 et 1789, Les Confessions comportent douze livres, divisés en deux parties. Les six premiers livres, rédigés entre 1765 et 1770, couvrent les trente premières années de sa vie.

Pleins defraîcheur et d'allégresse, ils sont une évocation nostalgique du bonheur de l'enfance et de l'adolescence.

Rousseaus'y décrit comme un être imaginatif et hypersensible, prompt à s'émerveiller des beautés de la nature et des plaisirssimples de la vie.

Placée sous le signe du bonheur, cette première partie culmine au sixième livre avec la relation duséjour de Jean-Jacques aux Charmettes, chez Mme de Warens : «Ici commence le court bonheur de ma vie ; ici viennent les paisibles mais rapides moments qui m'ont donné ledroit de dire que j'ai vécu.

Moments précieux et si regrettés ! ah ! recommencez pour moi votre aimable cours,coulez plus lentement dans mon souvenir, s'il est possible, que vous ne fîtes réellement dans votre fugitivesuccession [...].

Je me levais avec le soleil, et j'étais heureux ; je me promenais, et j'étais heureux ; je voyaisMaman, et j'étais heureux ; je la quittais, et j'étais heureux.» (Livre VI) 0.

Rien de cela n'a duré.

La suite des Confessions, écrite entre 1769 et 1770, et qui couvre les années 1741-1765, laisse place à la rancoeur et à l'amertume : «Quel tableau différent j'aurais bientôt à développer ! Le sort, qui durant trente ans favorisa mes penchants,les contraria durant les trente autres, et, de cette opposition continuelle entre ma situation et mesinclinations, on verra naître des fautes énormes, des malheurs inouïs...» (Livre VII) Si ce changement de ton, cette nouvelle âpreté, s'expliquent par les circonstances défavorables que dut affronterRousseau dans la seconde moitié de son existence, ils reflètent surtout l'état d'esprit dans lequel se trouve l'écrivainau moment où il entreprend Les Confessions: il s'agit avant tout pour Rousseau de répondre aux attaques dont il a été l'objet.

Très affecté par la condamnation de l' Émile et du Contrat social, bouleversé par les attaques de Voltaire dans son pamphlet, Rousseau, obsédé par l'idée du complot qui se trame contre lui, veut se justifier devantl'opinion et rétablir la vérité. 2.

«MA VIE EST MA MEILLEURE DÉFENSE» Le titre des Confessions, emprunté à saint Augustin, indique d'emblée l'intention de Rousseau : avouer les fautes qu'il a commises pour obtenir le pardon ; se disculper en revanche des vices dont il est injustement accusé.

Avec celivre («le seul monument sûr de mon caractère qui n'ait pas été défiguré par rnes ennemis»), il se présente danstoute sa vérité devant le tribunal de Dieu et des hommes : «Que la trompette du Jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenterdevant le souverain juge.

Je dirai hautement : "Voilà ce que j'ai fait, ce que j'ai pensé, ce que je fus.

J'ai dit lemal et le bien avec la même franchise.

Je n'ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon [...] Je me suis mon-trétel que je fus ; méprisable et vil quand je l'ai été, bon, généreux, sublime, quand je l'ai été [...].

Être éternel,rassemble autour de moi l'innombrable foule de mes semblables ; qu'ils écoutent mes confessions, qu'ilsgémissent de mes indignités, qu'ils rougissent de mes misères.

Que chacun d'eux découvre à son tour soncoeur au pied de ton trône avec la même sincérité ; et puis qu'un seul te dise, s'il ose : Je fus meilleur que cethomme là."» (Livre I) Seul contre tous, Rousseau affiche sa singularité, avec deux obsessions : celle de la malveillance des hommesà son égard, celle de la responsabilité fondamentale de la société dans ses errements.

La première explique engrande part l'amertume dont sont empreints les six derniers livres.

Se sentant persécuté, Rousseau ne songeplus qu' à se justifier, glissant du plaidoyer à l'apologie : c'est la limite de sa sincérité qui se heurte au besoinpathétique qu'il éprouve de se présenter — quoi qu'il en dise — sous son jour le meilleur..Consciemment ou non,il fait alors subir à la vérité des distorsions qui idéalisent des situations vécues (le séjour aux Charmettes) oudramatisent des incidents sans importance. Plus encore que contre ses semblables, c'est contre la société en général que Rousseau exhale sa rancoeur.

«Manaissance fut le premier de mes malheurs», écrit-il aux premières pages.

Toute la suite tant à prouver qu'enfant,puis adolescent, épris de vertu, il a été perverti par la société.

C'est le sens du fameux épisode du peigne brisé, quirelate sa prise de conscience de l'injustice.

En pension chez le pasteur Lambercier, Jean-Jacques est injustementaccusé d'avoir brisé l'un des peignes de Mme Lambercier et reçoit, en punition, une fessée qu'il n'a pas méritée.C'est le premier apprentissage de l'âge d'homme, la découverte de l'imperfection du monde adulte, et la fin de l'âged'or de l'innocence : «Là fut le terme de la sérénité de ma vie enfantine.

Dès ce moment je cessai de jouir d'un bonheur pur, et je sens aujourd'hui même que le souvenir des charmes de mon enfance s'arrête. »

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