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SITUATIONS, de J.-P. Sartre

Publié le 15/05/2019

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sartre

SITUATIONS, titre sous lequel J.-P. Sartre a rassemblé en 10 volumes, de 1947 à 1976, ses articles, ses essais, ses entretiens, liés à l'actualité politique ou littéraire, et qui lui ont permis de situer l'homme moderne et de se situer lui-même par rapport aux grands problèmes contemporains. Les questions politiques occupent une place importante dans la série : dès Situations III (1949), Sartre évoque l'occupation allemande (« la République du silence », « Qu'est-ce

 

qu'un collaborateur? »), relate son premier voyage aux États-Unis ( « New York ville coloniale » ) et inaugure ( « Matérialisme et Révolution ») sa réflexion sur le marxisme qui se poursuivra notamment dans Situations VI (1964) et Situations VII (1965), qui répliquent, entre autres, aux critiques des idéologues du P. C. F. (en particulier Kanapa) comme à celles d'anti stalinien s, tels Claude Lefort, ou Pierre Naville, sur les contradictions sartriennes (comment concilier la stérilité de la pensée marxiste française avec la certitude que le parti communiste est dans « le sens de l'histoire » ?). La question coloniale nourrit Situations V (1964) qui réunit les prises de position de l'auteur sur la guerre d'Algérie et sur les rapports de l'Europe et du tiers monde (notamment l'importante préface aux Damnés de la terre de Frantz Fanon). Mai 68 est le sujet privilégié de Situations VIII (1972), qui précise le portrait de l'intellectuel dans la société. Cependant ce sont la littéra

sartre

« Dans ses Situations, Sartre a regroupé l'ensemble des essais qu'il a rédigés entre 1947 et 1976.

Le titre de ce recueil renvoieparfaitement à la philosophie qu'il a développée toute sa vie : l'homme vit dans un monde absurde, la seule façon qu'il a de donnerun sens à sa vie est d'agir, agir c'est être et pour être, il faut se situer car se situer c'est interpréter l'environnement (politique,social, économique, affectif, …)Le texte que nous proposons d'étudier est extrait des Situations, III, 2 où Sartre a rendu compte des impressions que lui ontlaissées les grandes villes américaines.

C'est à New York, capitale par excellence, qu'il s'attache particulièrement ici.Son approche est pour le moins surprenante.

En effet, d'abord, elle est très « impressionniste » : sa déclaration d'amour à la villeest extrêmement sensuelle.

Mais surtout, il parvient à y transformer ce symbole d'urbanisation qu'est New-York en un symbolede puissance sauvage et naturelle.Nous montrerons donc dans une première partie, comment Sartre est tombé amoureux de New York.Ensuite, nous verrons dans une deuxième partie qu'il cherche à partager et généraliser son expérience avec le lecteur (surtouteuropéen).Enfin, dans une troisième partie, nous verrons comment Sartre, parvient à transformer le symbole d'urbanisme le plus modernequ'est New York, en un symbole de puissance sauvage et naturelle. Ce texte nous raconte d'abord comment Sartre est tombé amoureux de la ville de New York.Effectivement, le texte s'ouvre directement sur une anaphore qui reprend trois fois de suite le pronom personnel « j' »/ « je », quidésigne évidemment Sartre lui-même.

A ce stade de la lecture, on peut donc imaginer qu'il va s'agir d'une histoire d'amourpersonnelle.« J'aime New York.

J'ai appris à l'aimer.

Je me suis habitué à ses ensembles massifs, à ses grandes perspectives.

»On a ici une gradation qui se développe sous deux formes.

C'est tout d'abord une gradation sur le plan mélodique, car lesphrases se prolongent progressivement.

C'est aussi une gradation pour la façon progressive avec laquelle Sartre a apprit à aimerNew York.

« J'aime New York.

» C'est un présent de l'indicatif à valeur énonciative.

« J'ai appris à l'aimer.

» et « Je me suishabitué à ses ensembles massifs, à ses grandes perspectives.

».

Ce sont là, deux passés composés qui permettent d'évoquer desactions accomplies au moment de l'énonciation, limitées dans le passé et antérieures au présent.De plus, quand Sartre dit « J'ai appris à l'aimer.

», on n'a l'impression pas que l'amour qu'il a pour New York, relève du coup defoudre traditionnel qui engendre l'amour, puisque ici l'amour semble avoir nécessité un apprentissage progressif.

Cette thèse seconfirme à la phrase suivante.

« Je me suis habitué à ses ensembles massifs, à ses grandes perspectives.

» Sartre, nous livre ici lapremière notion d'habitude qui s'est apparemment développée à travers le regard.

C'est donc avec l'habitude que Sartre a apprisà aimer New York.

Il n'y a pas eu de coup de foudre.Cependant, on peut penser que son amour pour New York est tel à présent, qu'il nécessite le besoin de personnifier la ville.

«J'aime New York ».

Effectivement, on dit aussi « j'aime » pour caractériser une relation que l'on a avec quelqu'un.On voit donc qu'il existe une véritable histoire d'amour entre Sartre et New York, principalement développée grâce à l'éducationdu regard et de l'esprit.« Mes regards ne s'attardent plus sur les façades, en quête d'une maison qui, par impossible, ne serait pas identique aux autresmaisons.

» On retrouve tout d'abord la notion d'habitude qui a permis à Sartre d'apprendre à aimer New York mais aussil'évocation du rôle du regard.

Effectivement, selon Sartre, « Quand on sait regarder les deux rangées d'immeubles qui comme desfalaises, bordent une grande artère, on est récompensé.

».

Ici, le verbe « savoir » suggère qu'il faut avoir une véritableconnaissance de la vue pour aimer New York.« Ils filent tout de suite à l'horizon chercher les buildings, perdus dans la brume, qui ne sont plus rien que des volumes, plus rienque l'encadrement austère du ciel.

» Ici, Sartre personnifie ses yeux.

Par ailleurs, on remarque qu'il donne une vision trèsgéométrique de New York car les buildings sont comparés à des volumes, le ciel est encadré par ces buildings et les maisonssemblent toutes identiques.

De manière générale, New York est pour lui un ensemble de « grandes perspectives ».« Elle s'évanouit hors de la ville et l'œil peut presque la suivre dans la campagne.

»Le champ lexical de la vue est donc très présent du début jusqu'à la fin du texte, si bien qu'on pourrait croire que New York estune ville sans bruit.Ainsi, Sartre nous explique que c'est avec l'habitude mais surtout avec l'éducation du regard, qu'il est progressivement tombéamoureux de New York. Pourtant, Sartre ne se contente pas de nous raconter une histoire personnelle à visée anecdotique.

Il s'arrange effectivement pourque le lecteur se sente concerné et entreprenne aussi une modification de sa façon de regarder le monde.Certes, chacun des trois paragraphes de ce texte commencent par le même pronom personnel « j' », ce qui laisserait penser si onse contentait uniquement de survoler rapidement du regard le texte, que tout tourne autour de Sartre et de son amour pour New. »

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