SURVEILLER ET PUNIR, Naissance de la prison, 1975. Michel Foucault (résumé & analyse)

SURVEILLER ET PUNIR, Naissance de la prison, 1975.

 

Michel Foucault, 1926-1984.

 

Ce texte vise à dresser la généalogie du pouvoir de punir dans son «complexe scien-tifico-judiciaire».

 

Jusqu’à la fin du xviiie siècle, les techniques punitives s’emparent du corps et le dépècent, le marquent symboliquement au visage ou à l’épaule, l’exposent vif ou mort. Mais l’éclat des supplices comporte un double péril. D’un côté, il révèle la tyrannie, l’excès, la soif de revanche du pouvoir; de l’autre, il accoutume le peuple «à voir ruisseler le sang» et lui apprend qu’il ne peut se venger qu’en faisant lui-même couler le sang. S’efface donc, au début du xixe siècle, le grand spectacle de la punition physique. La prison devient dès lors la forme essentielle du châtiment.

 

Si la prison s’est imposée comme modèle coercitif du pouvoir de punir, c’est parce qu’elle s’insère parfaitement dans ce que

 

Foucault appelle la société de surveillance «dont nous relevons toujours». Cette société, qui s’est formée tout au long de l’âge classique, se caractérise par tout un ensemble de procédures pour surveiller, dresser, contrôler les individus. L’investissement disciplinaire des corps est assuré par toute «une anatomie politique du détail», par un art de la répartition des individus au sein de l’espace, par un système de règlements minutieux. La surveillance hiérarchique, les examens, la sanction normalisa-trice achèvent l’emprise du pouvoir sur les corps, la maîtrise des multiplicités humaines.

 

Quoi d’étonnant, dès lors, si le grand renfermement carcéral a triomphé et si la prison ressemble aux usines, aux écoles, aux casernes, aux hôpitaux? Le point idéal de la pénalité moderne n’est-il pas, au fond, le même que celui de notre machine sociale: un interrogatoire qui n’aurait pas de terme, une enquête qui se prolongerait sans limite, une mise en observation minutieuse et perpétuelle des individus?