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TURCARET d'Alain René Lesage (résumé & analyse)

Publié le 08/11/2018

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TURCARET. Comédie en cinq actes et en prose d'Alain René Lesage (16681747), créée à Paris à la Comédie-Française le 14 février 1709, et publiée à Paris chez Pierre Ribou la même année.

 

En 1707, Lesage avait écrit les Étren-nes, qui furent refusées par les comédiens-français. L'année suivante, il refit la pièce et lui donna un nouveau titre, Turcaret. Il fallut en octobre 1708 l'ordre de Monseigneur (le Grand Dauphin) pour qu'ils acceptassent de la représenter.

 

Sans qu'on puisse dire qu'elle ait échoué (car les recettes demeuraient satisfaisantes), elle fut retirée de l'affiche après sept représentations. On devine quelque hostilité résolue. À l'égard de Lesage peut-être. Ou plus vraisemblablement à cause du sujet ? On supposera que les financiers n'aimaient pas être joués sur les planches

 

et que l'un d'entre eux a pu se reconnaître en Turcaret... ou en Fron-tin.

 

La Baronne, nuinée, est courtisée par le riche traitant Turcaret, qui l'accable de présents. Au lieu de s'enrichir de ces largesses, elle en fait pro fiter le Chevalier dont elle est éprise. La suivante Marine, qui tente de la détourner de ces prodiga lités, l'exaspère ; elle la chasse, et, pour mieux exploiter Turcaret, décide de placer chez le financier Frontin, qui était le valet du Chevalier (Acte 1). Marine a dénoncé à Turcaret les manè ges de la Baronne. Il lui fait une scène terrible, mais elle se disculpe. Frontin entre au service du traitant, et son amie Lisette remplace Marine chez la Baronne (Acte 11). Surviennent un Mar quis, ami du Chevalier, qui révèle à la Baronne que Turcaret fut jadis un laquais, puis M. Rafle, commis de Turcaret, qui pratique l'usure pour le compte de son man:re, et qui révèle à celui ci qu'une dangereuse coalition se trame contre lui. Turcaret ne se laisse pas impressionner et suit, au contraire, les conseils de Frontin, qui l'encou rage à de nouvelles dépenses (Acte Ill). Frontin parvient (avec la complicité de M. Furet, un faux huissier) à extorquer 1 0 000 livres au financier. Une revendeuse à la toilette, Mme jacob, se pré sente chez la Baronne et lui apprend qu'elle est la sœur (laissée dans la misère) du traitant, et que celui ci, contrairement à ses dires, n'est pas veuf, mais depuis dix ans a abandonné sa femme (Acte IV). La voici précisément qui appara?t: : se prétendant comtesse, elle a voulu séduire le Mar quis et le Chevalier, qui tous deux l'abandonnent en découvrant sa véritable identité. Turcaret, nuiné par un caissier, est arrêté. Frontin, qui n'a cessé de trafiquer et de tromper les uns et les autres, reste seul avec Lisette : il a déjà gagné quarante mille francs (Acte V).

 

Des nobles ruinés, qui se font entretenir (la Baronne, le Chevalier, le Marquis), un financier et sa femme à qui leurs plaisirs coûtent cher, un faux huissier caricatural, des valets sans scrupules : nous avons là une fresque sociale assez rude, une série de caricatures grinçantes. Aucune valeur, autre que l'argent : «Nous plumons une coquette ; la coquette mange un homme d'affaires : l'homme d'affaires

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« en pille d'autres ; cela fait un ricochet de fourb eries le plus plaisant du monde >> (1, 10).

Tous les moyens sont bons pour s'enrichir, et aucun cœur pur, aucun amoureux sincère, aucune ingénue, ne viennent ensoleiller cette sombre farce.

Est-ce à l'ordre social qu 'en veut Lesage ? Peut-être, mais il n'i magine pas de progrè s.

Ce déso rdre général, c'est le «train de la vie humaine >> (ibid .).

La pièce est baptisée Turcaret, et, si on organise la représe ntation autour du personnage du financier, elle prend un aspect presque tragiq ue.

Cet homme opulent, puissant, qui se croit aimé, qui, après s'être montré tant d' années si impitoyable, consent à des générosités un peu folles, va d'échec en échec.

Chaque acte lui apporte une nouvelle humiliation, lui inflige un nouveau désastre, jusqu'à la catastro­ phe finale.

Rien de consola nt ou d'en courageant dans cette chute : la déchéance de Turcaret n'est compen­ sée par rien.

À ce coquin va succéder un autre coquin, Frontin, qui aura les mêmes vices, et peut-être les mêmes faibl esses.

Il ne faut pas lire la pièce comme un drame psychol ogique : il est à pe ine des caractères parmi ces fantoches qui se succèdent.

Chaque acte ressemble plutôt à une «parade >>, et, à la fin de chaque acte, les serviteurs -Frontin ou Lisette -donnent aux spectateurs la moralité de ce qu'ils viennent de voir, jusq u'au cri final de Frontin : «Voilà le règne de M.

Turcaret fini; le mien va commencer >> (V, 14).

Ces commentai­ res, comme l'outrance des traits, nous feraient -sans trop d'exagérati on - penser à la distanciation brechtienne.

Nous assistons à la « résistible >> et fort édifiante ascension de Frontin.

Le comique réside parfois dans le la ngage .

On remarque des souvenirs burlesques de Racine : « Une nuit éter­ nelle >> (1, 1), «L a fortune t'appelle >> (Il, 6) ; de Corneille : « Il est beau de se vaincre soi-même >> (V, 11).

Mais la comédie n'acquiert toute son efficacité que si on lui donne un rythme presque frénétique, celui d'un «bal des voleurs >> ou d'une « danse macabre >>, assez proche de Goya ou de James Ensor , trahissant à travers une sorte d' allégresse diabolique la prése nce uni­ verselle d'un mal sans nuances et sans grandeur.. »

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