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Compagnies de commerce et de navigation

Publié le 09/11/2018

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POUR UNE DOMINATION COLONIALE

 

Le développement du commerce maritime entre le xvie et le xviiie siècle est inséparable de l'histoire coloniale. La découverte du Nouveau Monde puis la recherche de la route des Indes et la « course aux épices » suscitent les convoitises des négociants et armateurs européens. Les nations rivalisent pour s'installer sur de nouveaux territoires.

 

Les compagnies de commerce et de navigation sont créées pour répondre tant à cette volonté expansionniste qu'à la demande de consommateurs européens avides de produits exotiques. Ces compagnies sont des sociétés par actions auxquelles les États accordent des monopoles. Au xviie siècle, trois principales compagnies des Indes orientales s'imposent pour gérer les importations et exportations entre l'Europe et l'Asie. Véritables États dans l'État, elles bénéficient de chartes royales en vertu desquelles elles obtiennent le droit de battre monnaie, de lever des armées et de négocier des traités. En contrepartie, elles permettent aux États respectifs de s'enrichir par l’intermédiaire des taxes sur les produits. Leur règne s'achève au xviiie siècle tandis que l'océan Indien passe sous la férule britannique, qu'il est mis fin à l'esclavage et que les colonies d'outre-atlantique imposent leur indépendance. Même si au xixe siècle, la colonisation se poursuit, des gouverneurs remplacent les compagnies de commerce à la tête des colonies, et le libre-échange, né en Angleterre, s'étend à l'Europe entière.

L'ESSOR COLONIAL ET COMMERCIAL

Si le XVe siècle est celui des grandes découvertes et des expéditions, le xvi' siècle est celui des conquêtes coloniales. Les États européens comprennent que la maîtrise des routes maritimes et du commerce lointain constitue la condition de leur accession au rang de puissances internationales.

 

Dès 1471, les Portugais avaient lancé des expéditions coloniales au-delà de l'équateur. D'autres États européens leur emboîtent le pas.

Début de la traite des Noirs Vasco de Gama aux Indes Fondation de la Levant Company Création de l'East India  Company (EIC) Compagnie unie des Indes orientales (Pays-Bas) Comptoir français de Ndar (Saint-Louis du Sénégal) Compagnie française des Indes orientales Premier comptoir français à Surat (Inde) Compagnie française des Indes (CFI) Perte des privilèges de la CFI Dissolution de l'ElC

En 1497, John Cabot emprunte la route suivie par Christophe Colomb. Il explore la côte atlantique nord-américaine et décrète la région de Terre-Neuve propriété d'Henri VIII, roi d'Angleterre. Chargé par François Ier, soutenu par des marchands italiens et lyonnais, de rechercher la route des épices, l'Italien Da Verrazano débarque en Amérique du Nord, en 1524, avant de remonter le Saint-Laurent.

 

En 1534, Jacques Cartier lance la colonisation du Canada poursuivie jusqu'au siècle suivant par Samuel de Champlain, fondateur de Québec en 1608. Le navigateur anglais Francis Drake bénéficiant du soutien royal, quitte l'Angleterre en 1577 avec cinq navires. Il contourne le détroit de Magellan jusqu'au Chili, poursuit vers Java puis le cap de Bonne-Espérance et revient par la Guinée en 1580. La majeure partie du butin ramené par Drake sert au capital de la Levant Company anglaise en 1581.

 

Une politique mercantiliste se développe, basée sur la conquête de colonies et l'acquisition de métaux précieux, sources de richesse des États. Mais la colonisation n'est véritablement entreprise qu'au xviie siècle.

« En 1602, une dizaine de sociétés d'armateurs forment la Compagnie unie des Indes orientales , communément appelée VOC (Verenigde Oost-/ndische Compagnie) .

Dotée d'un capital permanent de 6 600 000 florins avec 2 200 actions, elle distribue chaque année des dividendes de 30 à 40 % à ses actionnaires .

Elle en réfère au gouvernement pour le choix de son directeur mais reste la propriété des marchands .

Ses prérogatives sont considérables: droits de conquête et d'établissement équivalents à ceux d'un gouvernement , mais également droit de faire la guerre, de conclure des pactes, de nommer des fonctionnaires dans les colonies et de battre monnaie.

le trafic de la VOC est centré sur le commerce du poivre et d'autres épices.

la Compagnie contrôle ainsi le négoce de la muscade , du girofle puis de la cannelle .

Après 1650, elle se consacre aux tissus de luxe, en concurrence avec les Français et les Anglais .

la colonisation des Moluques , de Java et Sumatra au XVII' siècle, permet à la Hollande de prendre la place du Portugal dans le commerce des épices.

la VOC a déjà des allures de société multinationale : elle emploie des Allemands , des Suisses , des Scandinaves , des marins et soldats français et aussi des Anglais et des Écossais , soit près de 80 ooo hommes .

Au cours des huit premières années de son existence, elle a recours à plus de 60 navires, tandis que l'Angleterre en utilise 17.

la puissance de cette Compagnie atteint son apogée dans la première moitié du XVII' siècle , le « siècle d 'or » des Pays-Bas.

Après la reconnaissance de l'indépendance des Provinces-Unies (traités de Westphalie qui mettent fin à la guerre de Trente Ans en 1648 ) , la Compagnie met la main sur les possessions portugaises dans les Indes orientales , s'installe dans toute l'Indoné sie, et chasse même ses concurrents anglais de la côte malaise.

COLBERT ET LES COMPAGNIES DES INDES Jean-Baptiste Co/berles! nommé intendant des Finances en 1661.

la supervision du département de la marine fait partie de ses prérogatives .

Ainsi, outre le rétablissement de l'ordre dans les finances du royaume, une de ses priorités est de réorganiser le secteur maritime .

Il fait dresser un état de la flotte militaire et marchande et des ports .

Au milieu du XVII' siècle, tandis que les Hollandais disposent d'une flotte de 16000 bateaux , la France n 'en possède qu'un peu plus d'un millier .

Colbert crée un corps d'artillerie de marine , fait construire des arsenaux, ouvrir des canaux -canal des deux mers et canal de Saint-Omer - et créer le port de Sète en 1666, puis celui de Lorient spécifiquement pour la Compagnie des Indes.

En matière douanière, il réduit la diversité des droits provinciaux à un droit d'entrée et de sortie unique.

Pour Colbert , le succès des compagnies de commerce doit résulter à la fois d 'une association de marchands , de l'appui de l'État et de l'obtention d 'un monopole pour le commerce colonial, régime dit de l'Exclusif , institué en 1670 .

la Compagnie des Indes occidentales pour l'Atlantique connaît un succès mitigé.

les Compagnies du Nord et du levant fondées sous son influence en 1669 et 1670 déclinent rapidement.

Colbert fait cependant de la Compagnie des Indes orientales la première société commerciale du royaume .

lA COMPAGNIE DES INDES ORIENTAl!$ Après les balbutiements d'une Compagnie des Moluques en 1615, puis d 'une première Compagnie des Indes sous Richelieu , la Compagnie des Indes orientales est déclarée officiellement en août 1664.

Colbert souhaite une compagnie puissante dont il pourrait aussi obtenir des services .

Son modèle de référence est la VOC hollandaise.

Mais la présence de l'État doit, selon lui, y être fortement marquée .

le projet de création d 'une Compagnie des Inde s orientales et d'une Compagnie des Indes occidentales est alors lancé et les délégué s, reçus par loui s XIV, proposent les statuts .

Douze syndics provisoires, composés de marchands, sont nommés .

le roi investit 3 millions de livres sur les 15 millions prévus .

De hauts fonctionnaires , des seigneurs et des notable s sont invités à souscrire au capital.

La Compagnie est subdivisée en Chambres à Lyon, Rouen , le Havre, Nantes et Bordeaux, chacune disposant d'un budget propre et du droit d 'armer des navires.

La direction générale est située à Paris .

le ministre de la Marine en est le président et directeur.

la Compagnie des Indes orientales obtient le droit de naviguer et de négocier du cap de Bonne-Espérance jusqu'aux Indes , pendant 50 ans.

Elle acquiert un droit de propriété à perpétuité sur toutes les terres dont elle s'empare .

Elle dispose d'un droit de justice souveraine , peut envoyer des ambassadeurs , signer des traités et déclarer la guerre.

Et surtout , elle bénéficie avec la Compagnie des Indes occidentales du statut de Compagnie royale.

Mais la guerre avec les Hollandais est coûteuse.

Dissoute une première fois en 1676 , elle renaît grace à l'Écossais John law, directeur de la Banque générale , qui en prend la présidence.

En 1719 , elle est réorganisée avec les Compagnies des Indes occidentales , du Sénégal , de Chine et d'Afrique au sein de la Compagnie des Indes .

D 'autres secteurs d'activité s comme la ferme (perception des impôts ou des taxes) des tabacs lui sont confiés.

Elle connaît un essor à partir de 1723 qui la porte au niveau de I'EIC anglaise .

LA PUISSANCE TERRITORIALE DES COMPAGNIES Au XVII' siècle, les compagnies de commerce et de navigation affirment leur puissance sur des territoires exigus -mais susceptibles de générer des profits- d' Afrique , d'Amérique, d 'Asie ainsi que sur les Antilles.

LES COMPTOIRS ET COMPAGNIES D'AFRIQUE Le comptoir du cap Nègre , situé dans la régence de Tunis, est créé en 1604 par une maison de commerce du Havre, et intégré dans une Compagnie d'Afrique en 1666 .

Plusieurs Compagnies d'Afrique sont formées , mais seront toute s éphémères .

la dernière est absorbée par la Compagnie des Indes .

En 1633 , la Compagnie du cap Vert crée au Sénégal un premier comptoir pour la traite des esclaves.

Dans la seconde moitié du XVII' siècle, les Compagnies r-----.., françaises installent des comptoirs au Sénégal (Saint­ Louis fondé en 1659, Podor, Galam) ainsi qu'en Gambie .

les Françai s enlèvent aux Hollandais Gorée et Rufisque.

De son côté , l'East lndia Company installe son premier comptoir permanent en 1659 à Sainte-Hélène.

LEs COMPTOIRS ET COMPAGNIES DES INDES Véritables zones d 'influence des compagnies de commerce , les comptoirs asiatiques sont créés tout au long du XVII' siècle.

Des agents permanents , assistés de courtiers indiens , de rédacteurs de contrat et d'interprètes, préparent les cargaisons de cotonnades, soieries , épices et autres produits achetés en échange de métaux précieux .

Ils en assurent également le suivi administratif.

Dans les comptoirs , l'autorité relève d'un Conseil d 'employés qui dispose d'un pouvoir militaire , diplomatique , commercial, administratif et de justice .

les principaux chefs-lieu x sont Bllfavia (aujourd 'hui ~~~ -jj~ Djakarta) pour les 1!1 Hollandais , Madras et Bombay IW!!i !liiili iii;;ia pour les Anglais , Pondichéry pour les Français et Tranquebar pour les Danois .

À partir de 1612 , date de son installation à Surat , l'East lndia Company ouvre des comptoir s en Inde .

les ouvertures s 'échelonnent au cours du xvn• siècle avec les comptoirs de Madras, Bombay et Calcutta .

En 1699, les Britanniques fondent un comptoir à Canton , en Chine.

les Danois et les Hollandais ouvrent également des comptoirs à Su rat où les Français obtiennent, en 1667, les mêmes droits que l'Angleterre et la Hollande .

Pondichéry prend le relais de Su rat à partir de 1674 et devient le centre administratif du commerce français en Inde et le principal comptoir de la Compagnie des Indes.

La Compagnie s 'installe aussi à Mad agascar et dans les iles voisines .

Les Hollandais chassent les Portugais de l'ile d 'Amboine en 1604 , s'emparent des Moluque s, créent Batavia sur Ille de Java en 1619, évincent les Portugais à Ceylan en 1658 et fondent Le Cap en 1652 .

les place s et forteres ses prise s aux Indes orientale s sont considérées par les Hollandais comme propriétés de marchands privés .

La Compagnie française des Indes orientales , quant à elle, gère cinq comptoirs en Inde : Pondichéry , Chanderna gor, Karikal , Yanaon et Mahé.

LES MARCHANDISES les Hollandais dominent le marché des épices .

Ils achètent des clous de girofle /.

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à Amboine, de la noix de muscade à Banda .

# ' et de la cannelle à Ceylan .

le poivre acheté sur la côte de Malabar, et utilisé pour la conservation des viandes, correspond pour la Hollande à une valeur de 2 millions de livre s par an.

les cotonnades et les tissus de l'Inde sont importés par chacune des compagnies .

le café introduit à Java par les Hollandais , à 171e Bourbon (la Réunion ) et aux Antilles par les Français , est très recherché par les consommateurs européens.

Quant au marché du thé chinois, il est dominé par les Anglais.

Les compagnies alimentent également les marchés européens en bois de teinture et porcelaine de Chine .

En Europe , l'inquiétude des manufacture s locales de tissus est vive.

Des mesures protectionnistes , sont réclamée ~: en 1688 , les importations de soie à fleur d'or et d'argent sont interdites en France .

En 1685 , le Parlement anglais adopte une décision similaire après l'assaut du siège de I'EIC par des artisans londoniens .

Ces mesures incitent à la contrebande .

LA FAILLITE DES COMPAGNIES Dans la première moitié du XVII' siècle, les compagnies de commerce et de navigation sont au faite de leur puissance .

De nouveaux territoires sont colonisés.

Mais au XVIII' siècle, certaines d 'entre elles commencent à décliner .

En 1742 , Joseph François Dupleix , nommé gouverneur de la Compagnie française des Indes , dirige le comptoir de Chandernagor et s'empare d 'un tiers de l'Inde avec son armée de Cipayes après avoir pris Madras aux Britanniques .

Cependant la construction et l'armement des vaisseaux sont source de dépen ses très important es, estimée s à 60 % de leur budget : en effet, les bâtiments doivent être construits selon des techniques similaires à celles appliquées pour les bâtiments de guerre afin de pouvoir porter des canons et résister aux aléas climatiques des mers asiatiques.

les salaires des équipage s, les dividendes versés aux actionnaires et la maintenance des bateaux représentent des sommes non négligeables.

D'autre part , les sorties massives d'argent destiné à l'achat des marchandises entraînent un déficit de la balance des paiements de plus en plus critique.

le contexte économique extérieur évolue également: les mesure s protectionnistes adoptée s en Europe favorisent le commerce interlope (illégal ) dans lequel sont impliqués des transfuge s des compagnies.

La concurrence étant vive, les prix en Europe doivent être révis é s à la baisse .

Des revendications contre les monopoles réservé s aux compagnie s se font entendre tandis que les colonies commencent à se révolter contre l'obligation d e ne commercer qu'avec leur métropole.

Des raisons politiqu es président également à la faillite des compagnies : la protection des colonies n 'est pas une priorité pour louis X IV et après deux guer res menées contre l a Grande-Bretagne, la France doit rendre en 1754 les territoires dont elle s 'était emparée en Inde, à l ' exception des cinq comptoirs.

Elle doit par ailleurs interdire à la Compagnie toute activité politique.

Enfin , les deux pays s 'affrontent de nouveau lors de la guerre de Sept Ans, entre 1756 et 1763: la reddi tion des Français à Pondichéry en 1761 assure la domination brrtannique définitiv e sur l'Inde , et dans l e même temps , la France doit s 'incliner à Québec et à Montréal.

Le traité de Paris , signé en 1763 entre la Grande-Bre tagne, l'Espagne et la France, met fin à la guerre de Sept Ans mais entérine la perte d'une bonne partie des colonies françaises : le Canada est cédé à l ' Angleterre , ainsi que les iles antillaises de la Dominique , la Grenade , Saint­ Vincent et Tobago mais auss i la rivière Sénégal avec ses forts et comptoirs.

la France récupère Saint-Pierre-et­ Miquelon , conserve Sainte-lucie , la Guad eloupe, Marie -Galante, la Désir ade et la Martinique.

Ruinée par la guerr e de Sept Ans, la Compagnie français e des Indes perd son monopole en 1769 .

De son côté , la VOC , très affaiblie par les attaques britanniques contre ses possessions et minée par les exigences de ses actionnaires, est dissoute en 1798.

À la tête des colonies , des gouverneurs , représentant l'admin istration royale , remplacent désorm ais les compagnies .

l'abolition progres sive de l'esclavage à partir de la Révolution f rançaise et le reflux de la traite des Noirs ont également raison des compagnies.

Même l'El(, à la tête du négoce avec l'Inde et qui pouvait bénéficier de ses liens étroits avec la Banque d 'Angleterre , finit par perdre le mon opole du commerce avec l'Inde en 1813 et avec la Chine en 1833 .

la Compagnie est finalement dissoute en 1858 à 1 'issue de la révolte des cipoyes , soldats indigènes dont elle assurait la solde.

LE ROYAUME-UNI SEUL MAÎTRE À BORD l'Anglet erre a progressivement éliminé ses rivaux à la fois par le conflit armé et par l a mise en plac e de politiques protecti onnistes.

les Actes de navigation pris au XVIIr siècle interdisent aux navires étrange r s d' exporter leurs produits en Angl eterre et réservent aux seuls navire s anglais le droit de commercer avec ses colonies .

Après la faillite de la Compagnie françai se des Indes , l'Anglet erre, qui devient la Grande­ Bretagn e aprè s son union avec l'Écosse, n'a plus de concurrent.

Elle peut désormais prôner sans risque le libre- échange tout en accélérant son ingérence en Inde puis en Chine .

Le commerce du thé et de l'opium lui assure des profits considérables.

Dès lors, la Grande-Bretagne s 'affirme comme la première puissance maritime et coloniale au monde .. »

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