fiche de lecture Marc Bloch: les rois thaumaturges

« Fiche de lecture : BLOCH Marc, Les rois thaumaturges.

Étude sur le caractère surnaturel attribué à la puissance royale particulièrement en France et en Angleterre, 1923, rééd.

Paris, Gallimard, 1983 (introduction ,livre I, livre II, chap.

1 et 3, livre III) Marc Bloch (1886-1944) est un historien, principalement médiéviste, français.

Il publie en 1923 l'un de ses livres phares : les Rois thaumaturges.

Ce livre par son caractère « révolutionnaire » marque, entre autre, l'entrée de la discipline historique dans « l'histoire totale ».

Basé sur une approche pluridisciplinaire et d'érudition, il annonce la future école des Annales « fondées » par Marc Bloch et Lucien Febvre au cours des années 1920.

Ainsi le présent livre mélange anthropologie, sociologie, ethnographie,méthode comparative, histoire des mentalités.

Surtout Marc Bloch n'énonce aucune conclusion définitive et s'applique à théoriser, à retracer et à peindre l'histoire du don thaumaturgique.

Il s'applique l'une de ses maximes célèbres : « Satanique ennemi de la véritable histoire : la manie du jugement ».

Cette volonté, de Bloch ,puis de l'école des annales, de faire une histoire impartiale, non anachronique, dénuée de parti pris est encore une source d'inspiration pour tout historien.

Leurs successeurs les plus importants sont sans doute Georges Duby et Jacques le Goff.

Ainsi ce livre dépoussière la profession d'historien en faisant de ce dernier plus qu'un conteur mais un acteur rigoureux et méthodique.

Certaines conclusions du livre sont néanmoins aujourd'hui remises en cause, notamment par l'historien britannique Franck Barlow1.

On arguera cependant que Marc Bloch avait tout prévu avec sa citation prophétique : « la mission d'un livre n'est jamais mieux remplie que le jour où les conclusions en sont contestées ». L'ouvrage est composé d'une introduction et de 3 « livres », il suit une base chronologique, le premier sur les origines des dons thaumaturgiques, le deuxième sur le développement de ces dons durant les siècles suivants et le dernier qui sert d'élargissement à l'ensemble de l'ouvrage.

Bien qu'évoquant les deux royautés, l'accent est mis sur le roi de France, thaumaturge plus renommé. Bien que nommé Les rois thaumaturges, le livre traite également de tout ce qui touche au sacré des rois de France et d'Angleterre, dont le toucher des écrouelles est un des aspects. Le livre 1er explique tout d'abord ce que sont les écrouelles, « l'adénite tuberculeuse c'est à dire les inflammations des ganglions lymphatiques dûes aux bacilles de la tuberculose ».

Il décrit ensuite les débuts du rite français de guérison de cette maladie, qui aurait comme première occurrence Robert le Pieux (996-1031).

Ce don se serait ensuite transmis à ses successeurs qui se seraient spécialisés dans la guérison des écrouelles dès Philippe Ier (1060-1108).

Le premier chapitre s'applique à identifier les débuts du rite et à chercher les influences antérieures qui expliqueraient le phénomène, avec notamment les origines du pouvoir guérisseur des rois, le caractère religieux des royautés germaniques et l'héritage biblique qui élèvent le roi de France au dessus du simple mortel.

Ainsi l'auteur par ce retour en arrière explique que les mentalités du temps étaient prêtes à accueillir le pouvoir guérisseur des rois.

Bloch note la spécificité capétienne et ses points communs avec le mythe anglais2.

Pour l'auteur ces rois se mettent sous le patronage de ces personnages illustres pour récupérer leur gloire.

Il cherche ainsi à identifier une raison rationnelle au développement soudain 1 Pour l'historien britannique il n'y a aucune preuve formelle du toucher des écrouelles avant le XIIe siècle en France et qu'elle soit régulière avant Saint Louis au XIIIe siècle.

Tandis que pour Bloch, dans son livre, la thaumaturgie des rois apparaît dès le début du XIe siècle et Robert le Pieux, et devient régulière dès son petit fils Philippe Ier. 2 Les deux légendes semblent pour Marc Bloch identiques : Un premier roi est jugé comme saint : Edouard le Confesseur (1042-1066) en Angleterre et Robert le Pieux en France.

Puis ses dons deviennent héréditaires à partir d'Henri Ier (1100-1135) pour l'Angleterre et Philippe Ier pour la France.. »