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Frédéric II de Hohenstaufen

Publié le 22/02/2012

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Frédéric II est une des figures les plus étranges du Moyen Âge. Ses contemporains ont été déconcertés par les contradictions de sa nature et de son action, par ce Hohenstaufen beaucoup plus Italien qu'Allemand, par cet empereur chrétien persécuteur des hérétiques mais ami et admirateur de l'Islam, par ce despote cruel mais fin lettré et philosophe, entouré d'une cour fastueuse à l'orientale. " Antéchrist, Bête de l'Apocalypse, Protée " ont clamé ses ennemis. " Sauveur du monde, prince de la paix " ont rétorqué ses fidèles. " Stupeur du monde, agent de bouleversements surprenants " a conclu Mathieu de Paris. Les historiens modernes ne sont pas restés moins perplexes devant ce " cas " extraordinaire. Au siècle dernier, Frédéric apparaissait surtout comme une individualité hors série, étrangère à son époque et même à tous les temps. Pour J. Burckhardt, il fut " le premier homme moderne sur le trône, l'annonciateur de la Renaissance ", pour Nietzsche " un libre penseur, un athée, un ennemi de l'Église, le premier Européen ". De nos jours ces vues romantiques ont été largement réfutées. On a mis en évidence que maintes singularités apparentes chez Frédéric II résultent de la situation originale du royaume de Sicile, ou s'entrecroisaient les influences normandes, byzantines et islamiques, et qu'elles se trouvent déjà chez ses prédécesseurs. On s'est appliqué à souligner les traits de mentalité qui révèlent en lui un homme de son temps plus qu'un précurseur de la Renaissance.

« visage agréable, de taille médiocre et d'aspect plutôt chétif.

“ On n'en eût pas donné deux cents dirhems, s'il eûtété vendu comme esclave ”, dit plaisamment un Sarrasin de passage à sa cour.

Par contre, tous étaient frappés parsa curiosité intellectuelle illimitée.

Il parlait plusieurs langues : outre l'allemand et l'italien, le latin, le grec, lefrançais, peut-être l'hébreu.

Il avait un goût prononcé pour les sciences ; il s'intéressait également à l'astronomie, àl'astrologie, à la médecine, à l'art vétérinaire, aux sciences naturelles.

Le traité de fauconnerie qu'il écrivit, De artevenandi cum avibus, témoigne d'un souci d'observation bien rare à l'époque.

Dans la préface, il reproche à Albert leGrand d'avoir écrit sur le même sujet : “ Il n'a jamais pratiqué la fauconnerie ; nous l'avons depuis notre jeunesseaimée et exercée...

Le but de cet ouvrage est d'exposer les choses telles qu'elles sont ” ; véritable profession de foid'empirisme.

D'autre part, Frédéric était séduit par la pensée des Anciens et des Arabes et invitait volontiers à sacour des savants juifs et arabes.

En particulier, l'astrologue écossais Michel Scot qui avait aussi un talent appréciéde prestidigitateur lui enseigna la philosophie d'Aristote et d'Averroès, et traduisit pour lui plusieurs de leurs écrits. Comme la plupart des princes de ce temps, Frédéric aimait à écouter les troubadours et il composa lui-même,comme son père, mais en italien, des poèmes d'amour à la façon des Minnesänger.

Il cultivait également lagrammaire et surtout la rhétorique, qui fleurit dans les manifestes de la fin du règne, qu'il rédigea probablement lui-même, au moins en partie.

Enfin, il avait une prédilection spéciale pour l'architecture.

Les châteaux qu'il fit édifier enItalie du Sud, à la fois forteresses et résidences royales, portent sa marque personnelle : le plus beau, par sasobriété puissante, est celui de Castel del Monte, qui semble inspiré du gothique cistercien français, peut-être parl'intermédiaire des châteaux de la Terre Sainte. Porté au faste et à l'ostentation, Frédéric s'entourait d'une cour brillante, semi-orientale, comme d'ailleurs sesprédécesseurs normands.

On y trouvait de nombreux musulmans parmi ses gardes, ses pages, ses servantes, sesdanseuses.

Ses ennemis s'en prirent particulièrement à son harem, preuve de ses débauches et de son inclinationpour l'Islam.

En outre, il collectionnait les animaux rares, éléphants, lions, girafes, chameaux, faucons blancs, etcette ménagerie l'accompagnait dans ses déplacements.

Il l'emmena même en Allemagne, où elle produisit lasensation escomptée. Il est très difficile de se prononcer sur les sentiments religieux de Frédéric II.

Les papes l'ont traité d'antéchrist,d'athée, de matérialiste ; Grégoire IX le dénonça comme l'auteur du mystérieux “ Traité des trois imposteurs ”, quepersonne ne vit jamais, selon lequel l'humanité aurait été victime des mensonges de Moïse, Jésus et Mahomet.

S'il ya beaucoup d'exagération dans ces diatribes, le scepticisme de Frédéric semble confirmé par le chroniqueur arabeIbn al-Giawzi ; celui-ci nota que, durant son séjour en Orient, l'empereur laissait apparaître par ses questions et sescommentaires “ qu'il était un matérialiste et se jouait du christianisme ”.

Il est vraisemblable que Frédéric acceptaitle fait de la diversité des religions.

Par contre, sa tolérance ne s'étendait pas aux hérétiques chrétiens, qu'ilpersécuta cruellement.

Il est vrai qu'il voyait en eux surtout des rebelles à son autorité, que le catharisme fleurissaitparticulièrement à Milan, farouchement hostile à sa domination, et que la persécution était un des rares terrainsd'entente avec le pape, sans dommage pour lui. Après le couronnement impérial, la question de la croisade passa au premier plan.

Mais Frédéric n'était pas pressé deréaliser son vœu, désirant auparavant restaurer son autorité dans son royaume de Sicile, après huit ans d'absence.A trois reprises, il ajourna son départ, et Honorius III, pour ne pas faire échouer l'entreprise, se montra compréhensif: il réussit à réconcilier l'empereur et les villes lombardes, il lui fit épouser Isabelle de Brienne, fille du roi deJérusalem.

Enfin, en 1227, précédé du gros des croisés, Frédéric prit la mer.

Mais ce fut pour revenir trois jours plustard à Otrante, arguant d'une maladie qui ne semble pas avoir été feinte.

A ce moment, Honorius venait de mourir.Son successeur Grégoire IX, d'une tout autre envergure, n'était pas disposé à des ménagements.

Il lançal'excommunication contre le “ perfide ”, sans vouloir écouter ses explications.

Pourtant, Frédéric était bien décidécette fois à partir.

A la fin de juin 1228, il s'embarquait à Brindisi pour Saint-Jean d'Acre, via Chypre. Cette croisade d'un excommunié est l'un des épisodes les plus saugrenus du Moyen Âge.

Dès l'abord, l'empereurcomptait bien plus sur la diplomatie que sur les armes pour parvenir à ses fins.

Le sultan d'Égypte, Malek-el-Kamil,était dans les mêmes dispositions conciliantes, d'autant plus qu'il espérait l'appui des croisés contre le sultan deDamas.

Les deux souverains se rencontrèrent et conclurent un traité qui fut tenu secret, tant il devait exaspéreraussi bien les musulmans que les chrétiens.

Une trêve de dix ans était instituée ; Jérusalem était cédée auxchrétiens, sauf trois mosquées, ainsi que Bethléem, Nazareth, Saint-Jean d'Acre et Sidon, ces deux ports étantreliés par deux étroits couloirs aux lieux saints, afin d'assurer la sécurité des pèlerins.

Ce succès éclatant ne suffitpas à rallier les chrétiens.

Les Templiers et les Hospitaliers gardèrent une réserve hostile et le patriarche deJérusalem lança l'interdit sur la ville, de sorte que les cloches ne sonnèrent pas pour l'arrivée de l'empereur etqu'aucune messe ne put être dite.

Frédéric préféra accepter l'hospitalité d'un cadi et il fut solennellement reçu parle sultan à la mosquée d'Omar, où l'on vit les musulmans de la suite impériale faire leurs dévotions.

Par égard pourson hôte, le sultan avait fait taire les muezzins ; Frédéric le lui reprocha : “ Si vous veniez dans mon pays, jen'interdirais pas à cause de vous les sonneries de cloches.

” Le 18 mars 1229, au Saint-Sépulcre, il se plaça lui-même sur la tête la couronne du royaume de Jérusalem, réalisant, pour la seule fois dans l'histoire, le rêve de tousles empereurs du Moyen Âge. Cependant, moins d'un an après son départ, Frédéric était de retour à Brindisi.

Déjà les alliés du pape envahissaientl'Italie du Sud, mais sa seule présence changea leur victoire en déroute.

Il s'abstint toutefois de pénétrer dans l'Étatpontifical, et de laborieuses négociations s'engagèrent, qui aboutirent à la paix de San Germano (1230).

Au prix deconcessions assez humiliantes, Grégoire IX relevait l'empereur de l'excommunication : la réconciliation devait semaintenir, non sans aléas, pendant neuf ans.. »

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