HISTOIRE: Marguerite d'Angoulême

Son front, chargé de pensées, de soucis et de projets, se bombe légèrement. Son nez, busqué, à l'arête mince et comme acérée, rejoint presque ses lèvres fines que ne cessent de faire frémir les ondes de sa sensibilité. Elle se félicite du bon tempérament de ses humeurs, quoique, de temps à autre, un excès de bile noire la dispose à la mélancolie. Elle a le goût des doctes leçons, des discours moraux ou métaphysiques, des histoires galantes. Elle passe sans vergogne de la lecture d'une élévation dévote à celle d'une facétie joliment narrée mais quelque peu grivoise. Elle demande en vain à ceux qu'elle admet dans sa familiarité le constant service d'une amitié tendre. Son frère, François, recherche sa compagnie ; il la caresse ; il la flatte ; il lui assigne pour mission de séduire ambassadeurs et diplomates étrangers. Cependant il ne lui témoigne, pour tant de complaisances, qu'une conventionnelle gratitude, et finit par lui infliger l'obsédante douleur d'une espèce de torture quotidienne.